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Paris : le coup de la panne offensive ?
Flamboyante et inarrêtable en début de saison, l'attaque du Paris Saint-Germain marque le pas depuis plusieurs semaines. Avec cinq buts inscrits lors des cinq dernières journées de Ligue 1 avant de se rendre à Ajaccio ce vendredi, les Rouge et Bleu se contentent désormais de victoires étriquées et peinent à faire se lever les foules par leur jeu. Simple coup de moins bien ou difficultés structurelles pour la bande de Christophe Galtier ?
« Je ne pense pas que sur le match de Marseille, on ait été très prévisibles. On a eu beaucoup de situations et un peu de malchance. Le gardien a été élu parmi les meilleurs joueurs du match. Après, pour les matchs précédents, je vous rejoins, on a eu peu de situations. » Interrogé sur une possible prévisibilité de son équipe, dont résulteraient ses difficultés à marquer, Christophe Galtier n’a pas nié les questionnements sur le sujet en conférence de presse, à la veille du déplacement à Ajaccio. C’est un fait, depuis plusieurs rencontres, les champions de France ne sont plus autant en réussite dans la surface adverse. Avec vingt-trois frappes et presque trois expected goal, Mbappé et compagnie auraient pu faire trembler les filets de Pau Lopez à plusieurs reprises dimanche soir lors du Classique. Au lieu de quoi ils sont restés jusqu’au bout sous la menace des Phocéens.
Adaptation tactique et effet de surprise
Le 21 août dernier, toute la Ligue 1 prenait peur au soir d’une démonstration parisienne infligée à un LOSC dépassé (1-7). Dix-sept buts sur les trois premières journées et une impression de facilité : ce PSG version Christophe Galtier semblait parti pour régaler. Deux mois plus tard, le constat a quelque peu évolué. Si Paris n’a jamais quitté la première place de Ligue 1 et vient de remporter le match face à l’OM, la force de frappe offensive fait nettement moins peur. « Tactiquement, l’adversaire a travaillé depuis. Le match à Lille a été important aux yeux de tous les entraîneurs, personne n’a envie de passer à la moulinette comme ça, tente d’expliquer Guy Lacombe, ancien entraîneur du club de la capitale entre 2005 et 2007. Le match référence a été Monaco la semaine suivante. Ils ont trouvé une clé qui a permis à beaucoup d’autres d’étudier tout ça. Les adversaires ont bien modifié l’aspect récupération, défensif. »
Tactiquement, l’effet de surprise des débuts s’est donc estompé. Et au fil des semaines, les différences ont été plus difficiles à faire pour des offensifs parisiens, sur le pont tous les trois jours et de plus en plus sujets à la fatigue. « Ils ont du mal face à des adversaires regroupés à jouer un peu ce foot handball où il faut faire tourner le ballon, essayer d’aller chercher sur les côtés, faire basculer l’adversaire. On l’a vu contre Marseille, ils ont surtout été dangereux avec des contre-attaques », analyse de son côté Tripy Makonda, ancien défenseur du club, qui voit d’un bon œil le changement de système.
Seuls au monde
Le premier but officiel au club de Nuno Mendes, le 3 septembre dernier à Nantes, reste toujours le dernier pion inscrit par un autre joueur que Neymar, Messi ou Mbappé. Soit neuf rencontres toutes compétitions confondues au cours desquelles Paris ne s’est appuyé que sur trois hommes – aussi voraces soient-ils – pour noircir le tableau d’affichage. « Je ne veux pas dire qu’il y a un manque de projection. Hakimi, Nuno Mendes ou Vitinha sont souvent dans la surface, mais la plupart du temps, ils recherchent l’aimant Messi dans la surface. Même si tu es en bonne position, tu as envie de faire croquer l’un de tes meilleurs joueurs », décrit Makonda pour expliquer ces statistiques en berne autour de la MNM. D’autant que les offensifs appelés à se disputer les miettes de temps de jeu restantes ne brillent pas. « Sarabia a fait une très bonne saison au Sporting, mais le championnat portugais n’est pas le même que la Ligue 1. Peut-être aussi que psychologiquement, il ne s’attendait pas à rester, poursuit-il. Soler, c’est une arrivée surprise, même lui je pense qu’il ne savait pas qu’il allait venir. »
Dans ce contexte, difficile de ne pas s’appuyer presque exclusivement sur la triplette magique. « Tu as trois monstres devant, même moi si je suis coach, je ne pense pas que je les ferais tourner, déroule Makonda. Tu le vois quand Galtier dit : « J’ai discuté avec un des trois pour savoir s’il pouvait tenir sa place. »C’est rare que l’entraîneur discute avec ses joueurs pour savoir s’ils vont être sur le banc. Tu as des coachs qui ne demandent pas l’avis des joueurs, là tu es un petit peu obligé de faire preuve de pédagogie avec eux. » Guy Lacombe abonde : « Tout le jeu est fait pour les trois de devant. Les gars qui entrent n’ont pas autant de poids qu’ils devraient avoir. Être suppléant, entrer et être efficace, ce n’est pas donné à tout le monde, ce sont des garçons habitués à être titulaires. » L’un d’eux aura forcément sa chance en Corse, Neymar étant cloué à Paris pour accumulation de cartons jaunes.
Quelle recette pour le succès ?
Alors quitte à s’en remettre à la réussite de sa MNM, comment Paris peut-il optimiser les qualités de chacun de ses trois membres, sans que l’un d’entre eux ne se sente dénigré ? Une équation à solutions multiples, mais particulièrement complexe à résoudre. « Par rapport à leurs qualités intrinsèques, on reste un peu sur notre faim, reconnaît Makonda. Mais par exemple Neymar travaille énormément pour le collectif. On sait que quand il est fatigué, il manque d’efficacité devant le but, comme contre l’Atalanta lors du Final 8. » Le Brésilien est clairement le plus concerné des trois par l’équilibre collectif, évoluant à plusieurs reprises un cran plus bas pour laisser le champ libre à Mbappé. « Avec le 4-4-2 losange, Neymar brille plus dans la dernière passe et Mbappé en étant sur le côté gauche. Il est vrai que quand tu as trois joueurs qui veulent jouer dans leur zone préférentielle, à un moment dans ta tactique tu es obligé d’en sacrifier un », concède l’ancien défenseur.
Il le répète à l’envi à chaque prise de parole devant la presse, Christophe Galtier est encore à la recherche de la formule magique. « Puisqu’ils ont changé de système, ils vont être imprévisibles, les entraîneurs n’auront pas le temps de travailler comme ils l’ont fait quand ils jouaient à trois derrière », veut croire Makonda. Guy Lacombe, lui non plus, ne se montre pas particulièrement préoccupé. « Une saison, c’est une construction d’un être, on passe par des étapes d’adolescence, de maturité et ainsi de suite. L’équipe apprend, indéniablement. On ne peut pas dire que la situation soit dramatique. Ce sont simplement de petites choses, mais moi je pense que ça fait partie de la construction d’une grande équipe. Il faut savoir passer par des passages comme ça, la performance, c’est en février, en mars et en avril. » Mais pour réussir les examens de fin d’année, il vaudrait peut-être mieux commencer à réviser dès à présent.
Par Tom Binet
Tous propos recueillis par TB, sauf ceux de Christophe Galtier.