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Turquie : Carsi, Erdogan et les accusations de coup d’État

Par Régis Delanoë
Turquie : Carsi, Erdogan et les accusations de coup d’État

Les fameux ultras de Carsi, supporters de Beşiktaş, étaient en première ligne lors des émeutes de la place Taksim en mai 2013. Dénonçant la dérive autoritaire de Recep Tayyip Erdoğan, le Premier ministre devenu président du pays, 35 d'entre eux sont accusés d'avoir voulu préparer rien de moins qu'un coup d'État. Les auditions, qui ont débuté en décembre, se sont poursuivies ces derniers jours. Ils risquent la prison à vie, même si les charges s'amenuisent contre eux, alors que règne en ce moment un climat lourd en Turquie…

L’histoire est la suivante : 35 membres de Carsi, le réputé groupe d’ultras de Beşiktaş, sont accusés d’avoir voulu « renverser par des moyens illégaux le gouvernement légal de la Turquie » . C’était en juin 2013 et le gouvernement en question était alors mené par le Premier ministre Recep Tayyip Erdoğan, devenu l’an dernier président du pays. Que s’est-il passé à l’époque ? Au départ, il ne s’agissait que d’une manifestation pacifique d’une poignée de manifestants écolos, remontés contre le projet de destruction d’un des rares espaces verts du centre d’Istanbul, le parc Gezi, pour le remplacer par la reconstruction de la caserne Taksim, un bâtiment historique datant de l’époque ottomane devant accueillir un centre commercial. Violemment réprimée par les forces de l’ordre, la manifestation prend rapidement de l’ampleur et les revendications vont tout aussi vite sortir du strict cadre de la protection du parc Gezi pour se transformer en un mouvement de lutte contre le pouvoir islamo-conservateur en place.

La dérive autoritaire d’Erdoğan est largement mise en cause par 3,5 millions de manifestants à travers tout le pays. Ce mouvement protestataire fera 8 morts et 8000 blessés, ainsi que des milliers d’arrestations. Au niveau du parc Gezi et de la place Taksim voisine, les ultras de Carsi sont en première ligne lorsqu’il s’agit de défendre les manifestants et d’affronter les forces de l’ordre. Et pour cause, ce groupe de supporters du club de Beşiktaş est ouvertement classé à gauche politiquement, revendiquant à la fois l’héritage laïc de Mustafa Kemal Atatürk, le père de la Turquie moderne, et le combat ouvrier. Ce mouvement de protestation, c’est un peu un rêve qui se concrétise pour ces fans militants. Sont-ils allés trop loin dans la contestation ? C’est en tout cas ce qui est reproché à ces 35 mis en examen.

Les ultras, Michel-Ange de la Renaissance turque ?

La première audition des prévenus a eu lieu le 16 décembre, la seconde il y a une semaine et la troisième est calée le 26 juin. Dès septembre dernier, Carsi contre-attaquait via son site Internet, réfutant en bloc les accusations et accusant en retour les forces de l’ordre d’avoir fait un usage disproportionné de la force, dans un communiqué ironique : « Nous sommes heureux de ne pas être accusés d’avoir projeté des gaz lacrymogènes pendant plusieurs jours et plusieurs nuits sur des enfants et des personnes âgées ; de ne pas avoir tabassé à mort certains manifestants ; de ne pas être mêlés à des affaires de corruption. » L’acte d’accusation est lourd : les 35 prévenus sont suspectés d’appartenir à une bande criminelle, de s’en être pris aux forces de l’ordre, d’avoir manifesté sans accord et de posséder des armes sans licence.

Pour ce qui est du coup d’État, le procureur estime qu’ils ont voulu attaquer le bureau du Premier ministre. Mais les quatre policiers auditionnés la semaine dernière par la treizième haute cour criminelle du tribunal de Caglayan, qui instruit le dossier, sont finalement revenus sur leur témoignage et nient cette fois l’implication des 35 fans de foot… C’est ce que rapporte l’agence de presse indépendante Cihan, qui suit l’affaire, tout comme une représentante d’Amnesty International et des juristes allemands venus en observateurs. Pour Human Rights Watch, il s’agit d’une « parodie ridicule » de procès, comme elle l’estimait dès décembre. Un des accusés, Ayhan Güner, s’est défendu d’être un conspirateur. Pour lui, la révolte du parc Gezi était une forme de « Renaissance » dont les Carsi seraient des « Michel-Ange » .

Prise d’otage, censure et attaque d’un bus : drôle de contexte

Cette histoire s’inscrit dans un contexte tendu. Le 31 mars, deux militants d’un groupuscule d’extrême gauche ont pris en otage un procureur. Ils réclamaient la confession publique des policiers qu’ils considèrent comme responsables de la mort d’un adolescent de 15 ans. Ce dernier, victime d’un tir d’une grenade lacrymogène, a succombé à ses blessures il y a un an après 269 jours de coma. Un hommage à sa mémoire avait été rendu à l’époque par plusieurs groupes ultras, en Turquie, mais aussi à l’étranger (AEK, Aris, Livourne…). Le jeune homme avait été traité de « terroriste » par Erdoğan. Les deux preneurs d’otage et le magistrat sont morts, après un assaut des forces de police. Une photo montrant l’otage mis en joue a fuité sur les réseaux sociaux, que les autorités, pas vraiment au top au niveau des libertés, ont décidé de suspendre provisoirement. Le football non plus n’est pas épargné par ce contexte de violence, avec cette attaque armée contre le bus des joueurs de Fenerbahçe le week-end dernier qui a obligé les autorités à suspendre le championnat pendant une semaine. Deux suspects ont été arrêtés, sans que l’on ne sache pour l’instant s’ils sont bien les auteurs de l’attaque et quels sont leurs motifs exacts. Il se pourrait qu’il ne s’agisse que d’une bête histoire de rivalité entre Fenerbahçe et le club de Trabzonspor. Mais tout ceci cumulé plonge la Turquie dans une sacrée ambiance ces temps-ci…

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Par Régis Delanoë

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