Beau gosse vs enfant
À y regarder de près, l'année de naissance est sans doute le seul point commun entre les deux jeunes Argentins, qui rêvent de Ligue des champions et de sélection, mais qui savent qu'avec Pipita, le Kun et Carlitos, il aurait été bien plus simple d'être brésilien. Derrière l'actuel trio en or du Tata Martino, Mauro Icardi pointe toutefois le bout de son nez. Trois ans dans le Calcio, une belle régularité avec le maillot Pirelli de l'Inter Milan sur le dos, un talent incontestable : les arguments sont là. Mais ce n'est pas tout. MI9 a aussi un caractère affirmé et une grande facilité à mettre sa tronche de beau gosse partout, tout le temps. Presse sportive, presse people, plateaux télé, réseaux sociaux : Mauro et la sulfureuse Wanda Nara étalent à volonté leur amour interdit et infini. Une stratégie - ou une façon d'être - qui porte ses fruits. Projecteurs, célébrité, popularité : en Argentine (pays qu'il a quitté à 9 ans), tout le monde sait qui est Mauro Icardi. Certains le réclament même déjà dans le onze de l'Albiceleste pour la Copa América chilienne du mois de juin prochain. À 1000 kilomètres de Milan, sur la côte espagnole, Luciano Vietto réalise une saison non moins brillante, mais sans les étincelles qui vont avec : en Argentine, seuls les connaisseurs savent que le gamin de Córdoba fait lui aussi son trou en Europe.
Timidité maladive
Il faut dire que le « numéro 9 moderne » est l'exact opposé de son compatriote de l'Inter : hors des terrains, il préfère toujours l'ombre à la lumière. L'année dernière, quand il mettait un peu d'amour dans la violence du championnat argentin, il demandait à Diego Urbaneja, chef de communication médias de Racing, de refuser toutes les demandes d'interview possibles. Lorsqu'il accepte finalement de se confier au Grafico, le mag sportif argentin de référence, le journaliste finit l'entretien sur une drôle de remarque : « Tes mains ont tremblé tout le long de la discussion, tu es beaucoup moins nerveux face aux gardiens adverses » . Réponse du joueur à la gueule d'enfant et au sourire gêné : « Je n'aime pas trop parler face à la caméra et au micro. Si je peux l'éviter, c'est mieux » . Une timidité presque maladive qui aurait pu lui coûter sa carrière. Au centre de formation, ses coachs l'engueulaient car, trop gentil, il préférait toujours la passe au tir, malgré une qualité et une précision de frappe étonnantes. Devenu plus tueur sur le pré, titulaire indiscutable dans un grand d'Argentine à 19 ans et convoité par des poids lourds européens, Vietto a préféré opter pour Villarreal, un club moins médiatique. « C'est l'équipe qui s'est montrée la plus intéressée » , justifie-t-il. Le gamin ne devrait pas laisser longtemps tant de talent dans un paisible sous-marin jaune. Mais pour s'imposer au plus haut niveau et porter ce si convoité maillot national, Luciano va sans doute devoir se faire violence et parler un peu plus de lui. Sans nécessairement exhiber son fol amour sur toute la scène médiatique.
Par Léo Ruiz
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