Mauvaise vision à l'Euro
Et n'en déplaise au responsable de la communication de l'AS Monaco, l'arbitre de surface n'est pas le quatrième arbitre, mais bel et bien le cinquième, et même le sixième puisqu'il y en a un de chaque côté du terrain. Avec ces nouveaux hommes en jaune, la bande qui fait la loi dans le stade est désormais constituée du trio d'arbitres, du quatrième – celui qui affiche les changements et le temps additionnel –, et donc des deux larrons scotchés aux lignes de but. Une nouveauté d'abord introduite lors de la Ligue Europa en 2009, et des hommes à qui on donne une mission simple : juger du franchissement ou non de la ligne par le ballon lors des buts litigieux, contrôler les sorties de but, mais aussi surveiller les fautes, simulations ou autres incidents pouvant avoir lieu dans la surface. « Quand l'arbitre central voit mal les choses, observer l'action de face et non de derrière peut aider. Ils voient les joueurs venir vers eux, quand l'arbitre de terrain est derrière le ballon » , précise Bruno Derrien. En cas d'événement à punir, l'arbitre de surface ne peut qu'avertir par micro son collègue au sifflet, chef d'orchestre de la partie et qui a le dernier mot sur chaque décision. Le système est étrenné pour la première fois dans une compétition internationale lors de l'Euro 2012, avec quelques gros scandales pour mettre les arbitres de surface en plein milieu de la cible. Dernier match de la poule D entre l'Angleterre et l'hôte ukrainien, les Three Lions mènent 1-0 à 30 minutes de la fin. Sur un contre, Marko Dević met une balle piquée à Joe Hart, et Terry tente une course et un retourné improbable pour sortir le ballon. Le ralenti est formel, la balle a bien franchi la ligne. Placé à 5 mètres, l'arbitre de surface n'a rien vu.
Le drame en images :
Vidéo
Aulas le pédagogue
Les presque 50 000 spectateurs de la Donbass Arena de Donetsk peuvent s'arracher les cheveux. Le cinquième arbitre était pourtant là, soigneusement posé à califourchon au-dessus de la ligne pour être sûr de ne rien rater, à quelques mètres de la cage anglaise. Encore la semaine dernière, lors du match de Ligue Europa qu'il arbitrait, Thierry Chapron a changé trois fois d'avis sur une action, déboussolé par le trop-plein d'informations et a validé un but, avant de l'annuler pour accorder un penalty, puis de tout envoyer en l'air en revenant sur un hors-jeu. « Manifestement, l'arbitre de surface le met dans l'embarras. Sur ce match, il n'a pas été d'une grande aide, il a même créé de la confusion » , ricane Bruno Derrien. Et comment oublier les images incroyables de ce PSG-Lyon en janvier dernier, et de ce ballon sorti d'au moins un mètre récupéré par Rabiot sans que personne n'y voie rien, juste avant qu'il ne marque. Furieux, Aulas était descendu au vestiaire des arbitres à la mi-temps avec une photo de la phase de jeu sur son téléphone. Après le match, il commentait avec autant d'humour que de frustration : « J'ai essayé d'expliquer les choses, de faire un travail éducatif. J'ai amené l'image pour leur montrer l'erreur, mais l'arbitre n'a pas voulu la regarder, il a détourné les yeux. C'était sans doute trop dur à supporter pour celui qui a fait l'erreur. (...) On repart avec l'impression d'être cocu. » Les Français pourront se réconcilier avec eux en se souvenant que c'est un arbitre de surface qui a vu la main de Schweinsteiger en demies de l'Euro. Mais avec la goal-line technology et les débuts de la vidéo, Bruno Derrien est clair, « c'est la mort de l'arbitre de surface » . Pas sûr qu'il y ait grand monde pour pleurer à l'enterrement.
Par Alexandre Doskov Propos de Bruno Derrien recueillis par AD
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