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MU-Tottenham, les mots croisés
Opposés en demi-finales de FA Cup samedi, José Mourinho et Mauricio Pochettino n'abordent pas la rencontre avec les mêmes objectifs. Avant tout car la FA Cup n'a pas le même rôle à leurs yeux.
Pourquoi changer de disque ? De passage à Bournemouth mercredi soir, où son Manchester United s’est envoyé une troisième victoire consécutive à l’extérieur (0-2) grâce notamment à une « super performance » d’un Paul Pogba saisi à feu très vif lors des 72 heures précédentes – lors de la défaite face à West Bromwich dimanche dernier (0-1), le Français a une nouvelle fois déçu et a été bousculé indirectement par son coach –, José Mourinho avait de nouveau décidé de victimiser son équipe. La technique est ancienne, et le Portugais oublie rarement d’actionner le levier. L’objectif ? Raconter, ce qu’il faisait souvent déjà à Chelsea, qu’il est en période de construction, qu’il ne peut pas gagner aujourd’hui, qu’il est sur la bonne voie et qu’il gagnera demain. En d’autres termes : ne m’emmerdez pas, je sais ce que je fais et vous allez voir ce que vous allez voir. Bah quoi, son CV parle pour lui, non ? « Je sais comment gagner un titre, a de nouveau répété Mourinho cette semaine, au Vitality Stadium. J’ai gagné huit championnats dans quatre pays différents, dont trois ici, en Angleterre (avec Chelsea en 2005, 2006 et 2015, N.D.L.R.). Donc je sais aussi pourquoi on gagne et pourquoi on ne gagne pas. » Quelques jours plus tôt, à Old Trafford, il avait déjà tapé dans ce sens : dans l’approche, Mourinho, c’est l’anti-Zidane. Si l’équipe perd, c’est avant tout de la faute des joueurs car l’entraîneur, lui, a fait le nécessaire. Oui, c’est tactique et avec lui, ça l’a toujours été : cette saison, on a retrouvé le vrai José Mourinho, celui qui sourit comme on dit « vous êtes incapables de m’abattre » , dans la défaite comme dans la victoire. L’insolence se dégaine alors comme on ouvre un parapluie.
Le prix de l’inconstance
Samedi, c’est avec une mâchoire toujours aussi serrée que le technicien portugais débarque à Wembley pour disputer une demi-finale de FA Cup face à son ami Mauricio Pochettino, coach qui a déjà annoncé qu’une victoire dans la compétition « ne changerait pas sa vie » . Un drôle de message ? Non, là aussi, une vieille technique, l’Argentin n’accordant qu’une importance partielle aux coupes nationales. « Si l’on remporte le championnat ou la Ligue des champions, là, on pourra dire que l’équipe a franchi un palier. Gagner une FA Cup ou une League Cup, ce serait fantastique pour les supporters, mais ce n’est pas l’objectif. » Que faut-il en déduire ? Qu’il y a du bluff, forcément, dans cette histoire : en réalité, cette FA Cup est la seule source de motivation dans une fin de saison où Manchester United et Tottenham tiennent déjà leur qualification pour la prochaine C1 entre les doigts. Et alors ? Cette demi-finale sent l’échec, surtout, les deux équipes ayant été dégagées de la Ligue des champions dès les huitièmes de finale et ayant été lâchées dans la course au titre par inconsistance. Ce qu’a dit Mourinho cette semaine à ses joueurs : « C’est ce qui me frustre le plus : on a été trop souvent irréguliers dans notre attitude. Si l’on regarde bien, on n’a perdu aucun point face aux équipes du top five puisqu’on a battu City une fois et ils nous ont battus une fois, pareil contre Tottenham et Chelsea, et on a gagné une fois contre Liverpool et fait un nul. Mais on a perdu contre Huddersfield et Newcastle. Et on a perdu des points face à des équipes qui vont probablement être reléguées. C’est de l’irrégularité dans l’approche. Et on en a payé le prix. »
Le laboratoire de Mourinho
Mourinho n’a pas tort et ces mots résument aussi la saison d’un Tottenham qui reste sur sept défaites consécutives en demi-finales de FA Cup et qui peine à arracher son étiquette de loser magnifique. Alors, pourquoi regarder cette rencontre ? Pour voir autre chose : samedi, c’est bien un révélateur pour l’avenir, notamment celui de Manchester United. Cette semaine a ce poids car Mourinho a mis ses joueurs face au défi après la défaite face à WBA dimanche dernier en expliquant ne « pas faire ses compos en fonction de l’investissement réalisé sur un joueur, son salaire ou sa belle gueule » . Mais plutôt de l’investissement du joueur lui-même. En ça, Pogba a répondu avec autorité mercredi à Bournemouth, endroit où Ander Herrera semble aussi avoir gagné sa place pour jouer la demi-finale. Puis, José Mourinho retournera au laboratoire, où son board a décidé de lui laisser toute latitude l’été prochain : ainsi, on pourrait voir partir Blind, Fellaini, Shaw et bien d’autres. Voilà à quoi sert cette demi-finale : à répondre aux questions individuelles, mais aussi à prouver qu’après les annonces, Mourinho doit gagner quelque chose. Ce à quoi Pochettino doit répondre en prouvant qu’il sait, lui aussi, gagner, et ce, alors que Tottenham reçoit dans un Wembley où il a évolué toute la saison. Il faut désormais transformer les maux en actes.
Par Maxime Brigand