- Espagne
- Tous championnats
- Justice
Le football espagnol, la justice, les polémiques
Il y a tout pile une semaine, le président du FC Barcelone était mis en examen. Un énième épisode du feuilleton entre la justice et le football espagnol. Que Bartomeu se rassure, il n'est pas seul. Depuis quelques mois, de nombreuses affaires émaillent le quotidien du sport roi outre-Pyrénées. État des lieux.
Neymargate : La mise en examen de Bartomeu
El Caso Neymar, c’est ainsi qu’il se nomme outre-Pyrénées, est la saga judiciaire du football espagnol. Depuis l’arrivée du désormais capitaine de la Seleção dans la cité de Gaudi, les imbroglios entre la direction blaugrana, l’Hacienda Publica et le juge Pablo Ruz n’ont cessé de pourrir le FC Barcelone. Après la démission de Sandro Rosell, les aveux de la Junta Directiva sur le montant du transfert – qui, au lieu des 57 millions d’euros initiaux a finalement coûté 94,8 millions –, voici désormais Josep Bartomeu mis en examen. Le juge en charge de l’affaire a estimé, preuves à l’appui, que l’actuel président barcelonais avait escroqué le fisc local de 2,8 millions d’euros lors de l’achat du génie brésilien. Illico, Bartomeu est allé se plaindre sur les plateaux d’une chaîne catalane, pour dire qu’il était victime « d’une attaque politique et sportive » : « Neymar avait deux offres, une supérieure à la nôtre qui venait du Real. Neymar a préféré Barcelone et cela n’a sûrement pas plu. » Face à ce plébiscite de la défense, Javier Tebas, président de la LFP espagnole, a estimé « la mise en examen de Bartomeu un peu douteuse » . Autrement dit, la justice se plante. Bref, dans un pays où la corruption a un temps été érigé en sport national, personne ne peut deviner qui sortira vainqueur de ce poker-menteur.
La guéguerre Fédération-Conseil supérieur des sports
Mercredi 28 janvier : « La RFEF voit un interventionnisme excessif du Conseil supérieur des sports et demande à l’UEFA le congédiement du secrétaire d’État pour le Sport, Miguel Cardinal, de ses fonctions dans les commissions » . Le même jour, quelques heures plus tard : « Si la RFEF (…) considère que quelque chose ne s’est pas déroulé selon l’ordre juridique, elle a à sa disposition des instruments pour exiger le strict accomplissement de la loi. » Entre cette guerre de communiqués qui oppose la Fédération espagnole et le Conseil supérieur des sports se cache un conflit entre deux personnes omnipotentes du paysage footballistique espagnol. Aux commandes de la RFEF depuis près de 27 ans, Angel Maria Villar accuse le membre du gouvernement Miguel Cardenal de lui avoir sucré ses subventions. En bref, en 2012, les deux entités étaient tombées d’accord pour qu’aucune aide publique ne soit allouée à la Fédération. Ses revenus perdant de leur superbe – enfin, leur croissance, puisque les bénéfices sont toujours positifs –, la fédé redemande finalement sa subvention pour 2015. La demande, de trois millions, est rejetée par le Conseil supérieur des sports, qui devrait pour cela baisser les subventions de fédérations bien plus dans le besoin. Ce radin d’Angel Maria Villar est d’ailleurs pointé du doigt par plusieurs enquêtes concernant la corruption qui règne autour de l’attribution de la Coupe du monde 2022 au Qatar…
Le président de la LFP et son amitié avec Mediapro
Mediapro, c’est un peu le beIN Sports espagnol. Un mastodonte des droits télés de la Liga – qui a un temps été propriétaire de ceux du Mondial – qui s’est lié d’une amitié forte et entretenue avec Javier Tebas, président de la Ligue de football professionnel espagnole. Comme l’a révélé le média Vozpopuli, le propriétaire du groupe télé, le Catalan Jaume Roures, est désormais un partenaire de Javier Tebas. À travers la société Spanish Soccer International Marketing AIE, dont le siège social se trouve dans les bureaux de la LFP, les deux hommes sont respectivement secrétaire, pour le señor Mediapro, et président, pour le Frédéric Thiriez local, la moustache en moins. L’objectif de cette société n’est autre que « la prestation sous n’importe quelle modalité contractuelle de services auxiliaires aux activités développées par ses partenaires » . Alors que la LFP espagnole est sur le point de renégocier les droits télés de sa Liga, le conflit d’intérêts pointe le bout de son nez pour Javier Tebas… Par ailleurs, Mediapro s’en est mis plein les fouilles en remportant son procès face à Prisa, autre géant espagnol des télécommunications (Canal Plus, El Pais…). Et devrait donc pouvoir aligner quelques-uns des 320 millions d’euros remportés lors du jugement pour s’adjuger ces dits droits.
Florentino, Sandro et Qatar 2022
En juin dernier, le Real Madrid se fâchait tout rouge. Après la publication d’une enquête de nos confrères de France Football, Florentino appelait même ses avocats pour porter plainte contre l’hebdomadaire hexagonal. En cause, une enquête sur les liens plus que troubles entretenus par les présidents merengue, blaugrana et de la RFEF avec le Qatar. Dès 2009, ces trois hommes ont passé un accord avec l’émirat : en échange du soutien de nombreuses fédérations sud-américaines pour l’organisation de la Coupe du monde 2022, l’Espagne recevrait celle du Qatar pour le Mondial 2018. Raté, enfin pas pour tout le monde. Depuis ces accords secrets, Florentino Pérez a glané de nombreux contrats pour son entreprise de BTP, ACS : un centre commercial estimé à 1,3 milliard d’euros, une ville de 200 000 habitants… Pour l’ancien président barcelonais, c’est sa société de consulting, BSM, qui s’en serait mis plein les poches. On parle ainsi d’un contrat de 2,3 millions d’euros avec l’académie de jeunes sportifs Aspire. Pour le moment, la justice espagnole n’a pas bougé le petit doigt. La FIFA non plus. Étonnant, hein.
Interdiction de recrutement : après le Barça, le Real ?
400, c’est le nombre de joueurs mineurs recrutés par des clubs espagnols en 2014 – autrement dit, 22 % du marché mondial. Premier importateur, ces clubs sont donc dans la ligne de mire des contrôleurs de la FIFA. Après le Barça, pris la main dans le sac et suspendu de mercato pendant un an, le Real Madrid fait lui aussi office d’une enquête de l’organisme de Sepp Blatter. Du côté de Valdebebas, le communiqué officiel manie l’ironie pour contrer les soupçons sur les 51 jeunes joueurs visés. « Un joueur est apparu deux fois dans la liste » , peut-on même y lire. Toujours est-il qu’un cas pose véritablement problème. Un Vénézuélien ne remplirait pas les critères selon la FIFA. Pour le Real Madrid, a contrario, oui. Ainsi, l’on retrouve la même situation qu’avec le FCB. Car, selon la loi en vigueur sur le sol espagnol, un club espagnol peut se permettre de recruter un mineur étranger si ses parents disposent d’un visa de résidents. Selon la FIFA, non. Bref, de ce manque d’harmonisation, le FCB a déjà pris son tarif. Au Real Madrid désormais de bien préparer sa défense face au TAS…
Par Robin Delorme, à Madrid