Le CO Rochetaillée, nouveau Roi des tours de terrains

À quelques encâblures de Saint-Étienne, au sommet d’une colline du massif du Pilat qui surplombe le petit village de Rochetaillée – rattaché à la préfecture de la Loire depuis 1973 – et ses 700 habitants perchés à près de 1000 mètres d’altitude, un terrain stabilisé en gore détonne dans ce décor somptueux. Le silence est roi, la vue sur les vestiges du château de Rochetaillée prenante et tout paraît paisible. Une quiétude qui sera brisée de vendredi soir à samedi soir par une émulation grandissante au stade de football. Ici, le CO Rochetaillée, pensionnaire de D5, s’apprête à relever un défi aussi génial qu’exigeant : accomplir 1000 tours de terrain en 24 heures et en relais. Costaud, et suffisamment excitant pour remporter le Prix « Esprit Club » Sporteasy du Vrai Foot Day.

Courir, oui, mais surtout s’amuser

Une idée vaguement présente dans la tête des joueurs de Rochetaillée l’an dernier, la réflexion n’étant pas allée très loin. « Cette année en revanche, en pleine préparation physique durant l’été, on a commencé à y repenser, indique Gaëtan Chapelon, 30 ans, capitaine de l’équipe et licencié depuis six ans au CO Rochetaillée. Étant donné que l’on a l’habitude de courir autour du terrain et que c’est pas vraiment ouf comme moment, on s’est dit qu’on pourrait partir de ce concept pour le rendre beaucoup plus fun. Puis finalement, c’est la base de tout footballeur, les tours de terrain, que tu sois gamin ou joueur professionnel. » S’il juge l’objectif des 1000 tours en 24 heures « un peu ambitieux » (de savants calculs indiquant une moyenne d’environ 1 minute et 26 secondes par tour pour être dans les clous), Gaëtan est formel : la seule règle est de compléter un tour de terrain, peu importe la manière. « Tu peux le faire en moonwalk ou en marchant si tu veux, même si ça risque de nous mettre dans la sauce pour atteindre les 1000 tours. (Rires.) Il est même possible de courir à plusieurs, mais on ne comptera qu’un tour parcouru à chaque fois, évidemment. »

Quid des participants qui se relayeront à partir de 22h vendredi ? « On a proposé aux gens du club de s’inscrire et, en parallèle, on invite les non-adhérents à rejoindre l’aventure en s’inscrivant sur notre site internet, enchaîne Gaëtan. On a actuellement une quinzaine de participants, mais il reste encore quelques créneaux dans la journée du samedi à combler. » Le capitaine de l’équipe ne se fait cependant pas de soucis : pour lui, la principale difficulté était de remplir le planning de nuit, une tâche accomplie haut la main. « On a un ancien joueur du club, aujourd’hui adepte de la course à pied, qui va courir entre 1 heure et 5 heures du matin, ce qui est quand même pas mal.(Rires.)  »

De la course au programme donc, mais pas seulement. Avec 24 heures de présence sur le stade des Écheneaux, le CO Rochetaillée a pensé à toute une organisation pour animer l’évènement. Les participants comme les spectateurs auront la possibilité, le samedi, de s’essayer au football-pétanque, voire au tennis-ballon pour les plus techniques, ou bien d’improviser des petits matchs de foot. Quant aux enfants, ils ne sont pas en reste. « Il y aura aussi une structure gonflable généreusement prêtée par le district de la Loire, précise Gaëtan. Je n’ai pas encore pu voir à quoi elle ressemblait, mais ça va être vraiment sympa. » Sans oublier la buvette, élément central de tout club de football amateur qui se respecte avec un menu composé de jus de fruits et de bières, accompagnés par de la haute gastronomie : stand de merguez/saucisses, pizzas avec option végétarienne pour satisfaire le plus de monde possible et peut-être même un stand de crêpes. Un dispositif royal qui aurait pu être agrémenté d’un live Twitch pour suivre le relais. « Mais ça va être compliqué, le réseau est vraiment mauvais ici. Et encore, il y a un an, on ne captait rien du tout. »

Un minuscule club au cœur immense

Pour le CO Rochetaillée, c’est à la fois l’occasion de partager un moment de convivialité tout en mettant les projecteurs sur sa petite entité. Avec dix-neuf joueurs licenciés, dont cinq possèdent également une licence de dirigeant, et un président – Gérard, présent depuis la fondation du club en 1989, le club, à la recherche de joyeux lurons souhaitant rejoindre l’aventure, semble même trop réduit pour être qualifié de petit Poucet, et peine d’ailleurs à avoir une équipe complète à chaque match. Des rencontres qui tournent souvent à la rouste, sans jamais les décourager. « Une fois, le district de la Loire nous avait même appelés pour nous féliciter de n’avoir eu aucun forfait, se souvient Gaëtan. On ne joue même pas nos matchs à Rochetaillée, car le terrain, pas aux normes ( « l’espacement est trop faible entre la balustrade et la roche ne nous permet pas d’accueillir du public autour » ), n’est pas homologué. Heureusement pour nos adversaires d’ailleurs, sinon on serait imbattables.(Rires.)  » Obligé de descendre à Saint-Étienne pour effectuer ses rencontres « à domicile » sur un terrain synthétique, l’effectif vit encore grâce à son idéologie du football : le plaisir de jouer entre amis et de partager.

Le partage justement, le CO Rochetaillée en est friand. Et malgré sa petite taille et ses revenus très limités, le club ne conservera aucun bénéfice de ce week-end. « Tout sera reversé à l’association Le Père Noël du lundi », étaye Gaëtan. Fondée en 1991 à Montbrison, commune de la Loire située à une cinquantaine de bornes au nord de Saint-Étienne, cette association distribue jeux, jouets et tout ce qui peut améliorer la vie des enfants à l’hôpital. « Il y a un an, on avait lancé une cagnotte pour aider à financer notre club, car on était en galère, reprend Gaëtan. Les gens qui donnaient pouvaient recevoir une contrepartie comme un morceau du stade ou même un maillot dédicacé. Ça avait plutôt bien marché, on avait même dépassé l’objectif et on s’était dit qu’on allait reverser le surplus à une association qui en avait vraiment besoin, en l’occurrence Le Père Noël du lundi, plutôt que de le garder. Le président de cette association nous avait même rendu visite à l’entraînement un jour, et son discours nous avait touchés. » Il ne reste désormais plus qu’à mettre un pied devant l’autre, et recommencer.