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Le jour où la France a affronté l’URSS pour la première fois

Par Kevin Charnay
Le jour où la France a affronté l’URSS pour la première fois

Le 23 octobre 1955, la France se déplaçait à Moscou pour affronter l'URSS, en pleine Guerre froide. Une première symbolique, quand le sport prend une dimension politique.

Il est le plus beau dans les tribunes du stade Lénine, au milieu des 54 000 autres personnes. Sourire aux lèvres, clope au bec, il est accompagné de trois des plus grandes actrices françaises de l’époque, Nicole Courcel, Dany Robin et Danielle Darrieux. La classe. Cela fait maintenant presque une semaine que Gérard Philippe, acteur sympathisant du PCF, est accueilli comme une superstar partout où il passe, que ce soit à Moscou donc, mais aussi à Kiev ou Leningrad. Il fait partie de la délégation française dans le cadre de la semaine du cinéma en URSS. Depuis deux ans et le début de la « coexistence pacifique » , Français et Soviétiques s’efforcent de renouer des liens et les échanges culturels deviennent « un moyen utile pour renforcer la détente » . Le sommet de Genève, quelques mois après la création du pacte de Varsovie, a ouvert la voie à un rapprochement entre les deux pays. Gérard Philippe et sa délégation sont donc une des clefs de la diplomatie française. Entre deux projections de films, entre deux bains de foule avec les « Philippines » , ses groupies soviétiques, il a enchaîné réceptions très officielles, ballets, visites de studios de cinéma, de crèches et de kolkhozes… Alors forcément, c’est plus sympa de se retrouver au stade pour suivre le premier match de l’histoire entre la France et l’URSS.

Trop prudents

Sur le terrain, les joueurs sont bien loin de toutes ces considérations inter-étatiques. Les Français sont surtout préoccupés par le fait de ne pas se faire manger tout cru par l’ogre soviétique. Car même si l’équipe de France est invaincue depuis la Coupe du monde 1954 avec, entre autres, trois victoires de prestige face à l’Espagne, la Suède et l’Angleterre, l’adversaire de ce dimanche 23 octobre 1955, galvanisé par son public, fait peur. « Avant le match contre l’URSS, si l’on avait dit aux joueurs français qu’ils obtiendraient le match nul, nul doute qu’ils eussent accueilli cette prévision avec une intense satisfaction » , écrit après la rencontre Albert Batteux, le sélectionneur, dans une chronique pour Miroir Sprint. C’est surtout l’attaque de l’URSS qui impressionne. Pour contrer le 4-2-4 ultra pressant des Soviétiques, Batteux fait jouer ses hommes en contre-attaque, avec une défense renforcée. Les quatre arrières (Louis, Jonquet, Marcel et Marche) effectuent un marquage individuel tandis que deux demis défensifs (Penverne et Piantoni) viennent leur prêter main forte.

La tactique française est simple. Pour une fois, on va jouer prudemment. « Il importait qu’avant tout, notre défense résistât à tous les assauts ; grâce à la valeur de ses composants, grâce aussi à l’aide que pouvait leur prêter l’un ou l’autre de nos avants, qui savaient ce qu’on pouvait attendre d’eux dans ce domaine. En particulier Piantoni et Glovacki, dont on ne peut dire qu’ils sont vraiment des intérieurs du type« chien de berger », s’étaient promis d’apporter un soin particulier à leur action défensive » , décrit Albert Batteux. Car les Français savent bien que devant, Raymond Kopa et les autres attaquants rapides et techniques de l’équipe peuvent faire la différence à eux seuls. C’est d’ailleurs ce qui arrive à la 29e minute, lorsque Kopa s’en va tout seul depuis le côté droit pour ouvrir le score. La stratégie est en place et les plans soviétiques sont contrecarrés. Jusqu’à la 42e minute et un coup franc dans la surface, à 10 mètres des buts. Streltsov ne se fait pas prier et ruine la bonne première mi-temps des Bleus.

Trop timides

Au retour des vestiaires, les Français ne sont pas assez concentrés. Du coup, au bout de 25 secondes de jeu, Simonian en profite pour marquer le but du 2-1. L’équipe de France est menée, mais ne change pas sa manière de jouer. Pas question de se ruer à l’attaque si c’est pour en prendre un troisième. Sous la domination territoriale des Soviétiques, les Français plient, mais ne rompent pas. Piantoni est héroïque. Il continue à défendre comme un acharné, et pourtant, c’est bel est bien lui qui a la lucidité de remettre les deux équipes à égalité. Peu après l’heure de jeu, il trompe la vigilance de Porhunov en reprenant un centre de Glovacki. 2-2. Il reste trente minutes à jouer, et les Français sont déterminés à aller chercher la victoire. Alors que les Soviétiques sont connus pour finir très fort les matchs et terrasser leurs adversaires à ce moment-là, ce sont bien les hommes de Batteux qui sont les plus frais. À la dernière minute, le puissant tir de Glovacki passe même à quelques centimètres du but. Le score en reste là, et même si les Français, largement applaudis, entament un tour de stade, la satisfaction n’est pas complète. Comme si la prestation n’était pas aboutie. « Ce match, nous aurions pu le gagner… » s’agace Kopa après la rencontre. « Les joueurs avaient un peu le sentiment que, s’ils n’avaient pas autant craint leur redoutable adversaire, s’ils n’avaient pas autant voulu prouver leur abnégation au profit de l’équipe, s’ils avaient davantage appuyé leurs mouvements offensifs, ils auraient peut-être pu emporter cette victoire qui auraient fait sensation » , explique alors Batteux après la rencontre. Mais l’essentiel est acquis, les Français ont gagné le respect des Soviétiques. Gérard Philippe aura un nouveau sujet de conversation à aborder avec les paysans soviétiques lors de ses prochaines visites de kolkhozes. La semaine du cinéma est terminée.

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