- C1
- Quarts
- Man. City-PSG (1-0)
Paris, quatre à la suite
Première équipe à se faire sortir quatre fois de suite en quart de finale de Ligue des champions, le PSG a encore une fois manqué sa (con)quête du dernier carré européen. Les fautifs sont déjà trouvés, parce qu’il faut toujours couper des têtes en France, héritage culturel, et le duo Blanc-Ibrahimović est désigné pour passer devant le tribunal populaire. Mais cette fois, il faudra couper quelque chose.
Il y a des chiffres qui font mal. Alors que CR7, d’un triplé, passait pour la neuvième fois, en neuf tentatives le stade des quarts de finale, Zlatan Ibrahimović échouait pour la 8e fois en autant de tentatives. Regarder l’élimination du PSG avec le prisme du Suédois serait un poil trop facile, mais sur les 180 minutes face à Manchester City, le meilleur buteur de l’histoire du club a manqué un penalty et un face-à-face à l’aller et s’est montré quelconque au retour. En face, Kevin De Bruyne – dragué par le PSG durant l’été – a trouvé deux fois les ficelles en autant d’opportunités, et sur une jambe. À 34 ans, le Suédois a manqué son rendez-vous avec la C1. Encore. Et encore. Et encore.
Autant le dire tout de suite, c’est au Parc des Princes que les Parisiens se sont sabordés. Sous QSI, les Franciliens ont joué quatre matchs de quart à domicile, moralité, ils ont pris huit buts dans le buffet. C’est rédhibitoire pour exister à ce niveau. Et à l’exception du déplacement à Leverkusen en 2014, les joueurs de la capitale ont systématiquement encaissé un but en phase finale. Tant que les Parisiens ne règleront pas ce souci, il n’iront pas au-delà du top 8. Dire que cette année ils sont tombés sur une équipe de City moyenne, amputée de son capitaine (Kompany), de son métronome (Yaya Touré) et avec un Kevin De Bruyne sur le retour. De quoi faire passer les absences de Verratti et Pastore pour une simple égalité des chances. Et pourtant, ça ne passe toujours pas.
Le 3-5-2 du néant
À l’Etihad Stadium, chose rare, Laurent Blanc a tenté une folie : un nouveau schéma tactique (3-5-2). Au final, ça a foutu un bordel monstre pour les joueurs. Jamais travaillé malgré 20 points d’avance en Ligue 1, les Parisiens ont tenté d’innover sur le match le plus important de la saison. Ou comment la fainéantise et le conservatisme peuvent plomber une équipe. Verdict : pas de liant, pas de jus, aucune cohérence, des joueurs perdus et un sentiment de mollesse incroyable.
La blessure de Thiago Motta a forcé le staff parisien à repasser en 4-3-3, sans plus de réussite. En fin de match, Laurent Blanc a eu l’honnêteté d’assumer son erreur : « Je suis responsable de tout » , a-t-il lâché après la rencontre. C’est vrai. Mais lorsque le Président balance que ses joueurs « ont fait ce qu’ils ont pu » , il se tire une balle dans le pied. Déjà que son autre pied est vérolé par l’affaire Serge Aurier… Prolongé jusqu’en 2018 avant Chelsea, l’ancien coach des Bleus vient d’échouer pour la troisième fois en quarts de finale de C1 contre une équipe qui disputait, elle, son premier top 8. À Manchester, le PSG aurait pu jouer trois jours sans faire trembler Joe Hart.
À l’exception du face-à-face de Cavani à 0-1, le PSG n’a jamais eu de vraie occasion, malgré plus de 65% de possession. Avoir la balle et ne pas savoir qu’en faire, ça devient une marque de fabrique du PSG. Être aussi inoffensif quand vous investissez autant sur Di María et Cavani (120 millions d’euros les deux), c’est embêtant. Avec le recul, les choix sont facilement discutables.
La titularisation de Serge Aurier à l’aller avec les conséquences que cela entraîne sur l’image, Cavani sur les deux matchs, le banc de touche vide, les blessures mal gérées, le déambulateur de Thiago Motta, Trapp qui fait deux matchs à la Sirigu (comprendre « des buts sur lesquels il ne peut rien faire » ). Mais sur ces deux matchs, Laurent Blanc n’aura réussi aucun bon choix. Aucun. Mais Blanc est tributaire de ses joueurs. Au fond, à part Thiago Silva, et à un degré moindre Adrien Rabiot, les joueurs du PSG se sont ratés sur les deux rencontres. Un capitaine exemplaire sur le terrain, mais qui envoie un missile à son coach à la sortie du match – « Changer d’entraîneur ? Si je le pensais, je ne pourrais jamais le dire… » – et un gamin de 21 ans. Manchester City, que l’on a sans doute présenté trop tôt comme une équipe moyenne, n’a finalement jamais souffert contre le PSG. Et c’est peut-être ça le plus grave.
La grande lessive à venir ?
Forcément, des choix devront s’opérer cet été. Sur le onze aligné à City, trois joueurs arrivent en fin de contrat : Van der Wiel, Maxwell et surtout Ibrahimović. C’est fou et symptomatique de la gestion parisienne. Rejoueront-ils un match de LDC sous le maillot parisien ? Rien n’est moins sûr. Motta affiche bientôt 34 ans et n’a toujours pas de remplaçant désigné, David Luiz est bipolaire, Verratti vient de manquer trois des quatre derniers matchs de quarts de C1 du PSG, Cavani n’a jamais planté dans les six matchs de quarts qu’il a joués au PSG… Bref, il y a comme une fin de cycle au PSG. Le cycle Blanc-Motta-Ibra a-t-il un avenir ? C’est tout l’enjeu de l’été. Pour Blanc, c’est peut-être le coup de trop. Trois échecs de suite, surtout après avoir demandé et obtenu Trapp et Di María, c’est beaucoup. Beaucoup trop. Après tout, Manuel Pellegrini est en fin de contrat dans trois mois. José Mourinho est toujours sur le marché. Nasser Al-Khelaïfi a juré que « rien n’allait être décidé aujourd’hui » , mais l’été sera forcément chaud. En investissant autant, les patrons qataris ne pourront pas se contenter du top 8 pendant très longtemps. Le surplace est effrayant. À l’heure actuelle, le PSG doit opérer une vraie lessive.
L’équipe bâtie par Leonardo a posé les bases d’une escouade régulièrement présente dans le top 8 européen. Maintenant, il faut passer l’obstacle. Et faire peur. Pour ce faire, il faut trancher dans le vif. Thiago Silva, Marquinhos, Kurzawa, Rabiot, Verratti, Pastore ou Di María doivent jouer un rôle décisif dans la prochaine équipe. Les autres ne sont plus indispensables. Oui, tous les autres. Alors il faudra bosser, harceler les agents, bien vendre (Cavani, Matuidi, David Luiz, Aurier par exemple), dénicher des perles rares pour raccompagner Motta à la retraite et, surtout, aller chercher un homme de LDC devant. Un CR7, un Luis Suárez, un Neymar, un Thomas Müller. Un homme qui plante dans tous les grands matchs européens. Un homme dont la saison prend vraiment un sens à partir du mois de mars. Zlatan Ibrahimović est un immense joueur. À 34 ans, il aura joué à l’Inter, à la Juve, au Milan, au Barça et au PSG, pourtant il n’aura jamais vu la gueule d’une finale de C1. Les demi-finales ? Une seule fois. Avec le Barça de Guardiola. Et il s’était fait sortir par l’Inter, club qu’il avait quitté 9 mois plus tôt. Un chantier immense attend les Parisiens. De la même ampleur que lors du rachat par QSI. Il faut tout repenser et oser. Un mot inconnu. En attendant, il faut terminer la saison. Une fin de saison qui sera longue, quoi qu’il arrive… Et le PSG retrouvera la C1 en septembre prochain. D’ici là, il faut panser les plaies et se réinventer. Cette fois, c’est obligatoire.
Par Mathieu Faure