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L’autre Jermaine
Rejeté par Chelsea à 16 ans, formé dans le même club que Vinnie Jones et Stuart Pearce, Jermaine Beckford a mis 27 piges à comprendre le football. Aujourd'hui à Everton, l'ancien serial buteur de Leeds s'attaque à une vieille connaissance : Manchester United.
Dans l’histoire d’amour qui lie Manchester United à Alex Ferguson, les couacs ne sont pas nombreux. En jetant un œil du côté de l’armoire à souvenirs, on retiendra péniblement un troisième tour de Cup perdu à domicile contre l’ennemi juré Leeds (0-1). La seule fois où l’Ecossais s’est fait enfler par une équipe de division inférieure en plus de deux décennies à la tête des Red Devils. C’était l’an dernier et l’unique buteur s’appelait Jermaine Beckford. Autrement dit personne. Un môme de 26 ans à l’époque, serial buteur des Peacocks depuis 2006. On parle d’un mec qui martyrisait les défenses de troisième division. Pas de quoi faire péter une braguette.
Pourtant, cet après-midi, Jermaine sera de nouveau sur la pelouse d’Old Trafford. La liquette ne sera toutefois plus blanche, mais bleue. Et oui, Jermaine joue désormais en Premier League pour Everton. Une découverte tardive du haut niveau qui surprend presque tout le monde. Ou pas.
Recruté gratos l’été dernier par les Toffees, Beckford était précédé d’une réputation de bad boy. On parle d’un mec recalé du centre de formation de Chelsea (il était de la même génération que Carlton Cole) et cultivant l’arrogance. Mais bon, on fait confiance à David Moyes qui s’y connaît assez bien niveau ballon. D’ailleurs, le rouquin n’a pas hésité à passer de la pommade sur les callipyges de son avant-centre. « Il a le sens du but en lui. J’en ai vu des gars impressionnants dans la surface de réparation. Des John Aldridge, Robbie Fowler. Je pense que Jermaine a toutes les qualités pour être un renard des surfaces. Pour un défenseur, il est très dur à marquer », balançait le coach d’Everton le week-end dernier. Une déclaration d’amour à peine dissimulée. Mais bon, les bons mots c’est bien joli. L’important reste de vite passer de la théorie à la pratique. Car des attaquants, le club de la Mersey en a une chiée (Yakubu, Saha, Anichebe, Vaughan, Gueye, Silva, Vellios…).
Tête de con ou génie incompris ?
En dépit de sa relative inexpérience, Beckford est en train de boucler sa première saison au plus haut niveau avec des stats intéressantes : 26 matches, 7 buts pour seulement 12 titularisations. Un vrai joker en somme. Au niveau pions-minutes jouées, seuls Didier Drogba, Robin van Persie et Carlos Tevez font mieux dans le Royaume. Surtout, Beck est le deuxième meilleur buteur du club derrière les neuf caramels de Tim Cahill. Ça vous classe le bonhomme. Pourtant, on dit le lascar un poil colérique. Une tête de con quoi. Flashback. Début avril, Everton démâte Wolverhampton sur ses terres (0-3). Beckford a ouvert la marque mais David Moyes le remplace à la 73ème. On est loin du crime de lèse-majesté. Toutefois, l’Anglais envoie un océan d’insultes dans la trogne de son entraîneur. L’Écossais le sèche verbalement. L’incident est clos mais montre à quel point le numéro 16 évolue sur une corde raide.
Ce comportement de diva n’a d’ailleurs jamais échappé à l’ami Moyes. » « Il peut s’installer durablement en Premier League. Il en a les capacités. Mais la question est de savoir s’il en a le désir. Il a peut-être envie de s’installer dans le confort qui est le sien aujourd’hui, avançait l’homme aux yeux de poisson. Il a marqué beaucoup de buts à Leeds, à Scunthorpe aussi. Il n’a pas le droit de marquer des buts et de se dire “j’ai fait mon boulot, ça s’arrête là”. A Everton nous avons besoin de plus. C’est à lui de jouer. J’ai hâte de voir à quel point il a envie de devenir un véritable joueur de première division » . C’est lâché. Jermaine est une faignasse doublée d’une tête de mule. C’est con pour un mec possédant de grosses qualités athlétiques et techniques. Au regard de sa taille (1m88), Beckford remue comme un diable. Sa panoplie est presque complète : il frappe des deux pieds, sait parfaitement dribbler en un-contre-un, décroche intelligemment et se défend plutôt bien dans les airs. Un régal pour n’importe quel entraîneur.
Sauf qu’un mec qui découvre le haut niveau à 27 ans, c’est louche. Robbie Savage, le teigneux milieu gallois, a peut-être même trouvé une explication. Beckford a le melon. « Il y a deux ans, au cours de ma pire période de prêt à Brighton, j’ai joué contre Pelé. Ouais, en fait, le nom du joueur sur la liste c’était Jermaine Beckford mais avec sa démarche arrogante sur le terrain cet aprem là, on aurait dit qu’il se prenait pour le légendaire Brésilien ». Reste à voir comment Beckford se pavanera sur la pelouse d’Old Trafford. Sa dernière visite lui avait plutôt bien réussie…
Mathieu Faure et Alexandre Pengloan
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