Paul Cometto
36 ans, supporter depuis 1990, ancien capo des Indians Tolosa (2003-2011)« Je crois qu’on ne choisit pas d’être supporter. Je suis toulousain, c’est ma ville, et je n’ai jamais été confronté à un choix. C’est la différence entre un fan, conception consumériste plus fréquente aux US, et un supporter, conception plus européenne. Toulouse est une ville qui, d’abord, n’est absolument pas une ville de rugby, mais où il y a l’un des clubs les plus prestigieux et légendaires d’Europe. Donc c’est particulièrement difficile d’être supporter du Téfécé avec ce miroir déformant - et très alléchant - du Stade toulousain. Tu interroges les gens à Toulouse, ils sont tous supporters du Stade. Sauf que les gradins ne sont pas plein à tous les matchs, et Ernest-Wallon n’est pas si grand que ça... Il y a le besoin de surfer sur le club qui marche.
« Être supporter du TFC, c’est s’associer à un destin collectif, celui d’une équipe qui ne va probablement jamais t’offrir de satisfaction. Ça veut aussi dire que supporter Toulouse seul dans son coin, c’est difficilement envisageable. »
Être supporter du TFC, en revanche, c’est s’associer à un destin collectif, celui d’une équipe qui ne va probablement jamais t’offrir de satisfaction. C’est finalement un truc élitiste, c’est-à-dire qu’il faut beaucoup aimer le foot, et l’aimer pour autre chose que pour les satisfactions faciles. Ça veut aussi dire que supporter Toulouse seul dans son coin, c’est difficilement envisageable. Tu dois partager ces moments avec une communauté, qui est assez forte d’ailleurs. J’ai en tête le TFC-Marseille, en 2004, avec le but d’Eduardo en fin de match. On joue le maintien, on est à un partout, on sent que ça patine. J’arrive à refaire partir un gros chant dans le virage, et je vois que tout le stade prend. Ça monte, la séquence dure plusieurs minutes, et Eduardo décoche sa frappe à ce moment-là. Et là, tu sens que tu as apporté quelque chose. Ce n’est pas ça qui a fait qu’il a parfaitement frappé la balle, évidemment, mais ce feeling d’avoir réveillé quelque chose et d’avoir été utile à ton club, en tant que capo des ultras, c’est grandiose.
Ce club te fait vivre des trucs fous, aussi bien positivement que négativement. Le Téfécé, c’est la résilience. On a quand même fusionné avec le Red Star, on a failli disparaître à plusieurs reprises, en ce moment on oscille entre souffrance et ennui, et, en même temps, on est le seul club français de l'histoire à avoir tapé Maradona, peut-être la plus grande légende du foot, l’année où Naples était à son apogée. Et pour le coup, ça, on est à jamais les seuls. C’est ce qui donne au club son ADN romantique, on est dans l’inattendu permanent. On a beau être au plus bas, malgré tout, on se dira toujours qu’il peut se passer quelque chose de grand. On n’est pas une machine à trophées, on ne le sera peut-être jamais. Mais au fond, est-ce vraiment grave ? »