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Vidal, le principe actif
Un Arturo Vidal est moins médiatisé qu'un Alexis Sanchez. Mais un Arturo Vidal sait se rendre aussi indispensable que l'ailier de l'Udinese. Tout simplement parce que, l'avoir dans son équipe, c'est l'assurance d'avoir un mec qui s'adapte à toutes les situations et qui se traîne jusqu'au bout.
Ce qui est bien avec le dictionnaire Vidal, c’est qu’on peut chercher le médoc qui convient le mieux à un problème de santé, dans le but de soulager le système immunitaire. Ce qui est bien avec Arturo Vidal, c’est qu’on peut le placer dans n’importe quel système, il soulagera l’équipe. Que ce soit avec le Bayer Leverkusen ou la sélection du Chili, Vidal, c’est l’assurance que tout va bien se passer. Son poste? Il s’en tape. 6, 8, défenseur, latéral offensif: n’importe où sur le terrain, et il donne satisfaction. Vidal, en fait, c’est un peu le principe de l’ibuprofène. Une douleur? Un Vidal, et hop, plus de bobos.
Bien au contraire: les bobos et le fil à retordre, c’est Vidal qui en donne. Car le joueur polyvalent est doublé d’un mental de guerrier à toute épreuve. Rien n’est jamais perdu pour le Chilien. Même quand ça se passe en dehors du terrain. En juillet 2007, quelques jours avant son arrivée en Allemagne en provenance de Colo Colo, Vidal disputait encore la Coupe du monde des moins de 20, au Canada. Après s’être fait sortir en demies par l’Argentine, Vidal et ses potes s’en sont pris au directeur de jeu, l’Allemand Wolfgang Stark, ainsi qu’à ses assistants. Motif: si le Chili s’est incliné si lourdement (3-0), c’est parce que Stark a tué tout suspense en expulsant deux Chiliens. Conséquence: les joueurs sont allés se frapper à la sortie du bus avec les flics canadiens. Vidal et les siens ont fini en GAV, avant d’être relâchés quelques heures plus tard.
Si, si, la famille
Vidal rejoint donc ensuite Leverkusen. Quoi de plus logique pour un type avec un blaze pareil de signer dans un club crée par une usine qui possède entre autres des activités pharmaceutiques? Sous les ordres de Michael Skibbe, Vidal découvre un championnat à sa mesure, où l’engagement physique, les duels, sont rois. Un peu en galère au début, Vidal accumule les cartons (trente jaunes sur ses trois premières saisons) et les erreurs de jeunesse. Mais cette saison, Vidal a grandi. C’est bien simple: il est le meilleur joueur du Bayer. 31 matchs, 10 buts, 11 passes décisives, le joueur sait tout faire. Un guerrier, on vous dit…
Rien ne semble ébranler Arturo Vidal. Ou presque: sa famille. C’est à la fois une source de force et de faiblesse. De force, quand on voit leurs noms, leurs visages, aussi, parfois (la maman) sur le corps d’Arturo. De faiblesse, aussi, quand il arrive un événement un peu grave, comme quand Alonso Vidal, progéniture d’Arturo qui vit au pays avec sa mère, est allé à l’hôpital à cause du diabète. Arturo, qui a été abandonné par son père quand il était plus jeune, ne veut pas faire vivre ce cauchemar familial à son enfant, et fait tout pour être le plus souvent avec lui. Arturo ne fuit jamais ses responsabilités.
L’aspirine du Bayer ne fait plus effet
Il est d’ailleurs le seul joueur à avoir cru en les paroles de Jupp Heynckes cette saison, qui disait que le titre était encore jouable, quand des cadres comme René Adler et Gonzalo Castro commençaient à lâcher prise et que Michael Ballack se souciait plus d’obtenir un entretien avec Joachim Löw que d’une place de titulaire à Leverkusen. Jupp Heynckes, c’est un peu devenu le père que Vidal n’a pas eu: c’est lui qui lui sert de traducteur quand il a des problèmes avec la police (une sombre histoire de délit de fuite), c’est lui qui l’a amené à ce niveau. Pas étonnant dès lors qu’Arturo veuille suivre son mentor au Bayern. Malgré l’échec de ses candidatures spontanées et son match calamiteux face aux Bavarois (défaite 5-1 à l’Allianz Arena, Vidal est responsable d’au moins deux buts), le Chilien ne lâche pas le steak. Il veut rejoindre le Bayern, il veut rejoindre Heynckes.
Même si Rudi Völler, le directeur sportif, refuse d’entendre quoi que ce soit, Vidal, lui, veut se barrer. L’aspirine made in Bayer n’a plus d’effet sur lui. Ce qu’il veut, c’est gagner des titres. Dans l’absolu, il aimerait se barrer sans haine, et en rajouter un, justement, à son nom de club. Mais il n’y a pas que le Bayern qui le veut, la moitié de l’Europe est à ses pieds. Vidal, pour le moment, s’en tape, il continue à faire augmenter sa valeur marchande, en marquant notamment le but de la victoire face au Mexique (2-1). Quoi qu’il en soit, Vidal fera tout pour partir. Il a la bougeotte. Pas parce que c’est un mercenaire, mais juste parce qu’il veut découvrir d’autres champs de bataille. Après tout, c’est normal pour un type dont le blase complet est Arturo Erasmo Vidal Pardo.
Ali Farhat
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