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Les Canaris perdus à Paris
Avant même la mise en place de la ligne à grande vitesse Nantes-Paris, les joueurs du FC Nantes ont souvent pris la route jusqu'à la capitale. Un parcours semé d'embûches dont peu ont réussi à sortir avec brio. Le Canari vit mal à Paris.
« À dix-huit, j’ai quitté ma province / bien décidé à empoigner ma vie / le cœur léger et le bagage mince / j’étais certain de conquérir Paris. » Eux ont souvent plus de 18 ans, déjà, mais comme Charles Aznavour, ces Jaune et Vert étaient bien décidés à atteindre le haut de l’affiche. Nombre de Canaris ont ainsi été transférés du FC Nantes vers le PSG. Ils sont exactement 13 selon Transfermarkt à avoir fait le trajet sans escale, entre 1985 et 2006, de l’inconnu Jean-Claude Lanoizelet au transfert le plus cher Mario Yepes, arraché contre 10 millions d’euros à l’été 2004. Des bons choix, comme Paul Le Guen ou Sylvain Armand, des gars pas trop moulés par le FC Nantes et qui grimpent les échelons sans sourciller. Mais surtout de gros ratés. Il suffit d’évoquer Patrice Loko pour voir l’abysse qui peut exister entre une carrière nantaise et la scène parisienne. Parti à Paris en tant qu’international et meilleur buteur du championnat, Loko y perdra peu à peu son football, au point de partir la queue entre les jambes chez le promu lorientais à l’hiver 99 après une saison et demie sans but. Alors que diable vont-ils donc faire dans cette galère ?
Transferts de raison
Pour les joueurs, la capitale ne se refuse pas, qui plus est quand on sort tout frêle du FC Nantes. Le constat est partagé par les différents transfuges, même si les raisons sont diverses. Ainsi, en plein cœur des nineties, et ce, alors que Nantes sort d’une demi-finale de C1, Benoît Cauet file au PSG sans regret. Les négociations pour une prolongation avec le FCNA échouent, et « Paris, à l’époque, c’était le plus grand club. Pour ma progression, c’était une bonne chose d’y aller. C’est le seul club qui pouvait me donner ça en France à ce moment-là. » Le PSG se frotte aux compétitions européennes et a besoin de sang neuf. « Et puis autour, il y avait une grosse ossature dans le club, des gars qui étaient là depuis 7 ou 8 ans. »
Le motif n’est pas si différent pour Landreau, en 2006, même si le contexte n’est plus le même. Grandi, élevé à la Jonelière, Micka confie à L’Équipe sa confiance dans son nouveau projet au Camp des Loges : « Je suis venu à Paris sans peur. Plutôt avec impatience. Je viens en sachant qu’on est dans un contexte particulier, où tout n’est pas toujours facile. Je voulais un tel contexte pour pouvoir grandir et progresser. » Landreau part surtout pour gagner en visibilité, alors qu’il vise la place de n°1 en équipe de France. Jean-Hugues Ateba l’explique aujourd’hui. Paris est idéal pour donner un coup de boost à sa carrière et viser des sphères que ne permet pas Nantes : « Paris, c’est une grande ville, Ça fait plaisir quand un tel club s’intéresse à vous et surtout, ce n’est pas comme à Nantes. Non pas que Nantes soit un petit club, mais Paris, on en parle beaucoup plus dans les médias. »
Un Canari dans la ville
Cependant, quitter Nantes, c’est quitter un cocon sans jamais avoir entraperçu le monde extérieur, avoue Ateba avec le recul. « Aller à Paris, c’est comme quitter la maison pour aller vivre dehors, avoir son appartement seul. » Seul, les emmerdes commencent, et Coco ou Reynald ne sont plus là. Le risque est de se perdre dans la masse. « Je ne connaissais personne là-bas. Ça a été difficile au début » , confie Ateba. « Heureusement, il y avait quelques Nantais qui ont fait le même trajet (Yepes et Armand, ndlr). Ça a facilité mon intégration au collectif » , même si ses apparitions se font rares à cause de la concurrence… de Sylvain Armand. Autre latéral, William Ayache ne connaît pas un meilleur sort. À Nantes quasi 10 ans, son départ vers Paris après la Coupe du monde 86 signe le début d’une longue période d’instabilité aux huit clubs différents.
Toutefois, un natif de Nantes a particulièrement bien réussi au Parc des Princes. Dès sa première saison, Benoît Cauet ajoute une C2 au palmarès du PSG. « J’ai fait mon taf » , comme il dit. Tout aussi facilement, l’homme qui joue les touches plus vite que son ombre explique cette réussite inhabituelle : « Pour les autres, la principale différence est d’avoir un parcours plus important à Nantes, surtout à cette époque. Ils ont connu des entraîneurs comme Coco Suaudeau, comme Reynald Denoueix, qui étaient des figures et des formateurs. En partant, ils sont arrivés dans des clubs où le résultat compte. Ils n’étaient probablement pas tous adaptés à ce changement. » Ainsi, Cauet bénéficie lui de sa fin de formation à l’OM, après la banlieue nantaise de Bellevue. « Paris m’a rappelé Marseille. Même si ce sont deux clubs différents, il y avait cette même volonté de gagner, cette même présence de multiples internationaux, cette détermination à être 1er en Europe. Mon adaptation a été d’autant plus rapide. » Malgré tout, Paris est vendeur, les grands d’Europe ne résistent pas. Cauet file à l’Inter. « Le club a choisi de récupérer 5 milliards de lires. Les aléas du footballeur… » , juge sobrement Cauet a posteriori. L’expérience de Benoît Cauet prouve en tout cas une chose : pour être un Canari qui réussit hors de chez lui, il faut avoir connu tôt autre chose que l’école nantaise. Sans cela, les Canaris sont « trop purs ou trop en avance » . Et encore : Alioune Touré file à Manchester City avant de rejoindre PSG. Il n’empêche. Une fois au Camp des Loges, il joue peu, rarement et ne marque jamais. Jusqu’où jour venu, lors de la saison 2002/2003, où il leur a montré, aux Parisiens comme aux Nantais qu’il avait du talent…
Par Côme Tessier