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Lille au feu vert
Leaders de Ligue 1, finalistes de la Coupe de France, football le plus flamboyant de l'Hexagone, pizzas dans les vestiaires : les Lillois sont bien, mais n'ont encore rien gagné. Comment tout perdre ou tout gagner, en une semaine : mode d'emploi.
Le LOSC a grandi. Fini « Lille aux enfants », son football léché, ses victoires au panache et ses sorties médiatiques hésitantes. La culture du jeu a laissé place à la dictature de l’efficacité et les succès étriqués ont pris le pas sur les humiliantes démonstrations. Si l’on omet sa probante victoire face à Arles-Avignon 5 à 0 lors de la 33ème journée, le LOSC version 2011 roule sur le mode « victoires aux forceps » loin de la balade des gens heureux. Un constat qui demeure somme toute logique. Difficile de faire mieux qu’excellent. Le Lille 2010, meilleur cru du domaine Ligue 1 depuis des lustres, était simplement plus savoureux que sa version mise en bouteille en 2011. Loin d’être une piquette, la version 2011 pâtit simplement du fait qu’il était impossible pour Rudi Garcia de faire une meilleure récolte.
Un contexte difficile en deuxième partie de saison explique largement ce changement de politique et de personnalité du club de Michel Seydoux. Une lutte pour le maintien XXL, des enjeux à tous les étages, une réputation qui n’est plus à faire, autant de faits qui rendent les matches de fin de saison difficiles et qui justifie le coup de mou du LOSC. Un trou noir symbolisé par une véritable période de disette, trois matches sans victoire face à Monaco, Lorient, puis Bordeaux, et des victoires à l’arrachée, et sans la manière, face à Brest ou plus récemment, Nancy. Une baisse de régime que les Nordistes ne paient pas cash, notamment grâce à l’irrégularité soudaine de Marseille, et au faux-départ de Lyon. Bien engagés pour rafler leur premier titre de Champion de France depuis 1954, les Lillois n’en demeurent pas moins prudents : « On a encore rien gagné » confiait Rudi Garcia à L’Equipe. Plus que de la langue de bois ou de l’hypocrisie protectrice, c’est la stricte vérité qui sort ici de la bouche de l’entraîneur lillois. Une vérité qui traduit une certaine peur. Une peur de jouer sa saison sur une semaine.
Un titre à tout prix
Le sprint final du LOSC commence donc à Saint-Etienne, ce soir. Geoffroy-Guichard, première étape d’une fin de saison difficile pour les Dogues, qui les verra affronter le PSG, à deux reprises, Sochaux et Rennes. Avec quatre points d’avance sur l’OM à quatre journées de la fin, la volonté de se focaliser sur la finale de la Coupe de France face aux Parisiens pourrait presque paraître légitime. L’obsession du trophée, le désir, pour cette génération dorée lilloise, de bonifier cette belle saison en gagnant un titre, autant de raisons pour occulter le championnat le temps d’une 35ème journée. Une probable erreur que Rudi Garcia tente d’éviter, en évoquant avec ses joueurs la nécessité de garder la tête sur les épaules : « On va continuer à ne s’occuper que du match qui vient, de nos propres performances et résultats. On a occulté la finale de notre esprit. Ce serait très mal la préparer que de ne pas penser à demain (mardi) et au Championnat » . Prendre les matches les uns après les autres : maxime célèbre du football, aussi efficace qu’hypocrite. Car au fond, l’idée est bonne, mais il est impossible pour des joueurs qui, pour la plupart, n’ont jamais rien gagné, de s’ôter de la tête la perspective d’un magnifique doublé. Un doublé qui passera par une victoire samedi, à Saint Denis en finale de Coupe de France contre Paris, mais qui également par une victoire dans le Chaudron vert. Non, à cette période de l’année, inutile de parler de match nul. Pour le LOSC comme pour l’OM, la victoire est impérative : « Si on fait une contre-performance à Saint-Etienne et que Marseille gagne son match… » . Bah les Marseillais reviendront à deux points, voire un. Loin d’être inquiet, Rudi Garcia justifie ici sa politique de l’autruche et sa volonté de ne pas se projeter.
Balmont : « Bien en leaders »
Un message reçu cinq sur cinq par ses ouailles, notamment par Florent Balmont : « On est bien dans cette position de leader. On y prend goût aussi mais il n’y a pas trop d’euphorie dans le vestiaire car on sait que ça peut aller vite, raconte Balmont. Pour le moment, on est sur les deux tableaux. Le prochain match, c’est Saint-Étienne. Il est bien qu’il y ait une rencontre comme celle-là avant samedi. Ça nous permet d’éviter de trop penser à la finale » . Le problème n’est pas de penser à la finale. Car l’idée de se retrouver en short sur la pelouse du Stade de France en fin de saison n’a jamais dérangé un footballeur. Le problème pour les Lillois, c’est que contrairement aux Marseillais, ils n’ont encore rien gagné. C’est donc une peur de la copie blanche qui pourrait plomber les Lillois en fin de saison. Avec quatre points d’avance, le matelas est presque aussi confortable que le calendrier est compliqué. À quatre journées de la fin et avec trois périlleuses rencontres à suivre, ne pas s’imposer à Saint-Etienne reviendrait, presque, à se tirer une balle dans le pied. Une plaie dans laquelle le PSG saura remuer le couteau qu’il a entre les dents.
Swann Borsellino
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