Il savait que notre poste exigeait de la concentration, en plus du travail. Il s'intéressait à tout ce qu'il y avait autour du foot. Notre vie sentimentale, notre vie de famille... Il était très à l'écoute de tout ce qu'on pouvait lui dire. Au moment de mon divorce, un moment douloureux, on a partagé des choses très intimes. En ayant des conversations entre mecs, tout simplement. Il nous soulageait, on se parlait beaucoup, c'était un confident. Il arrivait à nous faire relativiser, à nous faire décompresser par rapport à notre métier, qui exige une concentration extrême. Il avait toujours un petit mot, une connerie à sortir. À Lescure, le tunnel est très long, et quand on allait des vestiaires à la pelouse, pour l'engagement, il essayait de nous faire rire, histoire de détendre l'atmosphère. Il était même capable d'aller voir les arbitres pour leur sortir sa blague à deux balles. Une blague très vulgaire, qu'on va éviter de répéter. Nous, on la connaissait tous, mais les arbitres plongeaient, donc on piquait des fous rires. C'était "Domi", ça. Sa jovialité ne le quittait jamais, c'était un affectif. Il croquait la vie à pleines dents, et la maladie l'a emporté trop tôt.
J'avais un profond respect pour lui, parce que c'était quelqu'un d'emblématique, dans le monde du football. Il a été l'un des premiers entraîneurs de gardiens. À Bordeaux, c'était le premier ancien joueur à occuper le poste, en prenant la succession de Bernard Michelena. D'ailleurs, un de ses regrets, c'était qu'il n'y ait pas eu un ancien gardien pour l'entraîner quand il était joueur. Nous, les gardiens, on a la particularité d'avoir un entraîneur général, un entraîneur de groupe, mais en plus, un entraîneur spécifique, qui est un confident, un mec qui connaît notre poste, un mec qui nous donne confiance. Dominique avait une qualité énorme, c'est qu'il était à l'écoute de ce qu'on demandait. Il comprenait qu'on lui en demande plus, ou au contraire, qu'on soit crevé. Il s'adaptait. Mais tout cela se faisait dans une bonne ambiance, toujours en déconnant.
Aujourd'hui, j'ai une très grosse pensée pour Suzon, sa compagne, pour ses enfants et ses proches. J'échangeais souvent des textos avec Suzon, pour être au courant de l'état de santé de Domi, et là, je n'avais plus de nouvelles. Je savais que quelque chose n'allait pas, et j'étais inquiet. Je demandais des nouvelles au club, qui n'en avait pas toujours. Et puis ce mercredi matin, j'étais devant mon ordinateur, et un tweet est tombé. Ça a été très dur. C'est un grand monsieur qui nous quitte. Un mec bien, sain, qui n'était pas dans les mondanités. Il était très réservé, comme l'exige notre poste. C'est pour cela que nous formons une famille qui se respecte énormément, parce que la solitude de notre poste se retrouve à tous les niveaux. Malheureusement, il a mal maîtrisé son dernier envol. On ne choisit pas. On ne choisit pas. En tout cas, il s'est battu jusqu'au bout, ça je le sais. Il a tout fait. Je suis vraiment très peiné, ça me fait beaucoup de mal, comme à Ulrich Ramé et Cédric Carrasso, qu'il a accompagnés durant une bonne partie de leurs carrières. C'est un jour très triste. 63 ans, c'est trop jeune. Dominique... Dom. »
Propos recueillis par Mathias Edwards
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