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S’il ne devait en rester que 100… (2e)

Javier Prieto-Santos et Simon Capelli-Welter

So Foot a classé ses 100 meilleurs joueurs de l'histoire. Mais selon ses propres critères. Soit un peu d'objectivité, pas mal de mauvaise foi, beaucoup d'amour et même une dose de grâce. Au fur et à mesure du mois ont ainsi été dévoilés, et de manière décroissante bien sûr, les heureux élus. Voici donc les meilleurs joueurs So Foot, avec aujourd'hui le joueur classé 2e : Ronaldo, le mec qui a vraiment révolutionné les années 2000.

#2 - Ronaldo


A comme Adolescent : 23 mars 1993. Le jeune Ronaldo a seize ans et fait sa première apparition dans l’équipe junior du Cruzeiro Belo Horizonte. Il claque deux buts. Le 7 septembre, il démarre en équipe première. Le 5 novembre, il marque cinq buts et fait la passe décisive pour le sixième et dernier but d’une victoire contre Bahia. Le 10 septembre, il reçoit sa première convocation en équipe nationale. Le 23 mars 1994, il connaît sa première titularisation, contre l’Argentine. Le 4 mai 1994, Ronaldo a dix-sept ans, et contre l’Islande, il inscrit le premier de ses 62 buts sous le maillot de la Seleção. Le 17 juillet 1994, il est sacré champion du monde. Avec un appareil dentaire.

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B comme Brésil : Il ne pouvait en être autrement. Ronaldo ne pouvait pas être argentin, italien, allemand, français ou même portugais. Un tel sens du jeu, du but, du spectacle, du coup de rein, du dribble, de l’accélération, du duel, du petit pont, du grand pont, du passement de jambe, du double passement de jambe, du petit piqué, de la frappe en lucarne, du retourné, de la reprise de volée, du contact, du double contact, du triple contact, bref du football, ne pouvait être que brésilien. Et avoir le même prénom qu’une mascotte de fast-food trop vite oubliée.

C comme Cristiano : Plus flippant qu’une crise d’épilepsie, plus douloureux que des genoux qui pètent, plus déprimant qu’une défaite en finale de Coupe du monde, la comparaison avec un semi-homonyme gominé, vulgaire, vaguement talentueux et hautement dispensable, est sans doute ce qui a fait le plus souffrir le meilleur attaquant de tous les temps. Quelle perfidie absolue que de rapprocher deux êtres que tout oppose sauf trois syllabes. Et comme si ça ne suffisait pas, l’autre Ronaldo est portugais. Ou le pire des affronts pour un Brésilien.

D comme Darwin : « Les espèces qui survivent ne sont pas les espèces les plus fortes, ni les plus intelligentes, mais celles qui s’adaptent le mieux aux changements. » Si Ronaldo est unique en son genre, c’est aussi parce qu’il a toujours su soigner ses statistiques personnelles malgré les mutations d’un corps meurtri par les plus graves blessures. Maigre au Brésil, fluet à Eindhoven, athlétique à Barcelone, supersonique à l’Inter, en surpoids au Real, gros à l’AC Milan et obèse aux Corinthians, Ronaldo a toujours su trouver les chemins des filets. Une évolution toute particulière qui l’aura mené de la grâce à la graisse.

D comme Défaite : « On n’a pas gagné parce qu’on a perdu. » Ronaldo. Le football, c’est toujours simple avec des grands joueurs.

E comme Épilepsie : Et ce fameux après-midi du 12 juillet 1998 à la Clairefontaine. La rumeur de son forfait avant la rencontre. Sa prestation décevante. La sortie de Barthez. La défaite. Au final, on ne saura sans doute jamais ce qu’il s’est vraiment passé avant cette finale. La version officielle parle d’une crise d’épilepsie. Mais si Ronaldo a bien fait de la mousse avec sa bouche, il n’a sans doute pas passé l’après-midi à jouer aux jeux vidéo…

F comme Frisson : Il est l’un des rares à avoir fait du murmure la bande-son de sa carrière. Capable d’arracher toutes les plus belles émotions humaines contenues dans un stade à chaque prise de balle, Ronaldo était un entertainer dans l’âme avant d’être un finisseur. Il aura marqué son époque en aspergeant de la Chantilly sur tous les terrains qu’il a foulés. Merci.

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G comme Geli : Ronaldo dispute son premier match officiel avec le Barça le 25 août 1996. Il n’est alors qu’un inconnu de dix-sept ans pour lequel le Barça a craché 18 millions d’euros. Une véritable folie à l’époque. Pour sa grande première avec les Blaugrana, Ronaldo marque deux buts et délivre une passe décisive pour son grand pote Iván de la Peña. Malgré un début réussi, tout le monde retient pourtant son viol sur le défenseur de l’Atlético : Geli. Coincé sur le côté droit de la surface de réparation des Colchoneros, Ronaldo, à l’arrêt, va littéralement briser les reins de l’Espagnol en lui infligeant un humiliant elastico. Magique.

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H comme Hiver : Avant de débarquer en Europe, Ronaldo n’avait jamais vu la neige. En Hollande, il découvre pourtant la poudreuse et les entraînements sous -20 degrés Celsius : « À Eindhoven, on me demandait de taper dans un ballon alors que je ne sentais même pas mes pieds. C’est le pire souvenir de ma carrière. » C’est aussi l’une des raisons qui l’auront poussé à toujours choisir des clubs de l’Europe du Sud. Jusqu’à son retour au Brésil. Jusqu’à ce maudit 14 février 2011. Et cette conférence de presse. « Je suis venu vous dire que je mettais fin à sa carrière. » Les larmes de Ronaldo. Les nôtres. Et depuis, l’hiver.

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I comme Immunité diplomatique : Barça puis Real ? Inter puis AC Milan ? Pour moins que ça, certains ont été qualifiés de « traître » toute leur vie. Pour Ronaldo ? Pas de problème. Parce qu’à Ronaldo, on pardonne tout. Bigger than life. Cet été, il aurait même pu passer des Boston Celtics aux Miami Heat sans passer de Jésus à Judas.

J comme Jairzinho : Le mythique champion du monde 70 est celui qui a découvert et lancé la carrière de Ronaldo. L’enfant qui rêvait de jouer à Flamengo mais qui n’avait pas assez d’argent pour se payer le bus jusqu’au centre d’entraînement rubro-negro est repéré par Jairzinho lors d’un tournoi scolaire de futsal. Ce dernier décroche le téléphone rouge pour appeler les dirigeants du São Cristóvão : « J’ai découvert le meilleur joueur de football de tous les temps ! » Le club offre au joueur un contrat de 258 euros par semaine et tous les titres de transport qu’il faut. Aujourd’hui, Jairzinho et Ronaldo ne se parlent plus. Le champion du monde 70 n’a pas goûté de ne pas être invité au jubilé du double Ballon d’or. Triste.

K comme Kilos : Le Brésilien en a toujours eu plutôt trop que pas assez. Récemment, il a même flirté avec les 120. Ce qui n’est pas rien. En septembre dernier, il a donc décidé de s’inscrire au programme de l’émission Mensurations correctes, télé-réalité diffusée au pays par Globo. Et ça, c’est quand même autre chose que Danse avec les stars.

L comme Lady Di : Vous connaissez la blague : « Quelle est la différence entre Lady Di et Ronaldo ? Ronaldo c’est grand pont, accélération, but. Lady Di, c’est petit pont, accélération, poteau. » Pour l’anecdote, lorsque Ronaldo signe, à dix-sept ans, avec Cruzeiro, le club accorde au jeune talent une petite voiture de fonction : une Volkswagen Gol 1000. Un bout de tôle carrée armé de roues avec lequel Ronaldo va se faire la main. Comme prévu, Ronaldo défonce sa première voiture au bout de quelques jours. Malgré l’accident provoqué et l’absence de permis de conduire, le joueur évite miraculeusement les sanctions de la police et de la justice brésilienne.

M comme Mariage : Le 14 février 2005, Ronaldo et Daniella Cecarelli s’offrent le château de Chantilly pour se passer la bague au doigt. Pour l’occasion, des décorateurs brésiliens refont la déco de l’endroit. 20 000 roses blanches sont commandées et dispersées dans la petite chapelle des lieux. Le cortège est assuré par des limousines Audi avec qui Ronaldo a passé un contrat. Kaká, Cafu, Raúl, Samuel, Helguera, Casillas et tous les autres galactiques sont de la partie. Tout ce beau monde dansera au son de Fatboy Slim, le DJ de la réception ce soir-là. Figo finira avec la cravate nouée autour de la tête comme dans les shows de Patrick Sébastien. Le mariage entre le joueur et le mannequin ne sera, lui, jamais officialisé. En revanche, il a bien été consommé.

N comme Nike : Si l’équipementier américain a passé la vitesse supérieure dans le foot, c’est grâce à Ronaldo. En basket, l’icône a les jambes écartées et s’appelle Michael « Air » Jordan. En foot, ce sont les dents qui sont espacées et elles s’appellent Ronaldo R9. Joga Bonito…

O comme O Fenomeno : Dans le football, et plus encore dans le football sud-américain, les surnoms, ce n’est pas ce qui manque. Du Flaco, du Loco, du Matador, du Principe, du Rei. Surnommé Fenomeno dès ses débuts à Eindhoven, Ronaldo a verrouillé l’un des plus classes de ces surnoms très rapidement. Et à jamais. O Fenomeno, c’est lui, et pour toujours.

P comme Popescu : Le classieux défenseur central roumain a été le premier ami de Ronaldo en Europe. À Eindhoven, Gica fait office de traducteur, mais aussi de père adoptif pour celui qui n’est encore qu’un ado. Une relation que le Roumain n’a toujours pas oubliée aujourd’hui : « Ronaldo était un gamin joyeux et très affectueux. Je l’ai tout de suite pris sous mon aile. Comme il ne savait pas se faire à manger et qu’il ne faisait pas les courses, il venait souvent manger chez moi. » Les deux amis se retrouvent de nouveau au Barça. Où ils s’adonnent aux paris : « À chaque fois que le coach programmait des petits matchs d’entraînement, je pariais 60 euros avec Ronaldo qu’il ne marquerait aucun but. Au final, j’ai dû perdre 3000 euros avec mes bêtises : il arrivait toujours à marquer. »

Q comme Questions : La France black-blanc-beur serait-elle devenue championne du monde avec un Ronaldo en forme ? Comment se fait-il qu’il n’ait plus jamais eu de crise d’épilepsie d’ailleurs ? Ronaldo a-t-il connu son climax au Barça ou lors de sa première saison à l’Inter ? O Fenomeno est-il le meilleur avant-centre de tous les temps ? Autant de questions qui ne méritent aucune réponse mais qui permettent de briser des silences très gênants lors des repas de famille.

R comme Rumeur : Selon la légende urbaine, Luis Fernandez, alors coach à l’AS Cannes, aurait soufflé le nom de Ronaldo à ses dirigeants de l’époque. Ces derniers auraient refusé de payer la clause libératoire de deux millions d’euros du joueur estimant qu’il était trop jeune et inconnu au bataillon. Pour rappel, Luis Fernandez, c’est le type qui a foutu Ronaldinho sur le banc quand même…

S comme Slalom : Le seul mot qui convient pour qualifier ce but d’extraterrestre inscrit contre Compostelle, le 12 octobre 1996, sous le maillot du Barça. Un joueur, deux joueurs, trois joueurs, quatre joueurs, et même le gardien. Ou comme le raconte Fernando Vasquez, l’entraîneur d’alors de Compostelle : « Ce soir-là, un ange est passé sur le terrain, et il était chauve et brésilien. Quand j’y repense, ce qui est incroyable, c’est qu’il a traversé 60 mètres sans jamais freiner sa course. Nous étions comme des enfants en train d’essayer d’attraper un fauve. Ce but, c’est un peu ma croix, on m’en parle encore dans la rue. » Et tant pis pour Vasquez, mais la rue risque d’en parler encore longtemps. Dans certaines travées catalanes, il paraîtrait même que Ronaldo ne s’est jamais vraiment arrêté de courir.

T comme Tragédie : 12 avril 2000. Ronaldo effectue son grand retour sur le maillot de l’Inter après six longs mois d’absence. Il rentre à la 64e minute du match. Sur sa première prise de balle, le Brésilien accélère brutalement vers le but. À la sortie d’un passement de jambe, le genou du brésilien reste cloué sur la pelouse de l’Olimpico. Ronaldo ne s’en relèvera pas. Le stade tout entier est suspendu aux larmes de Ronaldo qui prend sans doute conscience à ce moment-là qu’il ne sera plus jamais le Fenomeno. Peut-être la séquence vidéo footballistique la plus tragique de tous les temps.

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U comme Unique : Définition : Seul dans son genre, son espèce. Synonymes : inégalable, irremplaçable, isolé, rare, singulier, spécial, stupéfiant. Ronaldo, quoi.

V comme Vasectomie : Bah oui. C’eut pu être V comme vitesse, car personne avant lui n’avait autant donné l’impression d’aller aussi rapidement sur un terrain de foot, et que depuis, tout va trop vite. Ou alors V comme vrai, par opposition à l’autre fake de Funchal. Ce sera V comme vasectomie. Soit, quelque part, V comme Victoire sur la Vie.

W comme Winner : Parce que si Ronaldo, ce sont des souvenirs, des images, des rêves et des regrets, c’est aussi un palmarès. Une Coupe du Brésil en 1993. Une première Coupe du monde en 1994. Une Coupe des Pays-Bas en 1996 et une médaille de bronze aux JO d’Atlanta. Une Coupe d’Espagne, une Coupe des vainqueurs de Coupes, une Copa América puis une Coupe des confédérations en 1997. La Coupe de l’UEFA en 1998. Une autre Copa América en 1999. Une seconde Coupe du monde en 2002, ainsi qu’une Coupe intercontinentale. Un championnat d’Espagne en 2003. Un autre en 2007. Une Coupe du Brésil en 2009. Et enfin, le cœur de tous les (grands) enfants de ces années-là.

X comme XY ou XX : En 2008, O Fenomeno se fait choper avec trois autres phénomènes : des travestis. Andreia Albertine, en réalité André Luiz Ribeiro Albertino, a la bonne idée de filmer ses ébats avec Ronaldo avec son téléphone mobile. Conscient du potentiel scandale de la vidéo, le travesti demande 30 000 euros au joueur sous peine de rendre publique l’affaire. R9 refuse. Le scandale éclate. Ronaldo encaisse en demandant pardon avec le sourire. Caetano Veloso, de son côté, en profite pour ressortir de ses tiroirs une chanson composée en 1982 pour Zéze Motta : Tres travestis. Du foot, de la musique et des travelos : This is Brazil.

Y comme YouTube : Le premier joueur YouTube, dont les ordis ont fait tourner en boucle les vidéos comme on fait tourner les mixtapes, les filles faciles, la bonne herbe ou les serviettes, c’est lui : Ronaldo Luis Nazario de Lima.

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Z comme Zézette : Ou cette espèce de coupe que Ronaldo arborait lors de la Coupe du monde 2002, et qui, soyons honnêtes, faisait largement penser à un pubis. Ça ne l’a pas empêché de coller 8 buts. Ce qui, avec les quatre de 1998 et les trois de 2006, font de lui le meilleur buteur de l’histoire de la Coupe du monde. Donc quelque part, le meilleur buteur de l’histoire tout court. Alors, toujours envie de se foutre de sa coupe ?

Javier Prieto-Santos et Simon Capelli-Welter

À lire : Le numéro 84 de SO FOOT consacré à Ronaldo

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