L'école ou le foot ?
Ces performances-là, de la part d’un parfait inconnu, personne ne les attendait. Sauf peut-être Habib Sesay, le président de l'Eze All Star’s FC, club amateur où Kamara est arrivé à l’âge où les premiers poils poussent sur le menton : « Je le connais depuis qu’il a 13 ans, je savais de quoi il était capable, donc je ne suis pas surpris. Il était certain que son moment viendrait » . Pourtant, le football n’a pas toujours été une évidence pour Mohamed Nbalie Kamara. « À l’époque, il n’avait que l’école et le Coran dans sa vie, car ses parents ne voulaient pas qu’il aille jouer dans un club. Ils désiraient plutôt qu’il se tourne vers les études. Mais je leur ai parlé et je les ai convaincus de lui laisser une chance. Sa passion pour le jeu les a aussi influencés ! » , se rappelle Sesay.

Kamara est décrit comme un homme très calme par son président actuel. Mais le patron du club amateur présente aussi un garçon transcendé par la perspective de garder ses buts inviolés : « Il ne veut pas encaisser le moindre but ! Il se met très en colère auprès de ses défenseurs quand cela arrive. Que ce soit à l’entraînement ou en match » . Une sorte d’instinct de survie qui se déclenche une fois les gants enfilés. Là où les deux chefs s’accordent, c’est concernant le caractère du bonhomme et sa rigueur particulièrement remarquable. « C’est un de mes garçons préférés dans le club. Il est très discipliné. Il sera le premier à arriver à l’entraînement et le dernier à repartir. Il n’est jamais absent. Je l’aime beaucoup » , s’exclame Navo Jr. De quoi en faire le chouchou du boss, un statut qu'il a aussi certainement obtenu en menant l'East End Lions FC au titre de champion en 2019. « C’était sa première saison avec nous. En 26 matchs, personne ne nous a battus » , exulte-t-il. Depuis, le championnat de Sierra Leone n’a plus couronné de champions à cause de la pandémie.
« C’est un grand fan d’Arsenal ! Il a pris ce surnom tout seul. Il a toujours aimé faire les choses comme le faisait Fabiański. Donc tout le monde s’est mis à l’appeler comme ça. » Habib Sesay
Arsenal et Fabiański
Véritable coqueluche de ce début de CAN, son surnom a largement contribué à sa popularité. Parmi tous les grands gardiens que cette planète a abrités, le Sierraléonais a choisi le Polonais Łukasz Fabiański. Pourquoi ? « C’est un grand fan d’Arsenal ! Il a pris ce surnom tout seul. Il a toujours aimé faire les choses comme le faisait le Polonais. Donc tout le monde s’est mis à l’appeler comme ça » , explique Habib Sesay. Au point où ses amis l’appellent davantage Fabiański que Mohamed. Comme l'actuel portier de West Ham, Kamara rêve de rallier le Vieux Continent et ses beaux billards. « On n’a pas de très bons terrains en Sierra Leone. Globalement, ils sont très mauvais, ce qui rend le travail des gardiens encore plus difficile. S’il a l’opportunité de jouer sur de bons terrains, il sera encore meilleur » , prédit son ancien président.
D’autant plus que les conditions d’entraînement n’ont pas forcément évolué depuis qu’il a rejoint le plus gros club du pays. « On s’entraînait au centre du gouvernement à l’est de Freetown, mais le terrain est très mauvais et dangereux puisqu'il y a des cailloux. Depuis un an et demi, on s’entraîne sur le terrain de la fédération de la Sierra Leone. Ce n’est pas le meilleur, mais c’est mieux » , détaille Navo Jr. Comme pour beaucoup de portiers du continent, l’herbe n’est pas une option, c’est un luxe. Mais ce n’est pas grave, puisque « ça le rend encore meilleur » , selon le PDG de l'East End Lions FC. D’ailleurs, Kamara pourrait bientôt ne plus être un joueur du mastodonte national. Pas moins de neuf clubs sont déjà venus à la pêche aux renseignements afin d’enrôler le portier des Leone Stars. Et s’il venait déloger son idole chez les Hammers ?

Par Léo Tourbe Tous propos recueillis par LT
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