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Ramelow : « Un sentiment plus fort que lors de la Coupe du monde »

Par Ali Farhat
5 minutes
Ramelow : « Un sentiment plus fort que lors de la Coupe du monde »

En 1993, l'équipe réserve du Hertha Berlin s'est hissée en finale de Coupe d'Allemagne. Une équipe composée de jeunes joueurs (connus plus tard sous le nom des « Hertha-Bubis »), qui a multiplié les exploits avant de s'incliner en finale face au Bayer Leverkusen. Jamais une équipe d'amateurs n'avait réussi un tel parcours. L'emblématique Carsten Ramelow, membre de cette team, se souvient.

Dans la nuit berlinoise, une bande de footeux fait du bruit. Quelques minutes plus tôt, la Coupe d’Allemagne 1993 livrait son verdict, avec le Bayer Leverkusen en vainqueur, aux dépens du Hertha Berlin. « Alors oui, on a fini par perdre face au Bayer, mais à la fin, on a beaucoup plus fait la fête qu’eux » , assure Carsten Ramelow, membre de cette petite bande de Berlinois toujours dans l’histoire du foot germain. « Nous sommes toujours la seule équipe amateur à avoir atteint la finale de la Coupe » , annonce-t-il fièrement. L’épisode a tellement marqué ce cher Carsten qu’il le place avant quelques autres graals du football mondial. « J’ai beau avoir joué une finale de Ligue des champions, une finale de Coupe du monde, je n’ai jamais rien vécu d’aussi beau, l’une des plus belles choses de ma carrière, tranche le grand blond. L’ambiance était tout simplement géniale. On se disait juste qu’il fallait jouer, sans se prendre la tête. »

Le déclic Hanovre et Andreas Köpke

À l’époque, le football allemand ne se prend déjà pas la tête, et pas simplement pour une question de frappes de loin. Les équipes réserves pouvaient elles aussi participer à la Coupe d’Allemagne (interdiction à partir de la saison 2008-2009 et la création de la troisième division), même si le parcours partait inéluctablement de plus loin. « On s’est qualifiés via notre victoire en Coupe de Berlin » , explique Carsten. Après une première mise en bouche (le SGK Heidelberg battu 3-0), les petits s’attaquent aux pensionnaires de D2 germaine. Le VfB Leipzig tombe d’abord 4-2, avant que le Hertha n’affronte Hanovre 96, en huitièmes de finale. « La saison précédente, Hanovre était devenue la première équipe (et la seule à ce jour, ndlr) de 2. Bundesliga à remporter la Coupe d’Allemagne. On s’est retrouvés menés 2-0, mais on a renversé la vapeur pour mener 3-2. Ils ont égalisé à 3-3, mais juste avant la fin du match, on a mis le but de la victoire. On se qualifie pour les quarts, et le lendemain, l’équipe première du Hertha se faisait éliminer par le Bayer Leverkusen. Quelle ironie… » Et un déclic aussi.

Les Berlinois sont enfin pris au sérieux. Oui, les quarts, ça devient vraiment sérieux, surtout contre le 1. FC Nuremberg, qui évolue dans l’élite, et avec Andreas Köpke dans les buts. « À partir de là, les projecteurs se sont braqués sur nous. Comme on passait les tours les uns après les autres, on a commencé à s’intéresser à nous. Il y avait 500 personnes pour le premier match. 76 000 au dernier. Ils voyaient qu’on s’amusait, et il y a eu un gros vent de sympathie qui a soufflé dans tout Berlin. Il y avait même une chanson qui circulait à l’époque. » Le petit Hertha s’impose à la dernière minute de jeu contre la bande à Köpke. En demi-finale, le FC Chemnitz, une D2 « entraînée par le grand Hans Meyer » dixit Ramelow, trébuche au stade olympique de Berlin. « Meyer savait que ça allait être difficile contre nous, éclaire Ramelow. La majorité des 53 600 spectateurs était pour nous. » Carsten réussit à ouvrir le score : « J’étais hyper content. Imagine, je n’avais que 19 ans… »

Pas encore la vingtaine, Carsten Ramelow va donc découvrir sa première finale de Coupe d’Allemagne, avec une équipe réserve qui plus est, contre le Bayer Leverkusen qui avait sorti l’équipe fanion du Hertha, en huitièmes de finale. « Ce n’est pas pour autant que les gars de la première nous ont donné des conseils sur le Bayer, rigole Carsten. Peut-être que les entraîneurs des deux équipes ont échangé des propos, des idées sur cette rencontre, mais nous, les joueurs, non. En fait, on était concentrés sur nous-mêmes. » L’entente est pourtant plutôt « bonne » au sein du club, les aspirants s’entraînant aussi avec les pros. 5-6 joueurs allaient souvent « dépanner » en équipe première : le gardien Christian Friedler, les jumeaux Schmidt, Oliver et Andreas, ou le libéro Sven Meyer. « Les deux mondes étaient beaucoup moins dissociés qu’aujourd’hui, pondère Ramelow. Je trouve dommage que le Bayer n’ait plus d’équipe réserve aujourd’hui. La réserve, ça te permet d’avoir une passerelle entre le monde amateur et professionnel, un bon tremplin pour les jeunes appelés à devenir pros. »

« Un défilé de voiture, comme si on avait gagné la coupe »

Pour cette finale, Carsten Ramelow n’est pas titulaire, sans surprise, la toison très très blonde. Le Hertha tient bon le 0-0, après l’heure de jeu. « Je me suis dit que ça n’allait pas être facile… Et ce fut le cas. On s’est beaucoup battus, mais ils ont eu énormément d’occasions. Et puis à la 78e minute, Ulf (Kirsten, ndlr) a marqué le but de la victoire. C’était un peu rageant, parce qu’on voulait les emmener en prolongation. Mais ils étaient trop forts pour nous. » Au même moment, sans le savoir, l’avenir de Carsten Ramelow s’écrit. Si Leverkusen a rapporté la Coupe de son trip à Berlin, il a aussi rapporté dans ses valises une conviction. « Trois ans plus tard, je suis recruté par le Bayer Leverkusen. J’ai appris par la suite que Rainer Calmund(manager historique de la Werkself, ndlr) m’observait depuis cette époque » , avoue le milieu allemand.

Plutôt réputé pour un jeu de costaud, Carsten s’est donc révélé aux yeux des techniciens de l’élite allemande dans une équipe réputée, elle, comme joueuse. « Le mot d’ordre du coach, Jochem Ziegert, était simple : aller sur le terrain et s’amuser. Sans pression, quel que soit le tour » , se souvient Ramelow. Si la planète football le retient et le retiendra très longtemps comme l’emblématique Carsten Ramelow du Bayer Leverkusen, le principal intéressé conserve plutôt un autre surnom en tête : un des « Hertha-Bubis. » « Après la rencontre, nous étions bien sûr abattus à cause du résultat, mais on est vite passés à autre chose, commence Carsten. La fièvre s’était emparée de la ville les jours précédant le match, dans le bus, les vestiaires… C’était vraiment très fort comme sentiment. Les Berlinois nous ont rendu un hommage triomphal, avec défilé de voitures et tout… comme si on avait gagné la Coupe, en fait. Depuis ce jour, quelles que soient les carrières que mes coéquipiers et moi avons menées, nous sommes entrés dans l’histoire du club. On restera à jamais les petits du Hertha, les « Hertha-Bubis ». »

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