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La chute du mur : un nouveau monde pour le foot ?

Par Nicolas Kssis-Martov
4 minutes
La chute du mur : un nouveau monde pour le foot ?

Voici 25 ans, le mur de Berlin s'effondrait et, avec lui, le fragile rempart d'un bloc de l'Est dont les jours étaient comptés. La fin des pays socialistes a redessiné la géopolitique mondiale, mais elle a aussi eu des conséquences, souvent injustement ignorées, dans le petit monde du ballon rond.

La fin du calvaire de la RDA pour la France

Une ritournelle habituelle, qui devenait insupportable. Que ce soit pour les Bleus ou les clubs français, rencontrer une équipe est-allemande constituait le summum du match piège « typique » . Si le seul exploit de la sélection de la RDA fut d’avoir surclassé son homologue « impérialiste » en 1974, sans aucune conséquence sportive, elle se révéla une angoisse permanente pour les Bleus. Ainsi lors des qualifications pour l’Euro 1988, la France, tenante du titre, revient avec un nul de chez Honecker, et concède surtout une défaite à domicile (0-1) qui la prive de la phase finale. Au niveau des clubs, le bilan ne s’avère guère plus reluisant. Ainsi, l’AS Saint-Étienne se fait éliminer par le BFC Dynamo Berlin au premier tour de la C1 en 1982 (qui avait déjà viré Angers de la Coupe de l’UEFA en 1973). Bref. Un souci de moins pour le foot tricolore, la liberté a du bon… De ce point de vue, François Mauriac se trompait peut-être quand il affirmait en homme d’une autre époque : « J’aime tellement l’Allemagne que je préfère qu’il y en ait deux » .

Un tournoi olympique consacrant enfin le foot africain

Entre 1952 et 1988, les pays « socialistes » ont accaparé les JO et ont remporté systématiquement la médaille d’or olympique (à l’exception de la France en 1984, boycott oblige). Le règlement hypocrite du CIO et le statut pro pour le moins camouflé des « camarades » joueurs apportaient, il est vrai, au camp communiste la possibilité unique de briller dans un tournoi dont se désintéressaient par ailleurs les grandes nations occidentales ou sud-américaines. En 1976 à Montréal, la RDA y gagna même un précieux trophée à exposer dans son – faible – palmarès posthume. La chute du mur donnera de la sorte, et indirectement, l’occasion au foot africain via le Nigeria et le Cameroun d’engranger ses premiers titres internationaux et d’affirmer sa potentielle puissance.

Un foot allemand sûr de lui et dominateur

Si la Mannschaft et les clubs allemands savaient briller sur le terrain, et qu’en 1954, la sélection ouest-allemande stoppa – par tous les moyens, y compris chimiques – la marche triomphante du Onze d’or hongrois « socialiste » , en revanche, le souvenir de la Seconde Guerre mondiale est encore bien présent, l’expression de sa fierté et de sa domination devant s’exprimer a minima. Avec la chute du mur, et le sentiment d’écrire l’histoire dans le bon sens cette fois, nos amis d’outre-Rhin ont enfin pu laisser libre cours à leur joie nationale et leur fierté patriotique. Ce sera le cas dès 1990, la victoire en Italie contre les Argentins provoqua, dans l’euphorie de cette « parenthèse enchantée » , une belle flambée de drapeaux et d’hymnes sur les restes du mur. Dans le succès footballistique, le peuple allemand fêta sa réunification et ses retrouvailles. Depuis ils sont même, paraît-il, devenus un modèle.

Le mythe du footballeur ossie

Chaque pays à ses mythes mobilisateurs. En France, nous nous sommes longtemps crus les Brésiliens de l’Europe. L’Allemagne a maintenant son « Ossie » symbolique et quasi expiatoire. Car une fois la réunification achevée, l’Est de l’Allemagne a quasiment vu son football disparaître de l’élite, et à l’instar de la fusion des deux armées, le gros des bataillons est passé en perte et profits. Toutefois, à l’image d’Angela Merkel, le foot allemand a besoin d’exposer régulièrement un contre-exemple. Aujourd’hui, Toni Kroos joue cette fonction, qui doit lui échapper à bien des égards vu son âge, aucun joueur n’ayant envie d’être un Die Linke du ballon rond allemand. Le fossé qui demeure entre les deux parties ne se comblera pas avec ce genre de reconnaissance.

La ruée vers l’Est

Drang nach Osten. Le mur avait figé, à quelques exceptions près (notamment le cas à part de la Yougoslavie), la circulation et le marché des joueurs. Et globalement, c’était plutôt ceux de l’Est qui cherchaient à tout prix à venir respirer la liberté et le niveau de vie de l’Ouest, tel Boniek à la Juventus de Turin. Une fois le mur abattu, accompagné de l’arrêt Bosman quelques années plus tard, les footeux de tout le Vieux Continent ont désormais la possibilité de se tourner vers cette autre Europe, ou désormais des clubs plus ou moins puissants et solides, en terme de capitaux, leur laissaient entrevoir pont d’or ou au moins un travail (demandez à Mathieu Valbuena ou à Joël Fabrice Thomas). La chute du mur conduit aussi à la naissance d’un far west footballistique avec ses opportunités, ses risques, ses hors-la-loi (les hooligans) et ses escrocs.

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Par Nicolas Kssis-Martov

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