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- 21e journée
- Udinese/Juventus Turin
La Juve a-t-elle déjà gagné la course ?
Avant d'affronter Cagliari et le Milan ce week-end, sept longueurs séparent la Roma de Rudi Garcia et la Juve de Max Allegri. Alors que les deux équipes ont souvent été au coude à coude jusqu'à présent, le mois de janvier a mieux réussi aux Turinois qu'aux Romains, qui filent têtes baissées vers leur quatrième titre consécutif. Les dés sont-ils déjà jetés en Italie ?
Vingt-deux. C’est, en jours, et à compter d’aujourd’hui, la période qui nous sépare de ce qui sera sans doute la finale de la saison 2014/2015 de Serie A. AS Roma vs Juventus Turin, une affiche, un choc sous très haute tension qui pourrait bien déterminer le grand vainqueur de la lutte acharnée que se livrent les clubs de James Pallotta et Andrea Agnelli depuis la fin du mois d’août. Au soir de cette 22e journée, et donc à mi-parcours, c’est le triple champion en titre qui vire en tête avec une confortable avance de sept points sur son dauphin romain. Sept points, soit le plus grand écart d’Europe derrière la Bundesliga (le Bayern compte 8 points d’avance sur Wolfsburg) et la Raiffeisen Super League (Bâle devance également le FC Zurich de 8 unités). Autrement dit, un monde. Et pourtant, Rudi Garcia l’a affirmé au mois d’octobre et l’a même rappelé il y a trois semaines en préambule du match face à Palerme : la Roma « gagnera le Scudetto » . Qui sait, peut-être parlait-il du championnat du fair-play, ou de celui de air-violon… Car après vingt et une journées et une première partie de saison moins bonne que l’année précédente, la Juve de Max Allegri semble plus que jamais hors de portée.
Rome, plus dure sera la chute
Et si la Roma était partie trop vite, trop fort, et s’était en fin de compte brulée les ailes en pensant qu’elle pourrait tenir toute une saison à cette cadence ? Rembobinons. Automne 2014, la Vieille Dame chute dans les toutes dernières secondes du match face au Genoa de Luca Antonini. Dans le même temps, à Rome, les Giallorossi se jouent tranquillement du promu Cesena grâce à leur capitaine De Rossi et au néo-Milanais Mattia Destro. L’équipe de Rudi Garcia remporte trois points qui lui permettent de revenir à hauteur de la Juve et croire de nouveau en ce quatrième Scudetto qui la fuit depuis 2001. Problème : une semaine avant, la Louve s’est fait laver à domicile par le Bayern en C1 (1-7), faisant revivre à Maicon et ses partenaires une soirée cauchemar semblable à celle du 8 juillet dernier. Dès lors, un seuil psychologique est franchi. Garcia a beau nier en bloc, la Roma semble atteinte moralement et finit par le montrer sur le terrain. Dans la foulée, elle se fait casser les dents à Naples au terme d’une prestation en tous points médiocre et repasse à trois unités de la Juve. Finalement éliminée de la Ligue des champions après une nouvelle débâcle à domicile contre City (0-2), l’ASR s’en remet au championnat et clôt l’année avec un beau bilan de onze victoires, trois nuls et deux défaites. Devant, la Vieille Dame compte toujours ses trois points en plus, ceux glanés lors du fameux match aller…
Vient alors la trêve, Noël, puis la nouvelle année. Garcia perd Seydou Keita et Gervinho, partis disputer la CAN avec le Mali et la Côte d’Ivoire, mais parvient tout de même à battre l’Udinese cinq jours avant le derby romain. Dans le même temps, à Turin, la Juve est accrochée par l’Inter (1-1). Roma : 39, Juventus : 40. S’ensuit alors un mois de janvier sinistre au cours duquel la Louve va lâcher prise et laisser filer tous les points qu’elle avait peu à peu récupérés. En manque d’efficacité offensive, fébriles défensivement, les Romains enchaînent une série de quatre matchs nuls qui permettent à la Vieille Dame de prendre le large. Plus que les résultats eux-mêmes, c’est la manière qui pose problème. À Rome, plus personne ne reconnaît l’équipe du début de saison capable d’en coller cinq au CSKA et d’aller chercher le nul à Manchester City. Pjanić et Nainggolan ne percutent plus comme avant. Totti, en dépit de son doublé fou contre la Lazio, se contente de portions de matchs, tandis que Juan Iturbe peine toujours à justifier ses 22 millions. Surtout, l’absence de Gervinho se ressent cruellement au niveau de la fluidité du jeu et du rendement offensif. Rudi tempère, mais les soucis sont bien réels. Rome ne répond plus.
Pogba et la Juventus en roue libre
Taxée d’équipe en reconstruction après le départ de Conte, moquée pour ses piètres prestations européennes, la Juventus a démarré sa saison dans la peau d’un favori menacé, traqué par une Louve aux crocs acérés. Rapidement éclipsée par les prestations spectaculaires des Romains, la formation d’Allegri avait tout de l’équipe qui allait flancher à la première difficulté venue. Sa défaite face au Genoa couplée à celles en C1 face à l’Atlético et l’Olympakios auraient pu avoir raison du moral des troupes. Au lieu de ça, Max Allegri a resserré les rangs et progressivement mis en place sa défense à quatre qui allait bientôt donner un second souffle à la Vieille Dame. Répondant parfaitement à la Roma jusqu’à la trêve, la Juventus est peu à peu montée en puissance jusqu’à ce mois de janvier 2015 où elle semble avoir retrouvé son meilleur niveau, bien aidée, il est vrai, par un Pogba en état de grâce, qui vient d’aligner trois buts en quatre matchs.
À vingt-deux jours de ce qui sera peut-être, sans doute, l’épilogue de cette saison, les Bianconeri sont en pole position pour empocher leur quatrième Scudetto consécutif. Mieux, ils sont encore en lice sur les trois tableaux pour réaliser l’improbable triplé championnat/coupe/Ligue des champions. Allegri l’a dit en conférence de presse : hormis la défaite aux tirs au but contre Naples en Supercoupe, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. Tandis que la Roma, basculée à l’étage inférieur cet automne, tentera de ramener la première Ligue Europa de son histoire, la Juve peut encore rêver de soulever la coupe aux grandes oreilles en mai prochain. Ou, du moins, espérer accrocher le dernier carré qu’ils n’ont plus dépassé depuis une douzaine d’années. Alors que le retour d’Andrea Barzagli se fait sentir et qu’aucun départ majeur, hormis Giovinco, n’est à signaler du côté de Turin, rien ni personne ne semble aujourd’hui en mesure de venir barrer la route des champions en titre. Et ce n’est pas les nouvelles blessures de Strootman et Iturbe, ni le départ de Destro qui vont arranger les affaires de la Roma. À moins que les prédictions du beau Rudi se vérifient et que la Louve parvienne à inverser la tendance. Encore faut-il que la Juve desserre l’étau et que Pogba arrête d’humilier ses adversaires tous les week-ends. Et ça, c’est pas gagné.
Par Morgan Henry