Une crise à sept victoires en neuf rencontres
A contrario des autres pépins physiques de l'Argentin, cette entorse du genou ne semble pas avoir fait tomber le ciel sur la tête des Barcelonais. Plus dans la raison que le chagrin, la bande à Luis Enrique a fait de cette absence prolongée un test. Bien qu'enquiquinante, la blessure de Lionel Messi intervient en tout début d'exercice, une période propice aux essais et aux remises en question. Sans le glouton argentin, le jeu azulgrana doit se réinventer tout en respectant ses fondamentaux, varier tout en conservant son essence, et, surtout, gagner, encore et toujours. Car ce besoin de succès, Messi ne l'a pas emporté à l'infirmerie avec lui. L'exigence du Camp Nou et de sa nébuleuse ne varie pas d'un iota, même sans « le meilleur joueur du monde » , comme l'évoque à l'unisson l'effectif barcelonais. L'échec du Sánchez-Pizjuán mis à part, la mission arithmétique du FCB est plus que remplie : désormais seul leader de la Liga, il a même réussi à creuser l'écart sur le Real Madrid. En neuf matchs officiels, sept se sont terminés par des victoires pour un nul - sur la pelouse du modeste Villanovense - et un revers.
Plus qu'avec ces comptes d'apothicaires, Luis Enrique peut même s'estimer convaincu par la mue de son équipe. Avec des blessés en pagaille et une interdiction d'aligner ses recrues Arda et Aleix Vidal, l'Asturien a d'abord su redonner une solidité défensive à son groupe. Après un début de saison catastrophique - durant lequel le Barça a encaissé plus de la moitié des pions qu'elle a concédés dans l'intégralité de la dernière Liga -, l'animation défensive s'est ressaisie. Plus compacte et, sans doute, plus solidaire, elle vient même de signer sa quatrième rencontre consécutive sans voir ses filets trembler. Une première pour cet exercice qui rend certains duels plus faciles, comme au Coliseum de Getafe ou lors de la réception de Villarreal. Là encore, l'apport de Suárez et Neymar reste un élément clé. Le sens du sacrifice du Pistolero n'étant plus à démontrer, c'est bien celui du Brésilien qui détonne. « Neymar me rappelle Ronaldinho. Durant les échauffements, nous restions à le regarder toucher le ballon. Avec Ney, c'est pareil, soutient Luis Enrique, ancien comparse de vestiaire de Ronie. Ce qui change avec Neymar, c'est qu'en plus, il défend. »
L'émancipation par l'absence du Messi
Cette attitude défensive offre par là même à l'ailier gauche une certaine liberté offensive. Dès que le cuir atterrit entre ses pieds, il laisse libre cours à son esprit créatif et ses pieds de danseuse étoile. Mieux, avec l'absence de son mentor argentin, il ne peut le rechercher sur le terrain. Une attraction, d'un disciple vers son maître, qui agaçait bon nombre de suiveurs azulgranas. Car, toujours à la recherche de la combinaison avec le quadruple Ballon d'or, Neymar en oubliait ses autres coéquipiers ou ne tentait plus les grigris dont il a le secret. Le remplaçant de la Pulga, bien souvent les jeunes Munir ou Sandro ayant un pouvoir d'attraction minime, rend également le milieu de terrain du Barça plus important encore. Aujourd'hui, le jeu blaugrana retrouve de sa fluidité grâce à l'apport de Sergi Busquets, immense depuis la reprise. À la récupération, à la baguette ou à la coordination, la tour de contrôle catalane n'a jamais semblé aussi dominante. Une domination du FC Barcelone, aussi bien en Espagne qu'en Europe, qui inquiète, tant ce Barça a su se réinventer sans « le meilleur joueur du monde » .
Par Robin Delorme, en Espagne
Vous avez relevé une coquille ou une inexactitude dans ce papier ? Proposez une correction à nos secrétaires de rédaction.