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Kroos Country
Absolument royal contre Liverpool mardi dernier, Toni Kroos retrouve aujourd'hui toute sa superbe. Cela tombe bien : le Real Madrid s’apprête à accueillir le FC Barcelone dans un Clásico potentiellement décisif dans l’attribution du titre de champion d’Espagne. Alors, rebelote ?
Cela peut surprendre au premier abord, mais cette semaine européenne ne doit pas être résumée en un cuisant échec pour l’Allemagne. Certes, le Borussia Dortmund est reparti de l’Etihad Stadium de Manchester avec une défaite amère à digérer. Certes, le Bayern Munich s’est pris les pieds dans le tapis et s’est cogné au mur Keylor Navas en accueillant le Paris Saint-Germain. Mais heureusement pour nos voisins allemands, l’éclaircie est venue de Madrid. Lors de l’affiche de gala entre le Real Madrid et Liverpool, Toni Kroos a tout simplement été au-dessus du lot.
Détonateur de la Maison-Blanche dans la partie, le numéro 8 des Blancos a offert l’ouverture du score à Vinicius Junior grâce à un mouvement de la main pour lancer l’appel de son partenaire, suivi d’une ouverture digne d’un quarterback. Décollage : le ballon s’envole, le temps se suspend et la trajectoire parfaite de la passe trouve la poitrine du Brésilien pour amorcer la finalisation de l’action. Galette ou caviar, appelez cette gourmandise comme vous le voulez. Kroos régale et ce n’est qu’un début.
Buenos días pic.twitter.com/BlYRBTG0aS
— Lassana (@_Lassana_) April 7, 2021
« Plus le match est difficile, plus il joue bien »
Dans les faits, minimiser la performance du milieu de terrain allemand à cette passe décisive serait trop réducteur. Madrilène le plus sollicité avec 86 ballons touchés au cours de la rencontre face aux Reds, Kroos a effectué 80 passes au total pour 93% de réussite et 6 interceptions. Si l’on étend ces statistiques à l’intégralité de la saison, son taux de passes réussies reste très élevé (92%) et sa faculté de récupération monte à 119 interceptions dont 51 dans la moitié de terrain adverse, le tout en 42 matchs sur l’exercice 2020-2021. S’il marque beaucoup moins par rapport à la saison précédente (2 buts contre 9), Kroos se rapproche à grande vitesse de son total de passes décisives (10 contre 11 en 2019-2020) et confirme son rôle d’arme fatale. « Kroos est incroyable, expliquait Emilio Butragueño mardi soir. Plus le match est difficile, plus il joue bien. En dehors de cela, sa capacité technique à choisir ce qu’il faut faire, ses passes de trente mètres ou ses passes courtes. C’est un véritable maître de la distribution, c’est un privilège de l’avoir dans notre équipe. » Voilà maintenant sept saisons que Kroos enchante les socios du Real et à 31 ans, son niveau tutoie toujours autant l’excellence.
Le plus impressionnant, c’est que la formule magique de cet adepte du badminton semble se trouver dans l’évidence. « Dès que j’ai la balle, j’essaie d’appréhender tout le terrain devant moi pour choisir la meilleure solution pour l’équipe, explique l’intéressé dans le numéro 165 de SO FOOT sorti en avril 2019. Une passe courte, une transversale pour changer de côté, une passe vers l’avant. Je ne suis pas quelqu’un qui va chercher la difficulté. J’essaie juste de jouer le plus simple possible. Et à mes yeux, c’est le plus compliqué : trouver la meilleure des solutions simples. »
Également en charge des coups de pied arrêtés au Real Madrid, Kroos peut aussi compter sur ses indissociables partenaires Luka Modrić et Casemiro pour maintenir le club merengue au milieu des étoiles, là où il doit se situer en permanence. Toujours bien coiffé et sans donner l’impression de transpirer dans un match, que ce soit dans une tunique blanche, noire ou colorée, Toni Kroos incarne la classe à l’état brut sur tous les tableaux (père de famille, il gère sa propre fondation qui s’occupe d’enfants handicapés, autistes, malades ou déficients mentaux, a pris position en faveur des réfugiés en Allemagne et a critiqué l’attribution du Mondial 2022 au Qatar) faisant de sa personne un ambassadeur idéal et infroissable.
Schuster dans les choux
Malgré tout, certains ont parfois critiqué le meilleur passeur du Mondial 2014. À la suite d’une élimination face au FC Barcelone lors de la Coupe d’Espagne 2018-2019, Bernd Schuster avait notamment qualifié son compatriote de « tracteur diesel » qui « avance au petit trot et ne fait rien ». Très sobrement, Kroos avait envoyé un tweet teinté d’ironie pour mieux ignorer son détracteur tout de même passé par l’Atlético, le Real et le Barça. Unique joueur allemand à avoir remporté quatre fois la prestigieuse Ligue des champions, Kroos ne reçoit de leçons de personne, si ce n’est de son entraîneur Zinédine Zidane qu’il considère comme un footballeur « tellement fort qu’il aurait pu jouer à n’importe quelle époque ».
Pour signer au Real à l’été 2014, Kroos n’avait pas hésité à tourner le dos au Bayern Munich, à un an de la fin de son contrat et obliger ainsi le club bavarois à se séparer de son diamant pour… 25 millions d’euros. L’affaire de la décennie. Et aujourd’hui ? Kroos ne compte plus partir et l’affirme. « Si je veux effectivement terminer ma carrière ici, à Madrid, c’est que du point de vue du football, tu ne trouveras jamais mieux ailleurs. Jamais. » Reste une question en suspens : le Real Madrid parviendra-t-il un jour à trouver un meilleur milieu de terrain que Toni Kroos ?
Par Antoine Donnarieix