L’un de vous est fan du FC Nantes, c’est ça ?
Maxime : J’étais sur-fan de football quand j’étais gamin et j’allais au stade tous les dimanches pour voir le FC Nantes, ouais. Pour tout te dire, j’ai même connu le stade Marcel-Saupin avant La Beaujoire. La Beaujoire, c’était un des tout premiers stades modernes, mais ça faisait aussi lieu de gros concert. Le premier concert pop que j’ai vu de ma vie, c’était Tina Turner à La Beaujoire… En 1990, un truc comme ça. Pour revenir au FC Nantes, je les ai vus contre Le Havre, contre Saint-Étienne, contre le PSG. Ils étaient deuxièmes et ils se disputaient la première place avec le PSG à l’époque. Il y avait Burruchaga. Ça remonte, hein. C’était l’époque du Mondial 86. Tous les dimanches à faire signer des autographes à Burruchaga, quoi. Le n°2 argentin, l’ailier de Maradona… C’était la superstar. Il arrivait tous les jours à l’entraînement avec la tête d’un mec qui avait fait la teuf toute la nuit comme un barbare ! (rires)
Thomas : À l’époque où c’était encore possible, ouais…Maxime : C’était une rock star ! Et clairement, le mec pouvait se le permettre. Surtout qu’à l’époque, Nantes était une super ville pour faire la teuf toute la nuit. Nous, on se pointait à dix heures à La Jonelière et lui, c’était le seul joueur à se pointer à trois heures de l’après-midi avec des grosses lunettes de soleil parce qu’il s’était levé un quart d’heure avant… (rires) Ça donnerait presque envie de faire une chanson sur lui. En disant « Burruchaga » , t’as déjà un rythme. Ça fait une combinaison un peu tribale ! Il y avait aussi Maxime Bossis. J’étais pas forcément très fan, mais il s’appelait Maxime comme moi, donc je lui prêtais beaucoup d’attention. C’était à l’époque où je rêvais d’être un star du foot et que je ne savais pas encore que je n’avais pas la condition physique pour. Comme tout petit ado de province, tu fais du sport parce que sinon tu t’emmerdes vite. Après, j’ai plus ou moins décroché du FC Nantes dans les années 90 parce que la musique prenait un peu toute la place. Et le foot est revenu tout simplement à l’époque de Zidane.
Difficile d’y échapper, en effet…
Maxime : Impossible, ouais. Et puis, c’était un moment génial, quand même, le Mondial 98. Une espèce de rassemblement ultime. Justement, j’étais retourné à Nantes juste pour ça. Il y avait beaucoup de matchs là-bas. C’était délirant, tu n’avais pas un seul bar qui n’était pas accaparé par le football. Des gens du monde entier autour du bar et finalement, qui gagne ou qui perd… C’était important, mais moins que l’ambiance. Après, son coup de boule en 2006, c’est difficile de ne pas en parler.Thomas : C’était mythologique. Ça allait au-delà du football.Maxime : D’un seul coup, il y avait un truc qui explosait à la tronche de tout le monde, dévoilé d’un coup d’un seul. Comme s’il donnait une situation réelle, une face cachée qu’il cherchait à éviter, mais qui finit par exploser. Ça permettait de se rendre compte de ce qui pouvait se passer dans la tête d’un footballeur. Et le rapport à l’équipe adverse. Le jeu de nerfs incroyable à l’intérieur de ça.Thomas : Moi, j’ai du mal à me dire que ça n’était pas délibéré. Vu l’enjeu du match, vu le joueur que c’était. Des insultes sur sa famille, il en avait pris pendant dix ans. Et comme je disais, finalement, le fait que l’on se demande quelle est l’origine du truc, ça en fait quelque chose de mythologique !
Toi qui est nantais, Maxime, pourquoi c’est si important le jeu à la nantaise ?
Thomas : Le beau jeu « à la nantaise » , on ne le trouve pas que dans le foot ! Quand on joue avec Viking, on essaie de jouer « à la nantaise » ! (rires) Les grands matchs de sport collectif, c’est un peu comme un grand concert. Moi, j’ai joué au rugby à un certain niveau – j’ai joué ma dernière année de junior au Stade français – et je pense que le ressenti est le même en matière de foot et de musique. Cet engagement total, sinon tu te fais arracher, tu te fais très mal. Si tu n’entres pas sur scène ou sur un terrain à deux milliards de % sûr de toi, ça peut devenir dangereux. Sinon, je suis allé plusieurs fois au Parc des Princes pour voir le grand PSG, l’époque Ginola. Mon demi-frère était encarté et il m’emmenait très souvent. Mais ça coïncidait aussi avec la période sombre du club et ses supporters. On s’est retrouvés embarqués à plusieurs reprises dans des trucs où tu te retrouves avec quatorze bagnoles pétées. Du coup, on s’est un peu détachés…
Maxime : C’est vrai qu’à un moment, c’est bien parti en live. C’est devenu assez violent. Et pour nous, ça tombait pile à l’âge où c’était plus sexy d’être peace and love, d’avoir les cheveux longs, d’être habillé en daim et d’écouter les Doors…
Thomas : « Être habillé en daim » . Dans dix ans, tu regretteras cette phrase ! (rires) Dans ma famille, c’est mon père le dingue de foot et quand j’étais gamin, il me montrait les fameux matchs d’anthologie. Il m’a montré la Main de Dieu, la finale de Saint-Étienne contre le Bayern. Une espèce de match complètement fou. Le match France-RFA de 82, aussi.
Quels joueurs appréciez-vous en particulier ?
Thomas : Moi, je suis un fou de Cantona. D’abord parce que c’est un mec qui adore la musique. On a eu l’occasion de le rencontrer. Le mec est venu nous saluer à la fin d’un concert et on a parlé cinq minutes : de musique, de fleurs et du beau temps. Il a une telle classe… Un mec super humble, avec une noblesse et une humanité hyper puissantes. J’apprécie son intégrité et son implication. Et en même temps, tu sens que…Maxime : Bah que c’est un mec complètement taré ! Qui peut faire des choses improbables. Récemment, je l’ai vu dans Les Rencontres d’après-minuit de Yann Gonzalez. Le rôle qu’il a dedans est génial. Je ne sais pas si j’ai aimé ce film, mais il y a des choses très belles, notamment son personnage complètement dément. Il y a une vraie poésie chez Cantona.
Thomas : Que ce soit chez des gros fous furieux insupportables ou chez des mecs solaires comme Cantona, il y a un ego magnifique. Le fait d’entrer dans l’arène. Il y a un côté gladiateur. T’es obligé d’expérimenter. C’était la même chose avec Maradona. Il me fascine. C’est une popstar, sa vie est une épopée…Maxime : J’ai un bon souvenir de Joël Bats, aussi. Notamment pour sa coupe de cheveux improbable. Il avait une tête de mec sympa. Une star de gardien. Et parce qu’il faisait des chansons. Il avait une dégaine de rockeur, un peu. Je l’aurais bien vu dans Trust.
Dernière question : c’est qui la plus grosse sensation de La Beaujoire, Tina Turner ou Burruchaga ?
Thomas : C’est Tinachaga ! (rires)
Maxime : Si je l’avais vu jouer en Coupe du monde contre le Brésil, je dis pas. Mais je crois qu’en termes d’émotion dans un stade, Tina Turner passe devant. En termes de sexytude aussi !
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