L'avant-garde féminine
Et notamment celui de Megan Rapinoe. L’internationale américaine avait reproduit son geste par solidarité. Depuis, la capitaine de la sélection nationale a remporté une Coupe du monde et elle s’est presque métamorphosée en l’une des porte-paroles les plus crédibles de l’opposition à Donald Trump. Elle représente du coup l’image, forcement idéalisée, d’un foot féminin fer de lance progressiste contre le patron de la Maison-Blanche et de ce qu’il incarne idéologiquement. Autrement dit, selon les propres mots de l’actuelle joueuse du Reign FC de Seattle, « un nationaliste blanc » . Rapinoe a donc tout naturellement rejoint la vague de protestation, partageant le slogan « le racisme ne s'aggrave pas, il se fait filmer » . Elle n’est toutefois pas la seule à s’exprimer. Ainsi, Alex Morgan des Orlando Pride a tweeté pour sa part : « Tellement écœurée par le meurtre brutal de George Floyd par la police. Quand tous les Américains seront-ils traités et respectés également, indépendamment de la race et du sexe ? Nous aspirons à un véritable leadership et à l'inclusion par le haut. » Un discours qui vaut programme politique.
Toutefois, leurs homologues masculins ne sont pas restés totalement atones. De la sorte, Weston McKennie, qui évolue à Schalke, a porté samedi contre le Werder Brême un brassard « Justice for George » et de s’expliquer ensuite dans un tweet : « Pouvoir utiliser cette tribune pour attirer l’attention sur un problème qui dure depuis trop longtemps, ça fait du bien !!! » Preuve que la reprise de cette compétition peut au moins servir à quelque chose. Naturellement, l’écho du message des soccer boys, qui plus est outre-Atlantique, s’avère bien moins puissant que celui des stars du sport US. Parce que le poids des sportifs y a une dimension autrement plus forte. Mais aussi parce que les problématiques, en grande partie liées au sort des Afro-Américains, explosent actuellement à la face des États-Unis.
Et en France ?
Cette actualité n'a pas échappé à nos footeux tricolores. Marcus Thuram du Borussia Mönchengladbach, après avoir inscrit son but face à l'Union Berlin (4-1), s’est agenouillé dans une évidente allusion à ce qui se passe en ce moment de l’autre côté de l’Atlantique. Une attitude qui n’étonne pas pour le fils de Lilian Thuram qu'il est. Kylian Mbappé s’est, lui, faute de terrain pour s’exprimer, fendu d’un tweet « Justice for George » . Une prise de position fort rare pour le buteur parisien, surtout concernant ce type de sujets.
— Kylian Mbappé (@KMbappe) May 30, 2020
En effet, alors que la France a connu elle aussi son lot de drames et de scandales associant les questions des brutalités policières et du racisme, les footballeurs se sont pour l’instant plutôt tenus à l’écart des mobilisations concernant leur propre pays. Cependant le silence des stars à crampons doit aussi s’interpréter à l’aune d’une société française qui, dans son ensemble, pour l’instant, jette un voile pudique, ou détourne les yeux, devant les « excès » des forces de l’ordre. Les modalités de la répression exercée lors des manifestations des gilets jaunes éclairant à ce propos la chape de plomb qui d’habitude tombe sur les banlieues (et parfois les supporters). Et ce ne sont évidemment pas les footballeurs qui vont briser ce tabou. Ils pourraient, à l’image de leur confrères et consœurs US, au moins essayer de jouer un peu plus « à domicile » ...
Par Nicolas Kssis-Martov
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