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L’Aeroplanino prêt à décoller
A peine intronisé, déjà au charbon. Vincenzo Montella débute dès ce soir sur le banc de l'AS Rome face à Bologne. Objectif : prendre moins de trois buts. Utopique ?
L’avion est sur la piste de décollage. Vincenzo Montella, le plus célèbre “Aeroplanino” d’Italie, fait ce soir ses grands débuts sur le banc de l’AS Rome, trois jours après la démission de Claudio Ranieri. A 36 ans, il devient le plus jeune entraîneur de l’histoire du club. Les illustres Capello, Zeman et autres Mazzone prennent un sacré coup de vieux. Drôle de destin pour celui qui portait, il y a encore moins de deux ans, les couleurs de la Roma. En l’espace de neuf saisons, il en est d’ailleurs devenu le quatrième meilleur buteur de l’histoire avec 83 buts, derrière Totti (195), Pruzzo (106) et Amadei (85). Plutôt honorable. Mais si au début des années 2000, Montella avait débarqué dans une équipe en pleine bourre, prête à contester le règne de la Lazio, il arrive aujourd’hui dans un moment délicat. Pour ne pas dire désastreux. La Roma a perdu ses quatre derniers matches officiels, en encaissant quatorze buts, dont neuf lors des secondes périodes. Premier chantier, donc : la condition physique catastrophique de l’équipe.
Deux jours d’entraînement, et un premier test. Montella n’a guère le temps de se mettre dans le bain. Ce soir, les Giallorossi se déplacent à Bologne, pour un match en retard de la 22ème journée de Serie A. Ce match aurait dû se jouer le 30 janvier. La Roma restait alors sur quatre victoires consécutives, dont une superbe à Turin contre la Juve (2-0) en quarts de finale de la Coupe d’Italie. Puis, comme un symbole divin, la neige s’est abattue sur Bologne. La rencontre a été reportée, et depuis ce jour, la Louve n’a plus gagné le moindre match. C’est donc face à Di Vaio et ses potes que Montella tentera de vaincre le signe indien. Un défi de taille sur fond d’ironie statistique : face à Bologne, l’ancien buteur a scoré neuf fois. Son record. « Cela fait vraiment plaisir de voir un gars comme lui sur le banc de l’AS Roma, surtout que c’est un passionné de football. C’est toujours compliqué de reprendre la place de quelqu’un qui vient de démissionner, mais lui a une véritable légitimité pour les supporters et les joueurs grâce à son passé en tant que joueur. Il a toujours été très apprécié ici » , analyse son ancien coéquipier et toujours pote Olivier Dacourt. De fait, chaque tifoso de la Louve a envers son nouveau coach une dette ad vitam eternam : il est le seul joueur de l’histoire a avoir claqué un quadruplé lors d’un derby (5-1). Cela vaut bien une certaine indulgence pour ses premiers pas sur un banc de Serie A.
Situation cocasse, Montella a joué aux côtés de la plupart des joueurs qu’il va entraîner. Il a côtoyé le Totti de la grande époque, a vu éclore De Rossi et a accepté d’être relégué sur le banc par Vucinic. C’est visiblement sur cette connivence et cette connaissance que la Présidente, Rosella Sensi, souhaite miser pour débloquer mentalement l’équipe. Car si la Roma a besoin de quelqu’un avant tout, c’est bien d’un fin psychologue. Depuis le début saison, elle a perdu cinq rencontres au cours desquelles elle avait pourtant ouvert la marque, et, à trois occasions (Bologne, Chievo, Genoa), elle n’a pas réussi à l’emporter avec deux buts d’avance à trente minutes de la fin. Une faiblesse que Montella a déjà assimilée. « Les joueurs traversent un moment de grande difficulté, mais ils sont sensibles et ils souffrent. Je crois beaucoup en leur volonté de rachat, même envers eux-mêmes. Pour moi, ce sera très important de parler avec certains d’entre eux, individuellement. Mais aucun doute : j’ai confiance en leurs capacités humaines et techniques » a déclaré le coach lors de sa toute première conférence de presse, hier. Quelques mauvaises langues (et pas seulement) voient en cet avènement une façon de passer les pleins pouvoirs du vestiaire à Francesco Totti. D’autres pensent plus simplement que c’est une solution d’urgence pour terminer la saison, avant de confier le club à un entraîneur aux épaules plus solides. « Selon moi, pour Montella ce n’est pas un véritable contrat, c’est une solution temporaire pour quatre mois. Je suis le premier à espérer que cela dure plus longtemps, car il le mérite, mais cela dépendra aussi des résultats obtenus » affirme Dacourt. Carlo Ancelotti, en désuétude du côté de Chelsea, semble le premier nom sur la liste du groupe américain qui est censé racheter le club dans les prochaines semaines.
En attendant, le présent s’appelle Vincenzo Montella, et il débute ce soir, au stadio Dall’Ara. Une victoire serait salutaire, puisqu’elle ramènerait la Roma à la sixième position, à six points de la zone Ligue des Champions. Coup de chance, l’aéroport Guglielmo Marconi de Bologne est l’un des plus étendus d’Italie. L’Aeroplanino va pouvoir décoller en douceur. Attention tout de même aux oiseaux dans les réacteurs.
Eric Maggiori
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