Le footballeur tient l'économie à bout de portefeuille
Oui, il faut davantage les payer même si le football est déjà l’un des seuls milieux où les employés perçoivent des émoluments supérieurs à ceux des employeurs ; à condition qu’ils ne soient pas milliardaire russe ou prince qatarien. Les tenants de la lutte des classes devraient s’en réjouir. Mais que perçoit un joueur dans ce flot d’argent brassé par le foot-business ? Pas grand-chose en comparaison aux montants astronomiques des droits télé (600 millions d’euros la saison de Ligue 1 contre 1,2 milliard en Premier League), des recettes des clubs ou même de l’industrie du jeu vidéo qui se nourrit sur la bête (PES, FIFA, Guy Roux Manager). En plus, la carrière d’un footballeur dure au maximum une quinzaine d’années. Brève donc, mais surtout incroyablement précaire puisque les joueurs ont constamment une épée de Damoclès au-dessus de la tête : la blessure définitive. Ils enchaînent les contrats précaires (stagiaire, CDD), connaissent des périodes de chômage comme l’ensemble des actifs, et ont les pires difficultés à se réinsérer dans la vie active.
Oui, il faut davantage payer les footballeurs car ils enrichissent l’économie. Si un départ aux Émirats a valeur d’exil en Patagonie pour chanteur de variété, les joueurs de L1 participent à l’effort de redressement en garnissant les caisses de l’État. Une inflation des salaires augmenterait d’autant les prélèvements et permettraient de combler une partie du déficit. Ainsi, au lieu de pousser des cris d’orfraie à l’annonce du salaire de Zlatan, Jérôme Cahuzac (ministre chargé du budget) aurait eu meilleur compte à dégainer sa calculatrice et se réjouir des profits à venir pour Bercy. Au surplus, les footeux, cigales plutôt que fourmis, soutiennent d’importants pans de l’économie : le monde du luxe (combien de sac Vuitton et de fringues de grands couturiers écoulés ?), l’industrie automobile en mal de nouvelles immatriculations, les tatoueurs ou encore le secteur de l’immobilier. À ses dépenses, s’ajoute l’entourage fourni (agents, familles - notamment l’argent de poche pour le frangin branleur -, amis gratteurs, call-girls) qu’un salaire entretient.
La moitié des footballeurs finissent ruinés
Oui, il faut davantage payer les footballeurs car ils connaissent la banqueroute et le surendettement sitôt bouclé le tour d’honneur. Le compte en banque à sec, ils vivent dans la crainte de tomber nez-à-nez avec l’huissier à chaque coup de sonnette. Cette face sombre a été révélée par le très sérieux cabinet teuton Schips Finanz. En effet, l’étude nous apprend que la moitié des joueurs finissent ruinés. Des chiffres alarmants qui en réjouiraient presque certains. Seulement, ils ne font que renforcer notre hypothèse de départ. Certes, les footballeurs sont grassement payés mais cela ne les met pas définitivement à l’abri du besoin. On pourra toujours rétorquer que le nombre de chiffres sur un chèque ne changerait rien et qu’ils resteront d’éternels tonneaux des Danaïdes.
Car finalement que reproche-t-on aux footballeurs ? D’être de nouveaux riches. Le goût sûr de l’aristocrate De Villepin s’opposera toujours aux sursauts bling-bling de Sarkozy. Montres rutilantes, voitures de sport, caprices indécents, beaucoup de footballeurs ont un train de vie aussi discret que la penderie d’un sapeur congolais. Doit-on les blâmer pour autant ? Ils ne palpent aucun argent public. Concluons par une citation de Ayn Rand : « On maudit l’argent mal acquis, on respecte l’argent bien gagné » . Les footballeurs méritent le respect.
Par Adrien Rodriguez Ares
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