Épreuve 1 : ça dénonce
Invité comme juge pour cette épreuve, Rasmus Munk (Alchemist, Copenhague), le Damien Saez des jeunes virtuoses danois, qui en cinquante plats brillants défend cinquante causes, a une idée derrière la tête. En deux heures, les candidats sont invités à réaliser un plat à message qui doit être surprenant et choquant, mais avec des limites : la viande humaine et le meurtre sont interdits (Mickaël aurait été capable de nous faire une glace au meurtre).
Mickaël dénonce l’élevage intensif
Le Nordiste nous propose du cochon cru en ceviche, huile de sésame et piment d'Espelette et glace au porc, posés sur un crâne de porc. Vous avez bien lu : glace au porc, on pense qu’on ne pourra plus monter vraiment plus haut dans l’escalade des glaces improbables de cette saison. Et au vu de la rapidité avec laquelle les concepts de l’émission (comme le restaurant éphémère « Philosaucisse » ) prennent vie dans la réalité, on peut s’attendre cet été à voir les gamins faire tomber leur cornet cochon-poulet sur le sable.
Nous entre chaque pub.
Accompagnant le porc, une seringue pleine de sauce à disposition du goûteur permettait de dénoncer l’usage des antibiotiques sur les animaux. Surprenant, puisque Rasmus Munk, en 2019, proposait le même accessoire, la même viande, pour dénoncer la même cause (à en lire le compte-rendu d’Elvire Von Baldeberen). Cet emprunt, volontaire ou involontaire, n’a pas vexé le jeune chef puisqu'il a accordé à Mickaël la première place, pas rancunier non plus de l’hépatite E qu’il venait sûrement d'attraper en dégustant du porc cru.
Mickaël et l'élevage intensif
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Premier de cette épreuve, Mickaël est qualifié pour l’épisode 14.
Arnaud dénonce le don du sang
Enfin non, l’inverse : la pénurie de sang, et surtout la difficulté qu’endurent les homosexuels à travers l’Europe pour donner le leur - à noter qu’en France, ce n’est seulement que depuis le 16 mars 2022 que l’abstinence obligatoire de quatre mois a été supprimée. Pour marquer le coup, Arnaud réalise un entremet mousse au chocolat, insert panna cotta rose et café, coulis de framboises et vinaigre balsamique. Framboise/sang, ça marche, surtout servi dans une poche à transfusion posée sur son pied médical. Ça impressionne Munk, connu pour tourner de l'œil à la vue du moindre fruit rouge.Arnaud et la pénurie de sang
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Deuxième de l'épreuve, Arnaud se qualifie pour l’épisode 14.

J’avais pourtant demandé à point.
Lilian dénonce le tabac
Lilian nous reproduit ces petites photos dégueu que l’on voit habituellement sur les paquets de clopes. Il aurait pu choisir celle des dents toutes pourries, avec une fausse bouche pleine de nougats caramels en guise de ratiches, mais il opte plutôt pour les poumons mazoutés. Il poche deux huîtres au pastis, les glace au charbon végétal et les pose sous une cloche de fumée accompagnées d’une jolie fausse cendre. Créativement, le plat fait moins exposé de fin d’année que Mickaël, mais ça ne suffit pas pour convaincre Munk.Lilian et le tabac
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File à la deuxième épreuve.
Sébastien dénonce le harcèlement scolaire
La cause est noble, et Sébastien est super sincère, mais il y a un on-ne-sait-quoi de gênant à la vue de ce cartable en mousse de chocolat. À la dégustation, Munk reçoit un SMS happening « no more silence » qui le crispera complètement jusqu’à son départ du territoire français. À noter, l’idée sympa du plat en ardoise d’écolier, faisant dresser les poils sur la nuque de toute la France à chaque coup de fourchette.Sébastien et le harcèlement
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File aussi à la deuxième épreuve.
Pascal dénonce la chasse
Non pardon, rien à voir... Pascal dénonce une pratique forestière entraînant la mort d’animaux, mais sans la convivialité et le respect : les feux de forêt. On a souvent soutenu Pascal, mais là, on doute. Le plat est un ensemble de tapas destinées à nous dissuader de foutre le feu dans la garrigue, et le message est évident : penne farcies de purée de carottes, topinambour farci, sauce d’os à moelle, morille farcie aux champignons flambés au cognac, le tout dressé sur un bois de plage emprunté au Manège à bijoux. À la vue du plat, plusieurs pyromanes, convaincus par le message, ont réalisé leur monstruosité et se sont immédiatement rendus à la police. Fun fact : le topinambour brûlé a également été pratiqué par Munk dans son restaurant.Pascal et les feux de forêt
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File également à la deuxième épreuve.
Louise dénonce la famine
Esthétiquement, c’est le plat le plus joli en comparaison de tous les exposés de ses petits camarades. Et là où tous les rageux l’attendaient sur un autre thème, Louise s’embarque dans une histoire un peu alambiquée : sous la terre qui est mangée régulièrement par les peuples pauvres partout dans le monde (c’est bien connu), se cachent des émeraudes exploitées par les plus riches qui ne leur laissent rien. Ironie du sort ou génie absolu, la crème brulée que renferment ces émeraudes est à la vanille de Madagascar, véritable émeraude des épices soumise à une surévaluation galopante, dans un pays où un demi-million d’enfants souffrent de malnutrition aiguë.Louise et la famine
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Direction la deuxième épreuve.

Jolie fausse terre.
Deuxième épreuve : Crenn degun
Après Dominique Ansel il y a quelques semaines, la brillante Dominique Crenn vient nous donner une nouvelle démonstration d’accent franco-ricain-français, et invite les candidats à nous éblouir de coquillages. C’est ce qu’ils ont fait : rarement avons-nous eu autant envie de manger tous les plats depuis le début de cette saison. Des propositions techniques et raffinées : on en redemande.
Lilian
Lilian propose une Saint-Jacques servie dans sa coquille, avec brunoise de pommes de terres, échalotes et haddock, glace marinière au lait ribot, haddock, estragon et jus de coquillages. Il crée un trompe-l'œil avec une jolie galette bretonne au sarrasin, mais un énorme malentendu survient à la dégustation : Dominique Crenn tape dessus avec la cuillère, et se plaint que cette crêpe ne soit pas assez cassante. Lilian, poli, s’excuse plutôt que d’expliquer qu’une galette bretonne ne casse pas et passe à côté de la victoire assez bêtement.Lilian
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En dernière chance...
Louise
La Franco-Portugaise réalise un joli carpaccio de couteaux fumés aux algues, palourdes à la marinière, sur un risotto. À côté, une bisque d’étrilles, ail, échalotes tellement corsée qu’Hélène Darroze perd deux molaires en dégustation. Adoucie, montée au beurre, ajustée de citron, la bisque ramène tous les couteaux dans son lit, Crenn adore en dégustation et adoube la cheffe.Louise
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Première place et qualification pour l'épisode 14 !
Pascal
Très beau moment à la dégustation de ce plat en deux assiettes, lorsque Pascal se fait passer pour un Breton et que la Bretonne à l’accent américain parle au Breton à l’accent varois sans que personne n’appelle la gendarmerie pour escroquerie. Une coquille Saint-Jacques à la braise, et une jolie raviole aux coquillages cuite au bouillon, avec une petite espuma de tourteau et d’étrilles : on lèche l’écran.Pascal
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Deuxième place et qualification pour l'épisode 14 !
Sébastien
Et si Sébastien était le plus rock’n’roll de la bande, finalement ? Son carpaccio de Saint-Jacques et navets, jus détox pommes céleri, condiment céleri chou-fleur et sa sauce coquillages, sous ses airs de plat de thalasso tropézienne, était tellement radical qu’il a sorti les Saint-Jacques du cadre. C’est éliminatoire selon Dominique Crenn.Sébastien
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En dernière chance...
Dernière chance de haute volée autour de la poire, que Sébastien et Lilian tabassent avec beaucoup d’idées : en pochée, faisselle et pickles pour le premier, vaticanesque au vin rouge cardinal pour le second.
Nous lui avions déjà dit au revoir ici, mais, cette fois, il y a carrément plus d’actu pour le jeune chef puisqu'il ouvre deux restaurants, donc deux bonnes occasions pour aller goûter sa belle cuisine : le Lil-Home à Bordeaux et Dame Augustine à Paris. Les supermarchés de Beauvais perdent en hype, mais nous gagnons au change. À la semaine prochaine !
Par Henry Michel
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