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Mal au crâne

Par Mathieu Faure et Florian Cadu
Mal au crâne

La nouvelle formule à 24 nations est un bordel sans nom. Entre les temps de récupération entre deux matchs, les meilleurs troisièmes, les calculs savants, le niveau de jeu bidon, ce premier tour de l’Euro n’est pas une franche réussite.

Lundi dernier, à Clairefontaine, Yohan Cabaye s’est trouvé bien emmerdé quand on lui a demandé de donner son point de vue sur les adversaires potentiels des Bleus en huitièmes de finale de l’Euro. À ce moment, la France était déjà qualifiée et assurée de terminer première de son groupe. À ce moment, les Bleus avaient neuf adversaires potentiels. Une broutille, quoi. Alors le joueur a botté en touche, confirmant à demi-mot qu’il ne savait pas trop comment fonctionnait la nouvelle formule et que personne autour de lui n’avait réussi à lui simplifier la chose. C’est simple, les Bleus devaient jouer un troisième de groupe. Celui du groupe C. Ou D. ou E. En début de tournoi, l’UEFA avait mis à disposition de la presse un tableau bourré de combinaisons possibles pour les huitièmes de finale. Un bordel. Sur 24 équipes, 16 seront donc encore en lice « en deuxième semaine » . En gros, il aura fallu une trentaine de matchs pour sortir huit équipes de la compétition. Très pratique. Et comme le sort fait bien les choses, les Bleus – premiers qualifiés – rencontreront en huitièmes de finale l’Éire, qui se trouve être la dernière équipe qualifiée pour le tour à élimination directe. Pendant trois jours, la France n’a jamais su quel était son prochain adversaire. L’Irlande du Nord a tenu la corde, puis la Belgique, puis l’Éire. L’Éire qui aura donc trois jours de récupération de moins pour préparer son match. Brillante formule.

Et ce n’est pas tout. Cette nouvelle formule souffre d’un problème de cadence. Les Bleus ont joué leurs trois matchs de poule en dix jours, un rythme plutôt intense. Maintenant, les Bleus ont eu une semaine entre leur dernier match de groupe et le huitième de finale, et il faudra encore attendre une semaine entre le huitième et le quart. Soit un rythme de Coupe du monde de rugby, celle qui s’étale sur 8 semaines… Pis, la demi-finale et la finale, elles, s’étalent sur quatre jours. Cohérence ? Nulle part. Soit la compétition est intense et tout se joue à trois jours d’intervalle, soit c’est fait en sorte de garder les joueurs frais et on reste sur un rythme de championnat (un match par semaine). L’UEFA n’a pas tranché et a tout mixé. Au final, on s’est un peu ennuyé sur ce premier tour à de rares exceptions près (Croatie-Espagne, Italie-Belgique et Portugal-Hongrie).

Le spectacle était en tribunes

Le seul avantage de ce nouveau schéma, c’est l’ambiance mise par les équipes qui ont moins l’habitude de fréquenter les phases finales : les deux Irlande, l’Islande, l’Albanie, la Hongrie. Ces équipes-là auront été les révélations « de la rue » , de cet Euro. Certains pour leur humour (les hommes en vert), d’autres par leur dégaine de bodybuilders rasés aux bras musclés et parfois trop tendus (la première ligne hongroise). Mais la joie et la folie qui émanent des tribunes n’ont eu aucun écho sur le pré. Normal, on peut se permettre de calculer dès le deuxième match. Il y a même des équipes qui, comme la Turquie, présentaient zéro point et une différence de but de « -4 » après deux matchs et qui pouvaient, pourtant, encore espérer se qualifier en huitièmes. Ce manque de lisibilité a aussi son effet pervers. Les supporters albanais présents en France, par exemple, ont dû attendre de longues journées avant de savoir s’ils pouvaient faire leur valise.

Devant ce constat, Michel Platini (qui est à l’origine de cette nouvelle organisation) peut-il se féliciter ? En matière de niveau de jeu offert sur la pelouse, la réponse est non. Car les petites nations qu’il chérit tant ont un cerveau et ont bien compris l’astuce. Quatre points étant largement suffisants pour se qualifier, les défenses ont pris le pas sur l’attaque. Un nul est alors considéré comme un bon résultat, et une défaite d’un but contre le favori du groupe peut également représenter une belle affaire. Le Portugal, qui se qualifie avec trois nuls et se permet de jouer la montre lors de son dernier match de poule, c’est pas joli joli. La Slovaquie qui débute toutes ses parties dans l’idée de repartir avec un 0-0, ce n’est pas très beau non plus.

Une histoire de calculs

« Dans ce tournoi, le troisième a quatre chances sur six de faire partie des meilleurs troisièmes, soit environ 66 % de chances de passer, rappelle Raphaël Raymond, président et organisateur du Tournoi Sans Frontière (qui réunit les meilleures équipes de jeunes d’Europe) depuis de nombreuses années. Nous aussi, on utilise le système des meilleurs troisièmes, mais seulement deux sur cinq passent, ce qui diminue la probabilité de qualif’ en tant que meilleur troisième à 40 %. Et psychologiquement, quand cette probabilité est plus faible que 50 %, les joueurs se disent que ça ne vaut pas le coup de viser cette place. Résultat : dans notre compétition, les équipes jouent l’offensive et ne se contentent pas du nul. » Voilà qui explique la moyenne de but très faible de l’Euro : 1,8 but par match. Soit le score le plus faible depuis l’Euro 1996.

Et voilà qui explique pourquoi les raclées ont été rares et les scores serrés, les favoris ne pouvant pas compter sur des petites équipes joueuses, même quand celles-ci étaient menées. Or, comme le rappelle Raphaël Raymond, « ça fait déjà deux ans qu’on s’emmerde avec des éliminatoires chiants à mourir. Mais en réalité, il n’y a pas eu d’écrémage. Conséquence : l’Euro va commencer en huitièmes de finale. Il faudrait presque des têtes de série pour la phase finale une fois les poules achevées avec ce système-là. » Dès lors, la question se pose : un schéma sans huitième, avec directement des quarts de finale, n’aurait-il pas favorisé une phase de groupes plus sexy ? Les six premiers de groupe étaient qualifiés ainsi que les deux meilleurs deuxièmes. On était dans la compétition d’entrée. Une semaine de moins au calendrier, aussi, n’aurait pas été une mauvaise idée. Cela aurait évité de faire retomber le soufflé après un premier tour intense. « Je ne sais pas à quel moment les dirigeants de l’UEFA ont arrêté les mathématiques, ironise encore Raphaël Raymond. Mais ce n’est quand même pas dur de comprendre que qualifier une majorité des meilleurs troisièmes, c’est qualifier des équipes qui n’ont pas la moyenne. À partir de là, le sport n’est pas respecté. J’invite l’UEFA à venir l’an prochain au Tournoi Sans Frontière pour voir comment ça se passe. »

On se retrouve un peu dans le vide au moment d’attaquer la phase la plus intéressante du tournoi. Il y a 30 ans, l’Euro se disputait à huit pays. Ce n’était ni mieux ni moins bien, c’était plus vivant. Aujourd’hui, l’UEFA compte 55 membres, quasiment la moitié est représentée à cet Euro. C’est énorme. On avait souvent coutume de dire que les championnats d’Europe étaient plus relevés qu’une Coupe du monde. Or, en ouvrant autant, on a perdu de cette excellence au profit d’une rentrée d’argent plus conséquente (plus de matchs dit plus de billets dit plus de consommation, etc). Après, on est peut-être devenu des petits cons, aussi. Des enfants pourris gâtés. Peut-être que nous bouffons trop de football durant la saison, trop de Ligue des champions, trop de Liga, trop de ballon. Alors un Euro à 24, de quatre semaines, après dix mois intensifs de football, c’est l’indigestion assurée, surtout quand on s’envoie un superbe 0-0 en prime time. Le degré d’exigence est sans doute trop élevé. Mais force est de constater que la France s’apprête à affronter un troisième de poule en huitièmes de finale de l’Euro avant, pourquoi pas, d’aller défier un deuxième de poule en quarts de finale. Dire qu’en 2020, la formule restera la même, mais l’Euro se jouera dans 13 pays différents… De Bakou à Copenhague en passant par Bilbao et Glasgow.

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