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Varane-Madrid : la fin de l’idylle
Après onze années de bons et et loyaux services, Raphaël Varane a décidé de quitter le Real Madrid. Sa destination ? Manchester United. Le club anglais a jeté son dévolu sur le défenseur français, arrivé au bout d’une aventure grandiose chez les Merengues.
Au terme de 360 rencontres disputées et 17 buts inscrits, Raphaël Varane quitte le Real Madrid. Une décision mûrie et réfléchie depuis plus d’un an, qui vient clôturer le chapitre principal d’une carrière qui aura vu le natif de Lille devenir l’une des figures des derniers succès de la Maison-Blanche. Entre assurance, coups d’éclat et fragilité.
De Varane à « Don Limpio »
À l’été 2011, Valdebebas voit débarquer en son sein un adolescent de 18 ans. Acheté pour 10 millions d’euros, Raphaël Varane est alors un nom inconnu de l’autre côté des Pyrénées. Logique pour le longiligne défenseur, sortant d’une première saison en professionnel à peine bouclée avec le RC Lens (24 matchs). Car si dans l’Hexagone les louanges quant à son indéniable talent pleuvent, au Real Madrid, Zinédine Zidane, alors directeur sportif, doit s’y prendre à plusieurs fois pour convaincre son poulain, en pleines révisions pour le baccalauréat. Dans un club en reconstruction, Varane va dès lors rapidement gagner sa place.
Le point de bascule arrive au soir du 30 janvier 2013. Dans un Clásico théâtre d’une demi-finale aller de Coupe d’Espagne, le Français offre un récital. Muselant tour à tour Lionel Messi, Cesc Fàbregas, Pedro et Alexis Sánchez, il s’offre même le luxe d’égaliser en fin de partie d’un coup de casque, avant de récidiver au retour. Une double confrontation magique, qui le consacre du surnom évocateur de « Don Limpio » (Monsieur propre en VF). Celui dont on loue la vitesse et la justesse des tacles séduit les socios. Sans faire de bruit, mais sûr de ses forces, il s’installe ainsi tranquillement au milieu de la charnière Sergio Ramos-Pepe, déjà vieille de cinq ans.
Après avoir évolué sous les ordres de José Mourinho (vainqueur de la Liga en 2012), puis de Carlo Ancelotti (vainqueur de la Ligue des champions en 2014), Varane devient définitivement indiscutable avec l’avènement de Zidane en tant qu’entraîneur. Un rouage essentiel, vissé à une machine à gagner qui rafle tout sous l’ère ZZ. Un triplé consécutif en C1 et deux championnats glanés finissent d’écrire sa légende précoce chez les Merengues. L’aventure est idyllique, malgré une année 2016 cauchemardesque. Victime de blessures musculaires à répétition, il manque plus de la moitié de la saison, dont la finale de Ligue des champions contre l’Atlético et l’Euro dans la foulée. Une épine heureusement sans conséquences, en témoigne le départ forcé de Pepe à l’été 2017. Visionnaire, Mourinho affirmait même quatre ans plus tôt que « le problème de Pepe se nomme et restera Varane ». La confiance des coachs est omniprésente, appuyée par une direction se refusant obstinément à perturber cet équilibre en recrutant un défenseur central et où le seul Jesús Vallejo fera office de complément. Jusqu’à l’arrivée d’un successeur désigné, Éder Militão.
Trop propre, trop lisse
Durant son aventure madrilène, Raphaël Varane aura eu les défauts de ses qualités. Son style de jeu épuré, dénotant totalement avec la puissance dont faisaient preuve ses aînés, devient rapidement une marque de fabrique. Les reproches n’ont cependant pas tardé à s’amplifier, pour un garçon jugé trop « lisse » , manquant de caractère. En France, le quart de finale du Mondial 2014 contre l’Allemagne en a été l’un des catalyseurs. Le duel perdu face à Mats Hummels, qui inscrira le seul but de la victoire allemande, cristallisera ainsi les premières rancœurs. À Madrid, ces quelques critiques ont tardé à se manifester. Souvent protégé par l’engagement physique de Ramos, Raphaël Varane représentait effectivement le joueur de couverture idéal, rarement mis en danger. Un match va pourtant balayer toutes ces certitudes. Aligné aux côtés du novice Militão en huitième retour de C1 contre Manchester City, l’international aux 79 capes va sombrer, poussé dans un rôle de patron qu’il n’a alors jamais connu dans la capitale espagnole.
Auteur de deux bourdes aussi énormes qu’incompréhensibles, le défenseur entraîne avec lui la chute d’une équipe peu vernie. « J’assume : cette défaite est pour moi », concèdera-t-il en fin de rencontre, mettant à jour des failles rarement entrevues auparavant. Un statut remis en cause et des difficultés qui s’étendront tout au long de cette ultime campagne 2020-2021. Le point commun : l’absence de Ramos. Blessé durant une grande partie de la saison, le capitaine a laissé la porte ouverte à son fidèle lieutenant, qui n’aura jamais su saisir la chance. Parfois dépassé, le Martiniquais a vu Militão, lui-même critiqué à ses débuts, gagner en maturité et Nacho prendre ses responsabilités. En confiance, le Brésilien est ainsi devenu à son tour un élément probant de la rotation madrilène. Cet ensemble a lentement entamé la fin de parcours de Varane sous la tunique blanche. Les négociations à la traîne et les tensions palpables avec Florentino Pérez ont fait le reste.
Voici désormais Raphaël Varane plongé dans un nouveau défi en Angleterre. Aux côtés d’Harry Maguire, le Français sera donc attendu au tournant, pour remettre un Manchester United désacralisé sur le devant de la scène.
Par Adel Bentaha