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John Dick fait jouir le Sparta Prague
Si la République tchèque peut compter sur les clubs de la capitale, Prague, pour se montrer sur la scène européenne, elle peut avant tout remercier deux pionniers écossais qui lui ont fait découvrir le ballon rond. John Madden, avec le Slavia Prague, et John Dick, avec le Sparta.
Nombreux sont les pays qui se disputent le titre d’inventeur du football. Si on ne peut pas réellement trancher le débat, tant les origines du ballon rond sont anciennes, géographiquement éparpillées et variées, on peut reconnaître aux habitants du Royaume-Uni une certaine primauté sur la question. C’est bien sur les terres de la perfide Albion que le football tel qu’on le connaît est né, et de là qu’il a été exporté un peu partout dans le monde. Si on sait que ce sont grâce aux habitants d’outre-Manche que les Brésiliens ont, par exemple, développé leur amour pour le football, on sait moins que ce sont aussi grâce aux Anglais que les pays de l’Europe de l’Est ont découvert ce jeu de balle. Quelques années après l’arrivée de John Madden, Écossais manager du Slavia Prague jusqu’en 1930, c’est John Dick, un autre Écossais, qui est venu faire vibrer le Sparta Prague. Il est encore aujourd’hui considéré comme une légende du club.
Pilier de Woolwich Arsenal
Né à Eaglesham dans le Renfrewshire en 1876, John Dick aurait pu ne jamais jouer pour Woolwich Arsenal sans l’intervention d’un homme, William Elcoat. Ce manager emblématique des jeunes années du club de Londres avait, en 1898, ouvert la porte à plusieurs joueurs écossais. Infatigable milieu de terrain récupérateur, John Dick est alors connu dans tout le pays pour son endurance extraordinaire. Ses capacités physiques lui permettent d’accomplir ce qui paraît impensable pour tout autre joueur de l’époque : de 1898 à 1912, il parvient à disputer 284 matchs pour Woolwich Arsenal. En des temps où les joueurs voyagent de club en club, John Dick devient le tout premier one man club de l’histoire du football anglais. Outre son nom qui a forcément inspiré des générations d’acteurs X, John Dick est aussi tout ce dont peut rêver un milieu de terrain à cette époque.
S’il n’est pas un grand buteur, il parvient tout de même à inscrire 13 buts sous le maillot de ceux qui deviendront plus tard les Gunners. Il inscrit le seul doublé de sa carrière le 12 mars 1900 lors d’un match à sens unique face à Loughborough (12-0). Après un long temps passé à la récupération, il est déplacé sur l’aile droite. Lors de la saison 1903-1904, pendant laquelle Arsenal parvint à quitter la deuxième division pour rejoindre l’élite, il est même capitaine. Après tant d’années de bons et loyaux services, il est finalement renvoyé sur le banc, puis en équipe réserve, à partir de la saison 1905-1906. C’est alors qu’il commence à réfléchir à une possible carrière d’entraîneur, à l’étranger.
Prague wants the D
Comme l’explique Richard McBrearty du Scottish Football Museum, John Dick devient, en 1912, coach du Deutscher FC. Tout comme l’a fait Madden avec le Slavia Prague, Dick imprime à son nouveau club les valeurs qui guident sa vie : rigueur, dévotion, acharnement. Pour sa première saison en tant qu’entraîneur, il remporte le championnat de Bohême. C’est évidemment à cause de ses multiples succès à la tête du Deutscher FC qu’il est repéré, puis recruté par le Sparta Prague. En 1919, il rejoint alors le club de la capitale et forme une véritable équipe de champions, dont les statistiques donnent encore aujourd’hui le tournis. Entre 1919 et 1923, le Sparta remporta cinq titres de champion de suite. Sur 59 matchs officiels disputés, les joueurs n’en perdent qu’un seul. Ils marquent 235 buts pour n’en encaisser que 46… À tel point qu’en 1920, l’équipe de football tchécoslovaque des Jeux olympiques comprend dix joueurs du Sparta.
L’équipe de John Dick est même si impressionnante qu’elle est alors considérée comme la meilleure d’Europe. Elle est d’ailleurs surnommée Železná Sparta (le Sparta de fer). L’exploit de John Dick est de taille, d’autant qu’il a dû composer avec une équipe dont la plupart des joueurs cadres ne sont pas revenus vivants de la guerre. C’est donc en faisant table rase du passé qu’il est parvenu à ériger la meilleure équipe de l’histoire du Sparta. La bataille avec le Slavia de Madden commence dans les années 1920. Ce dernier remporte le titre en 1925, 1929 et 1930, tandis que le Sparta le gagne en 1926, 1927 et 1932. En 1927, John Dick mène même son équipe en finale de la Mitropa Cup, une des premières tentatives de Coupe d’Europe. Bref, sans l’intervention de ce très grand monsieur Dick, la Tchécoslovaquie n’aurait sans doute jamais franchi un tel palier. Monsieur Dick, vous avez fait grandir le Sparta.
Par Gabriel Cnudde