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Walter Casagrande : « Neymar est le miroir de Jair Bolsonaro »

Propos recueillis par Alexandre Berthaud, à São Paulo.
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Le Brésil vote ce dimanche pour élire son nouveau président de la République. L’ex-international Walter Casagrande Júnior s’engage pour Lula (gauche) face à Jair Bolsonaro (extrême droite). Il dessine un lien très clair entre la campagne d’aujourd’hui et son engagement, à l’époque, dans la Démocratie corinthiane.

Quand on parle d’engagement politique dans le football, on évoque généralement assez rapidement le cas de la Démocratie corinthiane, via la figure de l’immense et regretté Sócrates. C’était en 1982. Quarante ans tout pile plus tard, plusieurs acteurs de cette révolution ont rechaussé les crampons politiques pour défendre les couleurs de Lula (Parti travailliste) face au président sortant, Jair Bolsonaro. C’est le cas de Walter Casagrande, attaquant du club populaire de São Paulo à l’époque. Entre tacle appuyé sur Neymar et mémoires des luttes passées, il accorde quelques minutes à So Foot sur son canapé.


Pourquoi vous êtes-vous engagé dans la campagne de Lula ?Je crois que quand Jair Bolsonaro est arrivé au pouvoir en 2018, on savait que ça allait être mauvais. On ne pensait pas que ça le serait à ce point, qu’il aurait cette attitude perverse, lâche. Ce gars veut détruire la démocratie. À côté de ça, on a 33 millions de personnes qui ont faim dans le pays (étude datant de 2022, NDLR). Ça me touche, donc je m’engage, comme tout citoyen brésilien pourrait le faire. Bien sûr, aussi comme personnage médiatique, vu qu’on m’offre des espaces pour le faire. D’ailleurs, de nombreuses personnes s’engagent pour lutter contre l’attitude de Bolsonaro. Il a des paroles racistes, homophobes, il a des connivences avec les orpailleurs illégaux en Amazonie, ceux qui tuent et violent les peuples autochtones, il détruit la forêt. Je m’engage parce que, dans ce moment particulier, c’est nécessaire. J’ai juste le regret aujourd’hui de ne pas avoir su me mobiliser en 2018 contre ce personnage.

Toutes ces manifestations, ces mouvements sociaux prouvent que la Démocratie corinthiane est éternelle.

Et la Démocratie corinthiane, elle vit encore aujourd’hui ?Dans le football, non. En revanche, son héritage est social. Vous voyez tous les rassemblements qu’on a connus ces dernières années, sous Jair Bolsonaro ? Eh bien, la Démocratie corinthiane est à chaque fois présente, il y a toujours des personnes de la Démocratie corinthiane, ex-joueurs ou supporters d’aujourd’hui, qui participent aux discussions. À travers son discours pervers, Jair Bolsonaro a rassemblé les défenseurs de la démocratie au Brésil. Au milieu de tout cela, la Démocratie corinthiane est un pilier, parce que le club dont elle vient est un club populaire. Toutes ces manifestations, ces mouvements sociaux prouvent que la Démocratie corinthiane est éternelle. Et je suis très fier d’avoir compté parmi les initiateurs de ce mouvement, de me battre aujourd’hui pour lui donner une continuité.

Vous parlez de Jair Bolsonaro comme d’un danger pour la République. La Démocratie corinthiane est née aussi pendant un mouvement de contestation.Bien sûr, le pays était en dictature militaire. D’abord, on a demandé la liberté comme joueurs de football, à l’époque c’était assez paternaliste, le joueur brésilien était infantilisé, sans responsabilités. Mais on était plusieurs à avoir ce désir en nous : moi, Sócrates, Vladimir, et puis le manager Adilson Antero Alves (l’initiateur du mouvement, NDLR). On a conquis cette liberté dans le club, puis en dehors, on avait le droit de sortir par exemple, de se divertir. Avec Sócrates, on allait voir des concerts tous les week-ends, je l’emmenais voir du rock, lui il préférait le sertanejo (sorte de country brésilienne, NDLR). On discutait, on buvait une bière, c’était assez simple, on n’avait pas de nom pour ça. Un jour, parce qu’on prenait nos propres décisions, le terme de Démocratie corinthiane est apparu, on ne savait plus ce que c’était la démocratie en 1982, la dictature était là depuis 1964. Et en comprenant qu’on était une démocratie, on a compris qu’on avait un rôle, on a participé à la lutte pour le droit de voter directement pour le président, en 1984. On n’a pas réussi, mais la démocratie en est sortie grandie.

Mais vous aviez ça en vous, ce sens civique ?Depuis l’adolescence, j’ai toujours été comme ça. À 16 ans, en 1979, je marchais contre l’Amnistie. (Approuvée par le Parlement brésilien le 22 août 1979, la loi Amnistie garantissait l’absence de poursuites contre les policiers et les militaires tortionnaires, ainsi que pour les opposants engagés dans la lutte armée contre le régime, NDLR.) Quand je trouve qu’il est nécessaire de se battre pour une cause, je me bats. Aujourd’hui, j’ai un éditorial pour la Folha (de São Paulo, le plus grand quotidien du Brésil, NDLR), pour le site UOL aussi. J’utilise l’espace qu’on me donne pour me battre pour mes idées.

J’ai l’impression qu’aujourd’hui, les joueurs manquent de courage.

Aujourd’hui, ce n’est plus vraiment la mode pour les footballeurs de se positionner politiquement…Je suis d’accord. J’ai l’impression qu’aujourd’hui, les joueurs manquent de courage. Ils ne s’envisagent plus comme citoyen, et évidemment si vous vous envisagez uniquement comme un joueur de football, vous regardez les règles de votre club, qui peut-être va vous dire de ne pas vous positionner. Vous vous dites que c’est mauvais pour votre carrière. Mais si vous avez une conscience de citoyen brésilien, ça me paraît évident qu’il n’y a aucune hésitation à avoir sur le fait de se manifester ou pas. Parce que vous savez qu’en plus, en tant que joueur professionnel, votre voix compte. Certains utilisent cet espace, mais certains l’utilisent mal. Comme Neymar.

Neymar, justement, a déclaré son soutien à Jair Bolsonaro pour cette élection.C’est une des choses les plus terribles qu’un joueur de football puisse faire. C’est un comportement pervers, enfin la prise de parole de Neymar ne l’est pas, mais c’est le gars qu’il soutient qui l’est. Ce gars-là (Bolsonaro) est raciste, il est homophobe, il a mis des armes dans la rue, il a agressé des femmes journalistes. Et malgré cela – je ne vais pas dire qu’il a eu le courage, mais plutôt la lâcheté – malgré cela, il a la lâcheté d’enregistrer cette vidéo de soutien, pour un personnage néfaste, pervers, lâche ? Neymar s’est comporté comme l’un des pires citoyens brésiliens qui puissent exister sur la planète.

Quelle conséquence vous voyez pour son image, ici ?Le peu de lumière, de gens qui l’aimaient, des supporters de la Seleção, tout ça s’est éteint. Même s’il ramène la Hexa (la sixième Coupe du monde, NDLR), indépendamment de cela, il va entrer dans l’histoire avec ce soutien à un président candidat néfaste, pervers, lâche, menteur. Voilà ce que Neymar soutient. Et pour moi, si tu soutiens un personnage pareil, tu soutiens ce qu’il dit, tu soutiens ce qu’il fait, tu es égal à lui. Neymar est le miroir de Jair Bolsonaro.

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Propos recueillis par Alexandre Berthaud, à São Paulo.

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