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Que retenir du rapport du groupe de travail sur le foot durable ?

Par Nicolas Kssis-Martov
Que retenir du rapport du groupe de travail sur le foot durable ?

La République aime le papier ! Surtout celui relié, ou désormais numérique en PDF, des beaux rapports commandés par le parlement ou les ministres. En ce moment, disons que de ce point de vue-là, on ne cesse de bosser et d’auditionner sur le sport, par exemple au Sénat sur les grands stades. Dernière production en date, le groupe de travail sur le « foot durable » lancé par Valérie Fourneyron et dirigé par Jean Glavany, vient de remettre le résultat de son « cogitage collectif »… Et pour une fois, à défaut de révolution, un petit vent de réforme y souffle.

Certes, comme toujours avec ce type de document, beaucoup de « il faudrait » enveloppent fort peu de « voilà comment » . Il existe pourtant cette fois-ci un petit enjeu, puisqu’une loi sur le sport est annoncée en 2014 et que donc, il y aura matière à traduire dans le marbre du droit certaines recommandations. Avec comme principale zone aveugle, nous y reviendrons, la dimension européenne où beaucoup de choses, sinon l’essentiel, se jouent. Espérons que quelqu’un a pensé à envoyer un exemplaire du rapport à Michel Platini !

Difficile à résumer, ces 33 pages sont malgré tout empreintes d’une certaine logique. Fruit des réflexions et des discussions d’un groupe où se côtoyaient présidents de clubs, représentants du foot (syndicats de joueurs, etc.), personnes qualifiées, spécialistes (dont évidemment l’omniprésent Pascal Boniface) et élus, elles délivrent en effet une certaine vision du foot et de son positionnement dans la société. Pour aussi ronflant que celui puisse paraître, les contributeurs et surtout apparemment M. Jean Glavany, ont ainsi tenté, à grands traits, de définir l’identité de ce sport singulier et dominant dans le paysage hexagonal. Actant le principe qu’il est aussi bien une activité économique qu’un phénomène social, le rapport tente de la sorte d’en tenir les deux bouts pour refonder une cohérence de plus en plus mise à mal : grève des 75%, violences dans les stades, crise du foot amateur, image ternie de l’équipe de France, etc.

Un joueur = un seul agent

Première porte d’entrée, l’idée de rapprocher le statut du footballeur pro de celui de l’artiste, le monde du sport de celui la culture. « Il s’agirait là d’une évolution sensible de la façon dont les sportifs professionnels seraient considérés par la société, dans la droite ligne d’un rapprochement entre culture de l’esprit et culture du corps. » Le footeux, un artiste comme un autre ? L’idée est séduisante et il semblerait de toute évidence que certains membres de la commission n’ont heureusement pas trop regardé la L1 cette saison. Avec pour le coup des conséquences sonnantes et trébuchantes, notamment en termes d’exemption fiscale. « Il s’agit de faire converger le régime social des joueurs de celui des artistes de spectacle. En effet, la nature des activités des joueurs de football professionnels se rapproche, par certains aspects, de celle des artistes du spectacle (le terme recouvre les artistes qui se produisent en public : artistes lyriques, comédiens, danseurs, etc.) : les footballeurs professionnels se produisent régulièrement devant un public mais créent également de la valeur grâce à leur image. En conséquence, il conviendrait de rapprocher les modes de cotisations sociales. »

En ce qui concerne les agents, la même perspective est clairement exprimée, afin de couper court à des pratiques jugées limites voire perverses : « La commission privilégie donc le pragmatisme qui préside à la rémunération des agents d’artistes par exemple : leur rémunération peut être assurée soit par l’artiste, soit par la structure culturelle, soit par les deux selon une règle de partage librement fixée entre eux. Pour mieux contrôler et réguler les rémunérations des agents, (…) la commission propose d’instaurer un principe d’exclusivité du mandat conféré à un agent sportif. Un joueur ou un entraîneur ne pourront pas recourir à un autre agent pour des opérations de placement tant que le mandat en cours est valide ou n’a pas été formellement dénoncé. »

Le modèle budgétaire allemand

Toutefois si le rapport promet de beaux cadeaux, principalement financiers, au foot pro, il désire en retour lui rafraîchir la mémoire quant à ses devoirs, ce que semblent sous-entendre, en creux, certaines mesures avancées, dans un vague reflux mal digéré de la menace de grève contre les 75% : « Toutefois, dans un esprit de responsabilité partagée, ces simplifications et ces allègements ne se conçoivent pas sans contreparties. Il est nécessaire que les clubs assument pleinement leurs responsabilités économiques, sociales, éducatives et citoyennes. Plusieurs pistes évidentes et peu onéreuses sont ouvertes : meilleure association des supporters à la vie et à la gouvernance des clubs, modernisation des structures de gouvernance des clubs par la généralisation des comités des rémunérations, des comités d’audit et des administrateurs indépendants, implication active dans la gestion des enceintes, négociations régulières entre partenaires sociaux, maîtrise de la masse salariale en la faisant passer de 70% à 60% des budgets des clubs, encore loin des 50% prévalant en Allemagne. » Autrement dit, arrêtez de chercher ailleurs, notamment dans la fiscalité, la cause de vos difficultés, et apprenez à mieux gérer vos « entreprises » ou la puissance publique s’y attellera pour vous. On se demande quelle fut la part de Jean-Michel Aulas dans cette orientation ?

Les parties relatives au besoin de transparence, notamment pour la DNCG, sont d’ailleurs certainement celles qui vont faire le plus grincer des dents, tant le petit monde du football a pris l’habitude de gérer ses affaires à l’abri des regards indiscrets. Autant vite passer en revanche sur les habituelles déclarations d’intention sur la vocation citoyenne du football, le besoin de la renforcer dans les centres de formation ou de consolider la solidarité entre haut niveau et amateurs. Des rengaines habituelles mais souvent vaines. Le ministère ne dispose pas de leviers capables de changer la donne. Et franchement, on doute de la volonté, ou de l’intérêt, des clubs à transformer leurs « salariés » en des citoyens « conscients » , ou encore de la capacité de la FFF à faire plier la LFP en faveur du foot d’en bas.

« Tous les ultras ne sont pas des hooligans »

Le chapitre sur les supporters laissait craindre le pire. Les réunions se déroulèrent dans un climat délétère suite aux affrontements très violents lors de Nice-Sainté. Des réponses radicales comme l’interdiction de stade à vie ou la fin des déplacements avaient été avancées. Or si la l’application de la loi (ou plutôt des lois) est réclamée dans toute sa sévérité, avec comme éternelle et discutable référence l’Angleterre, Jean Glavany a également fait raisonner un autre son de cloche, notamment lors de la conférence de presse où il posa que « tous les ultras ne sont pas des hooligans » . Un truisme devenu presque iconoclaste ces derniers temps. Le rapport souligne surtout que les « clubs de football professionnels ont la responsabilité d’inciter les supporters à se regrouper dans des associations agréées et respectueuses des valeurs citoyennes. […] Pour être responsables, les supporters ne peuvent être réduits à des clients. De bonnes pratiques existent d’ores et déjà en matière de relations contractuelles passées entre des clubs de football professionnels et des associations de supporters, sur la base de conventions établissant clairement les droits et les devoirs de chaque partie, et pouvant comporter à ce titre un subventionnement de l’association agréée. Il convient désormais de les généraliser. (…) L’article 35 du règlement de l’UEFA sur l’octroi de la licence aux clubs et le fair-play financier prévoit que les clubs européens doivent nommer un responsable de l’encadrement des supporters, afin d’établir des relations constructives avec leurs supporters. Il est urgent d’appliquer concrètement cette disposition. Si elle ne nécessite pas forcément le recrutement d’un nouveau salarié, ce responsable devra être formé, ne pas être par ailleurs responsable de la sécurité et son rôle précisément défini. » Encore faut-il que la bonne volonté existe de part et d’autre, et elle ne se décrète pas au Parlement ni derrière un pupitre face à des journalistes.

La lecture de ce rapport sert finalement de bon révélateur de ce qu’il reste de l’État-nation dans le sport. En gros surtout un pouvoir régalien (d’où l’importance du chapitre sur les supporters et les agents, la loi pouvant peser sur eux) et une fiscalité (même si ce dernier point impose que d’autres administrations, dont Bercy, donnent leur accord). Il s’y devine en outre à quel point le foot pro dépend, ou plutôt attend, aujourd’hui d’une régulation au niveau européen. Au moins, les rédacteurs ne se cachent pas derrière leur petit doigt et confessent tout au long du texte que sans coordination au niveau de l’UE et de coopération avec l’UEFA, la « France seule » ne peut pas grand-chose. Illustration : « L’interdiction complète de la tierce propriété des joueurs est rendue nécessaire par des considérations éthiques, économiques et sportives. La France pourrait mobiliser ses partenaires pour interdire cette pratique à l’échelle de l’union. Il serait utile d’associer l’UNESCO à la démarche, procédure qui a fait ses preuves dans la lutte contre le dopage. » Bref que notre beau pays devienne moteur au niveau européen, au moins dans le foot… Il faudrait que François Hollande en touche deux mots à Angela Merkel la prochaine fois. En espérant que le PSG réussira à éliminer Leverkusen.

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Par Nicolas Kssis-Martov

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