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Quand Jambay est entré dans le Top buts

Par Arnaud Clément
7 minutes
Quand Jambay est entré dans le Top buts

Latéral droit explosif participant à la remontée de l'OM en D1 et finaliste de la Coupe de France 2005 avec Sedan, Hamada Jambay est surtout connu pour un fait d'arme datant de la saison 1996-1997 : une prune de volée envoyée dans la lucarne du RC Lens qui est resté un paquet de semaines dans le Top buts de Téléfoot.

À une période pas si lointaine, Christian Jeanpierre savait faire presque rêver les téléspectateurs de toute une jeune génération, peu ou prou la même qui se plaît aujourd’hui à le descendre en flèche. C’était durant les nineties, avant France 98 très exactement, où le public de Téléfoot s’encroûtait des annonces de tournoi de Thierry Roland et le léger « zozotement » de Frédéric Jaillant, pour mieux rire des rubriques commentées par CJP, comme les Z’insolites ou le Top buts, classant sur la saison les plus belles réalisations de la D1 d’alors. Les plus jeunes les retrouvaient chaque semaine devant un bol de cacao et des tartines, dans l’espoir de voir un petit nouveau renverser l’ordre établi et chambouler le squattage en bonne et due forme d’Amara Simba, David Zitelli ou Laurent Leroy. Une activité à laquelle s’est prêté volontiers Hamada Jambay, latéral droit de l’OM de 1993 à 1999, qualifié « de roi des missiles longue portée » après un samedi soir sur la Terre, le 16 novembre 1996, avec une cacahuète filant comme un courant d’air dans un Vélodrome en chantier. Le but de Jambay contre le RC Lens, ou une petite éclaircie dans une saison 1996-1997 de la reconquête bien terne pour l’OM.

« L’année de la remontée de D2 avait été exceptionnelle, avec cet amalgame de jeunes comme Jambay, Echouafni, Libbra ou moi-même, et les anciens en fin de carrière comme Dib, Casoni, Ferrer, etc. Mais le retour en D1 n’a pas été marrant… » , se souvient Ludovic Asuar, jeune milieu de 20 ans à l’époque, aujourd’hui gérant d’un centre de foot indoor à Arles. Son coach Gérard Gili, qui savait son départ se dessiner à mesure que Robert Louis-Dreyfus se rapprochait du club, ne dit pas autre chose : « Nous avions peu de moyens, le club était encore géré par la mairie, le stade était vide et en chantier… Ensuite, on a fait un recrutement qu’on estimait intelligent avec Gravelaine, Pedros, Letchkov, qu’on était contents de voir venir. Bon, les recrues ont été prises à partie rapidement. Pedros a été transféré en décembre et en fait, Letchkov, au bout de 15 jours, j’ai vu que c’était son frère qu’on avait, vu ce qu’il nous proposait sur le terrain. À la Coupe du monde 1994, les Bulgares ne devaient pas tourner qu’à l’eau pour aller en demi-finale… » Et les supporters ne comprennent pas que leur OM ne marche pas sur la France du foot immédiatement, au point de voir une alerte à la bombe émerger au soir de la 14e journée contre Nantes, obligeant les joueurs à faire les derniers mètres à pied sous les cris d’un comité d’accueil bien remonté. « Ils étaient même à la porte du vestiaire ce soir-là. Et on les a aidés pour qu’ils viennent jusque-là, on n’arrive pas comme ça dans les couloirs » , poursuit Gili, un brin désabusé par cette période.

Joinville la semaine, le Vélodrome le samedi

Dans toute cette chienlit collective et populaire, les seuls à tirer leur épingle du jeu sont les petits jeunes issus de la formation qui ont saisi leur chance en D2 et participé à la remontée de l’OM dans l’élite. Hamada Jambay et Ludovic Asuar en sont, et ce malgré les aller-retour avec la région parisienne durant toute la saison, comme s’en rappelle le second : « On faisait les aller-retour avec le bataillon de Joinville comme nous devions faire notre service militaire. Donc on ne rentrait que le jeudi soir ou le vendredi matin pour le match du week-end. Déjà que c’était chaud à Marseille de se faire une place quand tu es issu de la formation, mais alors là… Et pourtant, assez vite, le coach me dit que je serai titulaire à la place de Letchkov, qui est quand même un monsieur… C’est vrai que certaines recrues ont été assez vite montrées du doigt… » Hamada Jambay, jeune homme franco-malgache issu des quartiers nord et natif d’Iconi aux Comores, dévale sur tout le flanc droit tel un Cafu phocéen, lui qui, petit, était pourtant attaquant. « Hamada avait profité de la D2 pour faire sa place. C’était quelqu’un de très rapide, c’était une vraie arme pour lui, mais aussi un problème, car il avait besoin d’être canalisé, de se concentrer plus sur son placement. S’il avait eu plus de science tactique, il aurait pu faire de grandes choses. Et puis cette frappe… » , résume Gérard Gili, qui l’a connu à son arrivée à l’OM en pupilles à 13 ans.

Une frappe de balle de fou furieux qui fait donc mouche au soir de la 18e journée, face à un RC Lens non moins en galère, malgré une équipe où on retrouve des noms comme Wallemme, Delmotte, Foé, Smicer ou Titi Camara. « Slavo Muslin avait été débarqué en mars cette année-là, ça n’avait pas collé avec nous, alors qu’il était pourtant vraiment une pointure, avec des préparations techniques ou tactiques poussées. Mais il avait été remplacé par Lemerre et Leclercq en cours de saison, qui ont jeté les bases de la future équipe championne de France 1998 sur la fin de saison en assurant le maintien » , se remémore Jean-Marc Adjovi-Boco. Or, en cette fin de phase aller, Lens est en roue libre et enchaîne les défaites après une entame prometteuse. La tête sous l’eau d’entrée ce soir-là, les Lensois se retrouvent assez vite menés et même distancés au score. Avec une ouverture du score signée Ludovic Asuar au quart d’heure de jeu. Dix minutes avant le moment où « un moustique a piqué Hamada » , comme en rigole Gérard Gili. On joue alors la 28e minute et l’OM obtient un corner à gauche, frappé par Reynald Pedros.

« Tu es trop près pour frapper ! »

Ali, le frère d’Hamada Jambay, de deux ans son cadet, était en virage sud ce soir-là et n’est pas près d’oublier ce moment déroulé juste sous ses yeux : « Je me rappelle bien qu’un pote était venu me dire avant le match qu’Hamada allait marquer un sacré but. Cela m’avait fait rire, mais alors là, quand j’ai vu le corner ressorti de la tête par un Lensois et Eric Roy rater sa reprise, avec mon frère arrivant derrière comme une balle… Je me dis dans ma tête : « Non, fais pas ça… » Et là, je vois la balle partir et derrière, que dire de plus ? La folie pure et simple… » Une folie vécue par quelque 18 000 spectateurs après avoir vu l’ogive de Jambay enjamber toute la défense pour aller se loger presque dans la lucarne de Jean-Claude Nadon. Le genre d’anomalie footballistique suscitant souvent des commentaires type : « Il peut la retenter cent fois celle-là… » Ali Jambay n’a d’ailleurs plus jamais tenté de chambrer son frère après ça : « Avant, je le taquinais pour lui dire qu’il ne marquait pas. Mais après le match, il m’a vu et m’a gentiment conseillé de la fermer pour un moment (rires). »

Des piques gentilles auxquelles se sont adonnés volontiers Asuar et toute sa bande par la suite : « Après ce but contre Lens, quand on le voyait s’approcher pour tirer, on lui gueulait tous que ce n’était pas assez près, qu’il devait reculer encore, c’était du n’importe quoi… On le chambrait sur ça et le Top buts deTéléfoot, comme il y est resté un paquet de semaines. » Avec sa note de 8,83 sur l’échelle de Jeanpierre, le but de Jambay passe en boucle chaque dimanche. Une fierté pour son frère : « Un jour, je l’ai même revu et commenté pour un documentaire de Canal+ par Michel Platini. Cela m’a fait quelque chose d’entendre quelqu’un comme M. Platini parler en bien du but de mon frère. Le genre de truc qui te fait dire que ça a marqué les esprits… » Sûrement plus que son autre praline balancée cette saison-là à la face de Bruno Martini, quelques mois plus tard. De beaux souvenirs qu’Hamada Jambay garde aujourd’hui pour lui du côté des Comores, là où il s’occupe d’une académie de football et forme des jeunes locaux, non sans garder un œil sur les résultats de l’OM, son club de toujours.

Dans cet article :
« La gestion des gardiens sous QSI, c’est grotesque »
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Par Arnaud Clément

Stade Vélodrome, 16 novembre 1996, Marseille bat Lens : 2-1 (2-1)
Buts : Asuar (18) et Jambay (28) pour l'OM, Rychkov (38) pour Lens.

OM : Köpke – Jambay, Malusci, Galtier (puis Makin) – Echouafni, Roy, Durand (puis Robin), Pedros (puis Ferrer), Asuar – Gravelaine, Libbra. Entr. : Gérard Gili
RC Lens : Nadon – Régis, Wallemme, Déhu, Adjovi-Boco – Delmotte (puis Brunel), Foé, Meyrieu, Rychkov – Smicer, Camara. Entr. : Slavo Muslin

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