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Lewandowski, un looping dans l’histoire

Par Markus Kaufmann
Lewandowski, un looping dans l’histoire

Au cœur de l'Allianz Arena, devant un public habitué mais jamais fatigué par les avalanches de buts, Roberto Lewandowski, le Bayern Munich et Pep Guardiola ont créé un morceau d'histoire de neuf minutes mardi soir.

Retour des vestiaires. Les Loups mènent un but à zéro et ne sont pas passés loin de doubler la mise lorsqu’un tacle manqué de Manuel Neuer dans la moitié de terrain adverse s’est transformé en obus brossé de Josuha Guilavogui. Là, déjà, l’histoire avait failli se dérégler, nous offrir un moment à la Florenzi et couper un peu plus les ailes des goals volants modernes. Mais le moment n’était pas encore venu. L’histoire préparait quelque chose d’encore plus grand. Et plus tard, elle allait nous offrir sur un plateau ce moment magique où elle semble rembobiner, puis accélérer frénétiquement, comme si elle subissait un bug spatio-temporel. Une erreur dans la matrice. Une faute de frappe dans le scénario originel. Un looping dans le vol longiligne du temps qui coule. En première période, la frappe du Français est passée à côté, et l’histoire – cette vilaine et capricieuse sorcière – a préféré attendre patiemment la mi-temps et l’entrée en jeu de Robert Lewandowski pour nous envoyer en l’air.

Piste de ski et Balotelli

On joue la 51e minute, et Lewandowski n’a touché que deux ballons. Philipp Lahm déséquilibre la défense adverse d’une passe en profondeur. Arturo Vidal l’agenouille d’une talonnade en mouvement. Thomas Müller ramasse l’épée et la lance quelque peu maladroitement à Robert Lewandowski, qui tranche une première fois la tête de Wolfsburg. Le chronomètre affiche 50 minutes et 39 secondes de jeu, et Wolfsburg n’encaissait pas de but depuis 471 minutes. Trois ralentis et une centaine de consignes guardiolesques lancées dans la tête de Boateng après, soit exactement une minute plus tard, le ballon vole innocemment dans le ciel munichois. Mais l’histoire est décidée : un Rouge gagne le duel aérien, et personne n’arrête ce ballon téléguidé vers les pieds du numéro 9. Sur ce même but de la gauche, mais cette fois-ci de l’extérieur de la surface, le Polonais contrôle et frappe du droit. Le chronomètre affiche 51 minutes et 39 secondes de jeu et celui que l’on appelait Chancenmörder (le tueur d’occasions) à son arrivée en Bundesliga vient de marquer deux fois en une minute. Une vraie performance, mais rien d’exceptionnel en cette soirée de football européen. Après tout, à Udine, derrière l’Autriche, Mario Balotelli vient de prolonger un peu plus la légitimité de la foi de ses croyants en logeant un coup franc en pleine lucarne.

Deux minutes plus tard, le Bayern repart à l’attaque avec une verticalité vertigineuse qui transforme la pelouse de l’Allianz Arena en une piste de ski. Alaba sort de la poudreuse, Vidal slalome, puis lance Müller en tout-schuss. Alors que l’Allemand est déterminé à participer à son tour à la fête, Lewandowski semble peu concerné, à gauche de l’action, tel un prédateur qui voit une proie, mais s’aperçoit qu’elle est déjà réservée. Mais alors que Müller est arrêté, puis perd le ballon, le Polonais se rapproche de la surface à mesure que la proie se libère. Arrivé à temps, le ballon lui revient dans les pieds comme une boule de flipper. Sans réfléchir mais porté par un destin chanceux, Lewandowski frappe du droit sur le poteau, puis du gauche sur Benaglio, puis enfin du droit entre les colosses Dante et Naldo. Le chronomètre affiche 54 minutes et 1 seconde : Lewa’ vient de marquer le triplé le plus rapide de l’histoire de la Bundesliga, en 3 minutes et 22 secondes.

Ronaldo et Dante

Après deux minutes de répit pour les Loups sonnés et jusque-là invaincus de Wolfsburg, le Bayern repart vers l’avant. Le supersonique Douglas Costa accélère, lance un petit pont d’un kilomètre et centre. Une fois de plus, le destin s’en mêle : le ballon est touché, puis dévié sans être vraiment contré. Évidemment, ce changement de trajectoire profite aux longues jambes de Lewandowski qui n’a plus qu’à couper la tête de Benaglio pour la quatrième fois en cinq minutes. Le chronomètre affiche 56 minutes et 23 secondes. Dans les tribunes, Robben compte jusqu’à quatre. Boateng est rappelé à l’ordre par un Guardiola éternellement insatisfait. Et tous les autres se souviennent qu’un soir d’avril 2013, déjà en milieu de semaine, quand Lewandowski avait fait céder le Real Madrid à quatre reprises dans la même rencontre. Trois minutes plus tard, alors que tout Wolfsburg semble enfin retrouver le temps de penser au scandale Volkswagen, le centre de Götze tombe à l’entrée de la surface. Lewandowski s’arrête, se couche et balance sa reprise de volée sous la lucarne de Benaglio. Un micro gicle, le stade explose, le looping boucle sa boucle et le chronomètre affiche 59 minutes et 41 secondes. En neuf minutes et deux secondes, Lewandowski vient de rendre le plus bel hommage possible à l’anniversaire de Ronaldo, ce héros du but qui nous étonnait tous les week-ends il y a quinze ans.

Alors qu’il n’avait rien demandé, un autre Brésilien se retrouve mêlé à la furie munichoise. Entre chacune de ces images démentes, ralentis, célébrations et filets qui tremblent, un seul et même visage apparaît encore et encore sur nos écrans. Comme si elle avait choisi une tête pour personnifier le désespoir footballistique, l’histoire capricieuse nous montre la déception de Dante entre chaque ralenti. Il faut croire que la cruauté aime les ricochets aussi inattendus qu’historiques. Ce mardi soir, le football s’est ainsi souvenu qu’il y a un an, Dante nous avait déjà offert le même visage désespéré un soir de demi-finale de Coupe du monde à Belo Horizonte. Le joueur du Bayern avait alors subi l’effet dévastateur de la leçon de ses coéquipiers en club, sept fois. Et le cameraman avait déjà choisi son visage abattu entre chaque coup de massue. Par sa simple présence à deux moments historiques sans lien apparent, Dante entre malgré lui dans l’histoire de la tragédie, aux côtés de son homonyme florentin. Quand le destin s’acharne…

Caprices de l’histoire

Mais les caprices de l’histoire ne s’arrêtent pas là. L’histoire sait calculer, prendre du recul, nous endormir doucement et nous réveiller brutalement. L’histoire est joueuse. Ainsi, elle retiendra que l’entraîneur ayant permis à son numéro 9 de marquer cinq fois en moins de dix minutes n’est autre que celui qu’elle avait pris goût à nous présenter comme un tortionnaire des numéros 9. L’histoire retiendra que ces cinq buts en neuf minutes, apologie du football direct, vertical, rapide, auront extasié la planète entière sous la main d’un entraîneur obsédé par la possession et le contrôle du ballon. L’histoire retiendra que Pep Guardiola, sans avoir gagné la Ligue des champions, aura signé un moment mémorable et peut-être encore plus marquant qu’un trophée dans l’histoire du Bayern Munich : un moment capable de résumer à lui tout seul cette entité à la discipline dévastatrice capable de réaliser l’impossible. Enfin, cette coquine qu’est l’histoire retiendra que la plus belle réalisation moderne de blitzkrieg aura choisi le corps d’un Polonais pour s’exprimer.

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Par Markus Kaufmann

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