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Sinama-Pongolle : « À choisir, je préférerais être entraîné par Klopp que par Simeone »

Propos recueillis par Antoine Donnarieix
8 minutes
Sinama-Pongolle : «<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>À choisir, je préférerais être entraîné par Klopp que par Simeone<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>»

Passé par Liverpool et l’Atlético de Madrid, Florent Sinama-Pongolle, désormais consultant chez Canal +, effectue un retour dans le passé avant cette alléchante affiche des huitièmes de finale de la Ligue des champions.

Tu as passé deux saisons et demie à Liverpool (de juin 2003 à janvier 2006) et une saison et demie à l’Atlético de Madrid (de juin 2008 à janvier 2010). Où penses-tu avoir le plus appris ? À Liverpool. Je n’étais qu’au début de ma carrière, et je me suis retrouvé avec des mecs au top de leur niveau : Michael Owen venait d’être élu Ballon d’or, donc j’ai appris aux côtés d’un modèle, et j’avais aussi Steven Gerrard comme capitaine. C’était quelqu’un d’ultra exemplaire et très professionnel. Le fait d’être bien entouré m’a aussi permis de faire des bons choix ensuite dans ma carrière et dans ma vie, j’en suis reconnaissant.

Quelles sont les valeurs de Liverpool qui t’avaient marqué à l’époque et que l’on retrouve encore aujourd’hui ? Déjà, Liverpool est un club façonné par l’histoire.

Récemment, j’ai interviewé Sadio Mané. J’ai fait la demande avec mon mail personnel et ça a facilité le travail. Le club m’a ouvert les portes comme si je ne l’avais jamais quitté, c’est beau et ça ne se passe pas comme ça partout.

En Angleterre, les gens se souviennent de tous les matchs, toutes les saisons. De génération en génération, cette histoire se transmet. Aujourd’hui, j’ai cette chance de travailler autour de la Premier League, et nous cherchons à toujours nous souvenir des belles aventures. En Europe, j’ai en tête le but de Gerrard contre l’Olympiakos (en décembre 2004, N.D.L.R). C’est un but qui change tout, car Liverpool se qualifie, et cinq mois plus tard, le club remporte la C1. Quand tu mets les pieds une fois à Liverpool, tu es là-bas pour toujours. Récemment, j’ai interviewé Sadio Mané par exemple. J’ai fait la demande avec mon mail personnel, et ça a facilité le travail. J’ai recroisé les intendants, les cuisinières que je connaissais déjà à l’époque. Le club m’a ouvert les portes comme si je ne l’avais jamais quitté, c’est beau et ça ne se passe pas comme ça partout.

Et l’Atlético, ça ressemble à quoi de l’intérieur ? L’Atlético, c’est un club avec une exigence maximale. Quand tu compares à Liverpool, tu te dis que ce n’est pas un club qui a beaucoup gagné dans son histoire. Pourtant, il y a un côté très impatient dans la performance. Là-bas, tu dois être très bon tout de suite, sinon ça ne peut pas marcher. Il suffit de compter les joueurs qui ont flambé à l’Atlético ces dernières années, il n’y en a pas beaucoup, et le pourcentage d’échec dans les recrues reste assez élevé. Quand j’y étais, au bout de sept ou huit minutes de jeu, le public pouvait commencer à nous siffler… Le joueur étranger doit s’habituer à cela, c’est une autre culture. Paix à son âme aujourd’hui, mais je me souviens que Cléber Santana (tragiquement décédé dans la catastrophe de Chapecoense, N.D.L.R.) avait énormément souffert à l’Atlético de Madrid. Chaque match, c’était une remise en question. Tu avais beau avoir fait quelque chose de bien la veille, le jour suivant tout s’efface. Et puis la presse espagnole, oula… La presse française critique beaucoup, mais au moins les journalistes l’assument à visage découvert. Là-bas, les mecs sont dans leurs bureaux et ils te bombardent dans les journaux. Des mecs de As ou Marca m’ont critiqué pendant tout mon passage à l’Atlético et je n’ai jamais vu leurs visages. Parfois, ils peuvent aussi signer sous un faux nom, ou même ne pas signer. C’est délirant.

Si tu devais opter pour Liverpool ou l’Atlético aujourd’hui, avec quel entraîneur aimerais-tu le plus travailler entre Jürgen Klopp et Diego Simeone ? À choisir, je préférerais être entraîné par Klopp que par Simeone. Ce n’est pas lié au fait de la réussite actuelle de Klopp, mais pour cette confiance et cette responsabilité qu’il donne à ses joueurs.

Ce n’est pas un hasard si les choses semblent aller moins bien pour l’Atlético cette saison. L’exigence est tellement grande qu’au bout d’un moment, tu ne peux plus suivre, car tu es usé psychologiquement.

Cela me plaît beaucoup, car il parvient à créer une complicité avec ses joueurs. Globalement, j’ai toujours été au top quand j’étais en relation avec des entraîneurs issus de la formation, car ils me faisaient comprendre que la nécessité d’une discipline était à la fois dans mon intérêt et celui de l’équipe. Simeone, je pense que ça pourrait le faire sur un an, mais ensuite, ce ne serait plus possible. D’une certaine manière, ce n’est pas un hasard si les choses semblent aller moins bien pour l’Atlético cette saison. L’exigence est tellement grande qu’au bout d’un moment, tu ne peux plus suivre, car tu es usé psychologiquement. Dans le même style, j’ai connu Marcelino à Huelva. Partout où il est passé, le mec flambe. Mais dès qu’il reste quelque part longtemps, ça se complique. Tu as côtoyé Emile Heskey, Michael Owen, El-Hadji Diouf, Milan Baroš… Mis à part ton grand ami Anthony Le Tallec, avec quel joueur de l’équipe avais-tu le plus d’affinités dans le vestiaire des Reds ? Quand nous sommes arrivés, il y a déjà douze francophones dans le vestiaire ! Il y avait donc tout un groupe avec Djimi Traoré, Bruno Cheyrou, John Arne Riise, Vladimir Šmicer, Carl Medjani, Patrice Luzi… Tous ces mecs-là nous ont aidés à nous adapter à la vie du vestiaire.

Le plus dur, c’était de prendre les tacles de Jamie Carragher à l’entraînement !

Le plus dur, c’était de prendre les tacles de Jamie Carragher à l’entraînement (Rires.) ! Nous étions tous déjà en couple, donc ça facilitait la stabilité. Quand mes parents venaient, je faisais découvrir le rougail saucisses à mes coéquipiers. Il y avait beaucoup de partage et une règle fondamentale : entre nous, parler l’anglais était obligatoire. Dès son arrivée, Rafa Benítez avait instauré la même règle pour les Espagnols. Cela donne une idée de la mentalité du club.

À Madrid, tu réalises un début canon avec quatre buts lors des quatre premières journées de championnat. Et puis à partir de la septième journée, Javier Aguirre te relègue sur le banc de touche à la suite du retour de Diego Forlán dans le onze. Comment est-ce que tu as pris ce choix de l’entraîneur ? À Huelva, je suis devenu le meilleur buteur du club de tous les temps en première division espagnole (22 buts en 68 matchs, N.D.L.R.). Ce transfert était dans la logique des choses. J’avais le choix entre Paris et l’Atlético de Madrid, et je pars à l’Atlético. Ensuite, tout bascule en trois matchs. L’entraîneur vient me voir et me dit : « Forlán revient de blessure, il va jouer dimanche contre Séville et tu vas jouer mercredi. » Tu peux faire cette stratégie avec des gardiens de but ou des défenseurs, mais pas des attaquants. Le dimanche, Diego marque un triplé et il ne sort plus du onze de départ. Il termine même Soulier d’or cette année-là… Il n’y avait rien à dire. À partir de là, je joue des bouts de match en tant que milieu droit. Comment faire pour que mon ratio de buts soit aussi important qu’en jouant avant-centre ? C’était impossible.

À Madrid, tu étais barré par Forlán et Agüero. Ne penses-tu pas avoir pris connaissance à ce moment-là de tes limites chez les Colchoneros ? Agüero, ça reste un joueur à part.

Quand j’ai connu Forlán à l’Atlético, c’était quelqu’un de très égoïste et autocentré. Finalement, sur le terrain, nous étions assez complémentaires, lui, Agüero et moi.

Diego Forlán, c’est différent. Quand j’arrive, je sais que c’est un attaquant avec du vécu, mais il faut savoir qu’il avait pas mal galéré avant d’être titulaire dans un club européen. À Manchester, il ne jouait jamais. Quand je l’ai connu à l’Atlético, c’était quelqu’un de très égoïste et autocentré. Finalement, nous étions assez complémentaires tous les trois sur le terrain. Quand les dirigeants m’ont recruté, c’est parce qu’ils savaient que sur le plan collectif, cela fonctionnerait sur le terrain. Ils ne se sont pas trompés.

Aujourd’hui, tu commentes les exploits d’Agüero en Premier League. Le Sergio que tu as connu est-il différent de l’actuel d’après toi ? J’ai l’impression qu’il est resté le même : un déconneur. Sergio est un bosseur, mais il aime ne pas trop se prendre au sérieux, car il souhaite rester un grand enfant. Il abordait les ateliers de manière différente par rapport à Forlán qui était extrêmement rigoureux. Mais déjà à l’époque, c’était évident que Sergio allait atteindre un niveau stratosphérique. Il avait cette facilité à s’adapter à toutes les situations. Quand l’entraîneur met en place un plan de jeu, tu peux perdre un peu de niveau car tes capacités ne sont pas bien utilisées. Agüero arrivait à se mettre au service du collectif en gardant son football inchangé, et tu voyais pendant les matchs qu’il avait toujours son style propre. Je crois que c’est la grande force du Kun : un esprit enfantin, mais une maturité impressionnante dans le jeu.

Comment vivais-tu dans un vestiaire très sud-américain ? Ah, je passais beaucoup de temps avec eux, ça rigolait bien ! Par exemple, je me souviens qu’on me chambrait pas mal sur ma capacité à dormir un peu partout. Sur le trajet de bus de l’hôtel au stade par exemple, je trouvais toujours le moyen de faire une micro-sieste et ça les faisait marrer, ils me chambraient là-dessus. Aussi, j’ai essayé le maté, mais je n’ai jamais aimé. Pour mieux faire passer le goût, je rajoutais du sucre.
Ton pronostic sur cet Atlético-Liverpool ? Le match va se terminer sur un 1-1, je vois encore du suspense pour le retour à Anfield. Sur la double confrontation, je vois Liverpool passer avec un 2-0 à domicile.

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