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Mais qui es-tu, l’animation offensive des Bleus ?

Par Markus Kaufmann
Mais qui es-tu, l’animation offensive des Bleus ?

Au contraire de l'idéologique « philosophie de jeu » ou encore de la mystérieuse « identité de jeu », l'animation offensive est concrètement analysable. On peut la définir, l'observer, la classer et en tirer des conclusions objectives. Du fait de la pauvreté de la création hondurienne, analyser les enjeux tactiques du premier match des Bleus au Brésil revenait de fait à analyser les méthodes de la créativité française. L'occasion d'apprécier la diversité des armes de cette équipe de France, et ses limites.

Pour définir l’animation, le Larousse nous parle d’ « action de mettre de la vivacité, de l’entrain dans quelque chose » et d’ « ensemble des moyens et méthodes mis en œuvre pour faire participer activement les membres d’une collectivité à la vie d’un groupe » . Faire vivre une action collective, en somme. Logique, puisque le mot latin animatio signifie donner la vie, inspirer. L’animation offensive, c’est donc l’ensemble des moyens et méthodes utilisés par une équipe pour donner vie à des actions offensives. D’une part, il s’agit d’impliquer toute l’équipe pour l’attaque, et non pas seulement le secteur offensif. D’autre part, l’emploi du mot « méthode » implique donc une notion d’organisation, de stratégie, de tactique… En clair, comment les Bleus organisent-ils leurs attaques ?

Dans la salle des machines…

Pour optimiser l’organisation de son animation offensive et répéter le plus souvent possible des situations travaillées à l’entraînement, il faut avant tout être capable d’organiser sa possession de balle. Avec 71% de possession et 91% de passes réussies, les Bleus sont parvenus à se défaire du défi physique du Honduras, mais surtout après l’expulsion de Palacios. C’est le défi de Deschamps : trouver un équilibre et hiérarchiser les rôles de trois milieux dont la qualité naturelle est de relayer. Alors que Cabaye a gagné le rôle de gestionnaire du milieu (84 ballons touchés pour 78 passes données), Pogba est plus libre, plus haut, mais très – trop ? – appliqué (59 ballons pour 53 passes). Enfin, Matuidi fait de tout : de la gestion et du risque (94 ballons touchés, 81 passes), mais aussi des percées et une énorme participation aux abords de la surface (une barre sur corner, un tir au point de pénalty, une frappe lointaine).

Alors qu’il joue dans un fauteuil au PSG – la possession étant assurée par le trio Motta-Verratti-Silva – Matuidi doit faire de tout pour Deschamps. Un joueur qui rend la logique des systèmes complètement idiote : quand Blaise offre ses pieds à la possession, Pogba se place entre les lignes et la France se transforme en 4-2-3-1 ; quand il propose une percée côté gauche, on est plus proche du 4-1-4-1 du Bayern, avec Cabaye seul derrière. L’un des défis Bleus sera donc de savoir défendre les phases de transition. Si la France avait dû affronter les Pays-Bas de Van Gaal, Deschamps aurait-il préféré Mavuba à Cabaye ? Enfin, Mathieu Valbuena est logiquement l’attaquant qui participe le plus à l’organisation des attaques, avec deux fois plus de ballons touchés que Griezmann au bout de 78 minutes.

Le jeu long de Cabaye

Si les nombreuses victoires du football espagnol ont fait croire qu’il n’existait qu’un seul « bon » football, le jeu long séduit encore. Pour deux raisons : sauter des lignes rapidement pour profiter en transition de la désorganisation de la défense adverse, ou alors pour mettre le ballon dans la surface adverse sans passer par les côtés. Les Bleus de Deschamps l’utilisent dans les deux situations, grâce au pied droit de Cabaye. Et c’est ainsi que la France a créé ses deux premiers buts. Sur le premier, les blancs ont perdu leur marquage après un corner, les bleus sont nombreux dans la surface, et Cabaye cherche Pogba. Sur le deuxième, Cabaye lit superbement la relance hondurienne, intercepte et sert immédiatement Benzema au deuxième poteau. On est là dans la première situation : balle perdue, désorganisation, attaquant libéré. Cela fera deux passes décisives non comptabilisées pour le milieu parisien.

Et ce n’est pas un hasard : en match amical, Cabaye a systématiquement cherché le torse ou la tête de Giroud – ou la tête de Debuchy – après une récupération, alors que la défense adverse se replaçait. Le rapport de force est évident : la défense se replace en reculant, tandis que Giroud va dans le sens du but. Le Brésil a aussi utilisé cette méthode contre la Croatie, par l’intermédiaire de Thiago Silva et David Luiz. La formule permet de maintenir une pression constante sur l’adversaire avec de la présence dans le camp adverse – comme Mourinho l’a appris à Blanc au mois de mars – mais implique de jouer contre un bloc bas. La France utilise donc les longs ballons après une interception dans le camp adverse, ou sur un corner mal dégagé. Enfin, Deschamps ne gaspille rien : la faculté de Matuidi et Pogba à gagner leurs duels lui offre un grand nombre de seconds ballons.

Les mouvements du trio offensif

On dit souvent que les systèmes ne veulent rien dire. La preuve : Deschamps pourrait nous faire croire qu’on joue en 4-3-3, en 4-1-4-1 ou en 4-3-1-2, on trouverait des arguments pour valider les trois systèmes. La vérité, c’est que certains joueurs sont destinés à évoluer dans une zone précise du terrain, et que d’autres ont la mission de se déplacer, permuter, faire évoluer le schéma. Sur le papier – et sur de nombreuses phases de jeu – il y a Benzema dans l’axe, Griezmann à gauche, et Valbuena à droite. Mais dans le jeu, la France a pu voir Valbuena dans l’axe, loin au milieu de terrain, Benzema à gauche, et même Griezmann à droite. Pour donner de la vie au ballon, Deschamps aime les permutations, et l’option Griezmann lui permet d’avoir une rotation complète, sur la largeur (changement de côtés), mais aussi sur la longueur, avec un numéro 11 capable d’aller prendre la profondeur ou de mettre une tête sur la barre en position de numéro 9, et un Benzema capable de revenir dans le cœur du jeu pour donner de l’accélération ou simplement lâcher son marquage.

La diversité des armes des Bleus autour de la surface est impressionnante : le jeu en pivot de Benzema, le petit jeu rapide de Griezmann et Valbuena, les incursions de Matuidi, les déviations de Giroud, les frappes lointaines attendues de Pogba et Cabaye… La liberté des mouvements des trois attaquants alliée à la flexibilité du milieu des Bleus donne une impression d’imprévisibilité séduisante. Puisque Valbuena et Griezmann sont plus des milieux de l’intérieur que des ailiers de débordement, ils permettent de profiter pleinement de la verticalité de Matuidi (et Pogba, donc on attend plus de liberté) et des montées des latéraux. C’est dans ce rôle de distributeur que Valbuena et sa mobilité sont merveilleux pour Deschamps, et le bordelais l’a une nouvelle fois démontré face à une formation pourtant intimidante physiquement. Enfin, le changement Giroud-Valbuena nous aura permis de voir Griezmann dans un autre rôle, entre les lignes, même si l’on attend plutôt Valbuena dans cette position.

Le retour des centres et l’inconnue défensive

C’est la très bonne nouvelle du 3-0 : la France a retrouvé des combinaisons naturelles sur les côtés. Et si les centres ont été mauvais en première période, la deuxième mi-temps et les matchs amicaux ont montré des Bleus capables de faire mal à la surface adverse sans avoir à inventer des numéros devant la surface. C’est là que le 4-3-3 fonctionne le mieux, avec le jeu en une touche de balle de Griezmann, Valbuena et Pogba, qui permet à Évra et Debuchy de se montrer dangereux (les deux auront touché 82 et 77 ballons). En tout, Valbuena, Debuchy, Évra et Griezmann auront respectivement tenté 11, 8, 7 et 4 centres. Et si ça marche, c’est parce que les Bleus ont de la présence dans la surface. Hier, si Giroud aurait pu créer encore plus d’espaces, la seule présence de Benzema aura suffi. En plus d’avoir évolué comme un vrai 9 sur les deux derniers buts, Benzema aurait pu même mettre un autre but des six mètres.

La diversité des ressources offensives françaises, qui impliquent huit joueurs sur onze, promet donc de belles prestations contre les formations regroupées. Mais l’on peut se demander si ce onze pourrait évoluer contre une équipe plus entreprenante, notamment au milieu. C’est le problème majeur de l’expression « animation offensive » : l’exclusion de la phase défensive, comme si l’on devait distinguer l’animation offensive de la rigueur défensive. Alors, la défense serait destinée à rester figée, sans inspiration ? Il y aurait d’un côté la défense solide et le défenseur sérieux, et de l’autre l’attaque créatrice et l’attaquant artiste ? Bien sûr que non, et ce n’est pas un hasard si l’Argentine n’a pas gagné de titre depuis 21 ans. Pour aller loin, la France devra savoir donner vie à sa défense, et le match contre la Suisse nous en dira certainement plus sur sa maîtrise de ce secteur du jeu.

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Par Markus Kaufmann

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