« L'abstinence est guidée par un impératif sportif »
« Tout dépend quand, comment et combien. Tout dépend où tu places le curseur » , s'était prononcé, gêné, Didier Deschamps au moment d'évoquer les relations sexuelles de ses joueurs pendant le Mondial au Brésil. En terme d'activité pénienne, DD a beau faire profil bas, personne ne pourra nier qu'une simple rumeur suffit à mettre le feu aux poudres. Surtout pendant une Coupe du monde où certains joueurs sont privés de leur chère et tendre pendant de longues semaines. Niveau béquille, les Bosniaques de Safet Sušić auront matière à témoigner. Droit dans ses bottes, le sélectionneur serbe a affirmé quelques semaines avant le Mondial que les compagnes des joueurs ne seraient aucunement autorisées à côtoyer leurs conjoints sous prétexte que les activités sexuelles nuisent aux résultats sportifs. Quand certains préfèrent en rire, d'autres prennent le problème à bras le corps, comme nous l'explique Francis Métivier, philosophe et auteur du livre Sexe et philo : « L'abstinence est guidée par un impératif sportif. Après, la question est de savoir si cette abstinence favorise la performance sportive ou si elle l'affaiblit. Quand j'entends parler les sportifs, j'entends souvent dire que l'effort est autant dans le corps que dans la tête. Effectivement, l'abstinence sexuelle en période de compétition sportive est quand même très favorable. Parce que tout ça, ça crève ! » Si le sexe à haute dose affaiblit les corps, encore faut-il que les joueurs parviennent à masquer leurs nuits de débauche sous peine de voir leur réputation sacrifiée sur l'autel de la bonne conscience.
Brésil de la tentation
Si le sexe fait lever les foules avant les grandes compétitions, c'est aussi parce que la légende voudrait que derrière chaque footeux se cache un DSK en puissance prêt à dégainer à tout moment. Surtout au pays de la samba et du tanga échancré. Bien renseigné sur la vie secrète des joueurs, Jérome Jessel, auteur du livre La face cachée du foot business, nous donne quelques explications : « Le football est un sport exercé par des hommes qui ont pour la plupart entre 20 et 30 ans, qui sont dans la fleur de l'âge. La plupart sont beaux, ont un physique avantageux, souvent supérieur à la moyenne, et plaisent beaucoup aux femmes qui courtisent énormément de footballeurs. » Pas étonnant, dès lors, que certaines créatures usent de leurs charmes pour faire tomber quelques beaux mâles avides de plaisir et de décontraction. Quitte, parfois, à se salir les mains en cédant au chant des sirènes. « L'affaire Zahia, c'est un tabou qui a été brisé. Quand j'ai écris « La face caché du foot business » en 2007, tout le monde m'est tombé dessus, j'ai eu des attaques très violentes, notamment de la part de mes confrères. Simplement, ce thème n'est pas négligeable. Je ne dis pas qu'il est essentiel, mais le diable se cache dans les détails. Quand la Hollande joue une finale, la perd, et que l'on découvre que les joueurs ont fait la fête la veille, cela prouve bien qu'il existe un lien de cause à effet » , analyse Jérome Jessel.
Quatre ans après le scandale de Knysna et alors que l'affaire Zahia est encore tiède, DD et ses champions auront tout intérêt à se tenir à carreau pendant leur aventure brésilienne. Soucieux du mental de ses troupes, le sélectionneur français n'a pas contraint ses joueurs à faire ceinture comme Safet Sušić (Bosnie) ou Miguel Herrera (Mexique). De son côté, le Brésilien Scolari a dit oui au « sexe normal » , tout en condamnant les pratiques farfelues et autres « acrobaties » susceptibles de perturber la concentration de son effectif. Dans une compétition longue de quatre semaines et demie, où les joueurs évoluent en vase clos parfois sans apercevoir le moindre bout de chair féminine, la question du sexe et de l'abstinence semble inévitable. « La sexualité, ça fait partie de la santé. Si on en est privé pendant plusieurs semaines, on ne va pas très bien » , analyse le sexologue Charles Gellman. Puisque le sexe, c'est la santé, en parler dans les médias fait simplement office de salubrité publique. Et puis, dans le fond, tout le monde sait qu'une Coupe du monde, c'est un peu comme le septième art : toujours meilleur avec une bonne scène de cul.
Par Morgan Henry et Victor van den Woldenberg
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