- Top
- Ces trois font la paire
Top 50 : Trios magiques (de 10 à 6)
Si le foot se joue à onze, beaucoup d'équipes doivent leur âge d'or à un trio qui les a portées à bout de bras. En partageant le leadership, en combinant leur talent ou en faisant parler leur complicité absolue, chacun de ces triangles a bâti sa légende à coups de buts d'anthologie, d'épopées marquantes ou de trophées soulevés. D'ailleurs, ce samedi en finale de Ligue des champions, les triplettes Mané-Salah-Firmino et Bale-Benzema-Cristiano pourraient bien se croiser sur le terrain et dans l'histoire. Voici les trouples du top 10.
#10 - Messi – Suárez – Neymar
135 matchs. 344 buts. 120 en une seule et même saison. Une Ligue des champions. Deux Liga. Trois coupes du Roi. Une vitesse folle. Des défenses explosées. Des arrière-gardes déprimées. Des gardiens humiliés. Des spectacteurs comblés. Des dribbles à n’en plus compter. Des appels de balle illimités. Des une-deux synonymes de danger. Des accolades enflammées. Des célébrations démultipliées. Des filets sans cesse en train de vibrer. Peu de jalousie mal placée. Et surtout, une amitié. « Messi est capable de remporter un match à lui tout seul. Alors, si vous ajoutez en plus Suárez et Neymar, c’est inestimable. La FIFA devrait l’interdire !, estimait Jorge Sampaoli pour El País. L’amitié entre Leo, Neymar et Suárez est la pire chose qui soit arrivée au football. »
Pour la faire perdurer, le Brésilien, dans l’ombre par la Pulga et désireux de devenir la star d’une équipe, a préféré opter pour une nouvelle aventure. C’est aussi grâce à ça que la MSN est devenue éternelle : en ayant l’intelligence de se détruire avec le sourire au lieu de mourir en se faisant souffrir, la triplette s’est construit un caractère invulnérable. Qui nourrit des questions pour bien des nostalgiques. Jusqu’où serait-elle allée si elle avait continué ensemble ? Qui aurait pu lui résister sur le long terme ? Comment aurait-elle vieilli ? Pourquoi ne pas avoir essayé ? Quelqu’un est-il à blâmer ? Serait-ce possible de la réinventer, un jour, en Catalogne ? Existe-t-il quelque chose de plus complémentaire ? A-t-on observé le plus beau trio de tous les temps ? Autant d’interrogations qui rendent l’association footballistique aussi révolutionnaire et célèbre que la messagerie internet dont elle porte le nom. Au point qu’actuellement, les enfants connaissent sûrement davantage la première que la seconde. C’est également ça, marquer l’histoire. FC
#9 - Romário – Laudrup – Stoichkov
« Signer un quatrième étranger est tout simplement stupide. Mais si les dirigeants pensent qu’il est absolument nécessaire et qu’ils me demandent mon avis, je leur dirais de signer Lubo Penev. Combien coûte Romário ? 600 millions de pesetas ? Je prendrais 200 millions de ma propre poche pour recruter Penev. » Hristo Stoichkov et sa grande gueule, une certaine idée de l’accueil chaleureux quand Romário débarque au FC Barcelone à l’été 1993. Pourtant, l’imprévisible Bulgare et l’explosif Brésilien vont former un cocktail relevé délicieux à la pointe de la Dream Team de Johan Cruyff : plus de 50 buts à eux deux lors de la saison 1993-1994 ! Les deux hommes se tirent la bourre pour savoir qui plantera le plus sur le terrain, mais au sein du vestiaire, Stoichkov, le colérique, devient le seul pote de Romário, le clubber. Et, qui pour servir sur un plateau les goleadors (souvent à l’aveugle, au passage) ? Le prince danois Michael Laudrup. Reste qu’avec l’indéboulonnable Ronald Koeman en défense, comme l’avait anticipé Stoichkov, un dilemme se pose : le règlement de l’époque limite le nombre d’étrangers à trois sur le terrain. Résultat : Cruyff installe un turnover dans sa triplette magique, et c’est Laudrup qui se retrouve sacrifié lors de la finale de la Ligue des champions face à l’AC Milan.
Ce soir-là, à Athènes, le Barça de Cruyff se fait corriger par l’équipe de Capello (4-0). Les Blaugrana s’en remettent à la Liga (merci Dukić), après avoir torpillé le Real Madrid 5-0 lors du Clásico au Camp Nou, où Laudrup remplaça Stoitchkov peu après la pause. D’ailleurs, le Danois mettra fin au trio en signant l’été suivant chez le rival madrilène. Pendant ce temps-là, Romário et Stoichkov – futur Ballon d’or 1994 – illuminent l’été américain. Le Brésilien soulève la Coupe du monde, mais plus rien ne sera comme avant quand il revient en Catalogne. « Son corps était là, mais son esprit était toujours à Rio » , regrette Stoichkov pour Four-Four-Two. Certains plaisantaient même en affirmant que c’était un sosie qui était revenu à sa place. Ses performances étaient si mauvaises… » Un dernier baroud d’honneur devant le Man United de Sir Alex Ferguson et la Dream Team explose en vol. Ça valait bien 600 millions de pesetas. FL
#8 - Platini – Tigana – Giresse
Le classement du Ballon d’or 1984 ne saurait mentir : Michel Platini premier, loin devant Jean Tigana, second. Un troisième Français, Alain Giresse, pointe à la neuvième place. Quand on parle du carré magique qui symbolise la grande équipe de France des années 1980, on parle en premier lieu de trois joueurs qui étaient présents au Mondial espagnol de 1982, qui ont réalisé leur chef-d’œuvre deux ans plus tard, et célébré leur chant du cygne en 1986. Pendant ces quatre années, Bernard Genghini et Luis Fernandez ont été parfaits en seconds rôles, et bien chanceux aussi, d’arriver au bon endroit au bon moment. Sans minimiser les mérites de bons soldats, la magie a opéré dans ce milieu révolutionnaire des années 1980 grâce à trois « techniciens » .
Un trio de métronomes qui se sont forgé un esprit de vainqueur le 8 juillet 1982, comme l’expliquait Tigana à Corse-Matin. « Si elle nous a fait énormément de peine, cette défaite nous a aussi beaucoup fait de bien. C’est ce soir-là qu’on a compris qu’on avait le potentiel pour viser haut. C’est grâce à cette défaite qu’on a été champions d’Europe deux années plus tard. Quand je déborde au Vélodrome contre le Portugal, c’est pour éviter de revivre les tirs au but de Séville. » La révérence de Platoche et Giresse après la Coupe du monde au Mexique officialise la fin du carré magique, et par la même occasion de la génération dorée autour du triple Ballon d’or. La fin surtout, de la plus belle utopie du football français, avec un titre majeur, le Championnat d’Europe 1984 à la clé. NJ
#7 - Sócrates – Zico – Falcao
« Aujourd’hui, le football est mort. » Ce sont les mots de Zico dans les entrailles de Sarria, le 5 juillet 1982, quelques minutes après la défaite du Brésil face à l’Italie aux portes du dernier carré de la Coupe du monde. Alors qu’il suffisait d’un match nul aux hommes de Telê Santana pour décrocher leur place en demi-finales, la Seleção s’est inclinée 3-2, incapable de jouer contre sa nature ne serait-ce que quelques minutes en serrant un peu le jeu. Marquer, encore et toujours, et avec la manière : c’était l’obsession de ce Brésil 1982, probablement la plus belle équipe de l’histoire du pays. « Si je prends neuf buts, mais que j’en marque dix, c’est moi qui gagne » , aimait répéter le sélectionneur auriverde. Il faut dire qu’il avait les joueurs pour pouvoir se permettre une telle assurance.
Au sommet de son art lors de cet été 1982, le Brésil colle quinze pions en cinq matchs, porté par trois hommes. Trois meneurs de jeu. Trois techniciens. Trois esthètes surtout. Il y a d’abord Falcão, l’une des rares stars à évoluer en Europe, à la Roma, qui a la lucidité de laisser filer le ballon entre ses jambes à la 88e minute pour laisser Éder mettre le but de la victoire contre l’URSS. Puis Sócrates, capitaine surdoué au charisme inégalable qui a pris soin d’arrêter de fumer avant le Mondial pour inscrire un but d’anthologie contre l’URSS. Enfin, Zico, le « Pelé blanc » , l’un des plus grands, quatre buts, dont un coup franc somptueux face à l’Écosse et une volée acrobatique magnifique contre la Nouvelle-Zélande. On dit souvent que l’on ne retient que les gagnants dans le football et le sport en général. Eh bien c’est faux. Ce trio, et par extension l’équipe du Brésil 1982, n’a pas gagné la Coupe du monde. Mais il est resté dans les mémoires comme le plus beau des perdants, au même titre que la Hongrie 1954 et les Pays-Bas 1974. Et si le football n’est pas vraiment mort lors de ce match contre l’Italie comme le suggère Zico, le « joga bonito » originel, lui, est bel et bien mort ce jour-là. KC
#6 - Keizer – Cruyff – Rep
Autant que la démocratie ne puisse éviter le culte de la personnalité, le football total de Rinus Michels n’a pu empêcher que certaines individualités se détachent du reste du groupe. Question de talent, d’aura et d’un star-system naissant. Et sous les couleurs du Grand Ajax de la fin des années 1960, certains concentrent la plupart des attentions. C’est ainsi que Piet Keizer et Johan Cruyff, Ajacides pur jus, étaient les deux têtes d’affiche du projet amstellodamois. Si bien qu’en ville, l’adage veut que « Cruyff est le meilleur, mais Keizer est le meilleur des deux » . Intenable sur son aile, virtuose balle au pied, costaud physiquement et redoutable sur coup franc direct, Piet Keizer avait comme principal objectif de combiner avec un Cruyff encore plus doué que lui et complètement libre sur le front de l’attaque.
Malgré des caractères bien différents, le doux Piet et le tempétueux Johan étalaient la même complicité en dehors du terrain, partageant parties de pêche, virées nocturnes et clopes. Et même si le jeu comme les passions entourant le club ont pu tresser une multitude de relations particulières entre les membres de l’équipe (celle entre Cruyff et Neeskens a alimenté pas mal de fantasmes), c’est certainement cette entente qui était la plus sincère au sein de cet Ajax doré. Pourtant, ce binôme s’est transformé en trinôme après le premier sacre européen de 1971, avec l’intégration de Johnny Rep sur l’aile droite par le nouvel entraîneur Stefan Kovács, au détriment de Sjaak Swart. Une troisième tête blonde qui permettra à cette équipe de devenir une machine à tube, remportant huit trophées sur dix possibles et appliquant la même recette avec les Oranje.
Pourtant, en 1973, une première faille mit à mal cette alliance. La mégalomanie irritante de Johan Ier a convaincu le vestiaire de le destituer de son brassard de capitaine lors d’un vote, au profit de Piet Keizer. Un désaveu qui le convaincra de filer au Barça. Le coup fatal sera porté lors du Mondial 1974, où l’aîné Keizer fut renié par son mentor, Rinus Michels alors sélectionneur, étant rétrogradé derrière Rensenbrick et Van de Kerkhof. Si bien que Cruyff et Rep perdront la finale face à la RFA sans avoir pu s’appuyer sur leur compère. Une terrible désillusion qui poussera Piet à raccrocher les crampons et laisser ce trio dans l’impossibilité d’écrire une nouvelle page de son histoire. L’osmose était idéale. Elle est passée à deux doigts d’être totale. MR
Par la rédaction de sofoot.com