Bonjour Annabelle. Vous avez touché un chèque de près de 4 000 euros grâce aux enchères des chèvres de l’OM. Est-ce que vous suivez le football ?
Non, je dois avouer que je ne suis pas une amatrice de foot. Mais mon petit l’est, il joue dans un petit club local et il est supporter de l’OM.
Est-ce que vous allez vous rendre au stade dorénavant ? Histoire de remercier l’OM est ses supporters ?
En fait, c’est surtout les Winners que je remercie. Indirectement, je remercie aussi les joueurs, parce qu’ils ont mal joué. (Rires) Après oui, si j’ai l’occasion d’emmener mon fils au Vélodrome, je le ferai parce qu’il serait vraiment aux anges.
Je veux rester une toute petite ferme, une petite exploitation d’une vingtaine de chèvres et je m’installe sans aide de l’État et sans aide de la banque.
Vous êtes d’accord avec la CAPA, quand elle dit que comparer les joueurs de l’OM à des chèvres, c’est peu flatteur pour les chèvres ?
C’est une boutade ! Je pense que les chèvres s’en fichent. C’était sur le ton de l’humour, et au final, ça s’est terminé en histoire de partage et de générosité. Ça m’a beaucoup touché.
Vous vous attendiez à ce que ça prenne une telle ampleur ?
Non, pas du tout. J’ai été très surprise par l’appel de la Coordination rurale(Syndicat agricole, ndlr), qui a été touchée par mon projet, que j’avais lancé sur une plateforme qui s’appelle « MiiMOSA » . Ils m’ont contacté, ils m’ont raconté l’histoire et je suis un peu restée bête ! C’est généreux de leur part et de la part des Winners.
Pourquoi vous ?
Suite à la volonté des Winners de reverser cet argent à un agriculteur qui en avait besoin, la Coordination rurale était à la recherche de personnes qui s’installaient et élevaient des chèvres dans la région PACA. Ils ont vu mon projet et ma vidéo, et ça les a touchés.
Mais concrètement, qu’est-ce qui a fait la différence ? Pourquoi vous, plutôt qu’un autre ?
Sans doute parce que moi, je veux rester une toute petite ferme, une petite exploitation d’une vingtaine de chèvres et je m’installe sans aide de l’État et sans aide de la banque. Si je voulais des aides de l’État, on m’obligeait à m’agrandir, alors que je défends l’agriculture paysanne et de proximité. C’est cette philosophie-là qui a fait la différence.
Il consiste en quoi votre projet ?
Je veux m’installer avec mon troupeau pour faire du fromage de chèvres en agriculture bio et maintenir l’agriculture rurale dans mon village.
À quel point est-il devenu difficile, aujourd’hui, d’être agriculteur en France ?
En tout cas dans les chèvres, c’est très difficile. La conjoncture économique actuelle ne nous permet pas de vivre de ce qu’on donne. On produit, mais on n’est pas payé. La plupart des agriculteurs vivent avec les primes européennes de la PAC (Politique agricole commune, ndlr) et c’est un gros problème parce qu’ils ne donnent de l’argent que lorsqu’ils estiment en avoir assez. Sinon, ben on attend.
Vous faites comment pour vivre et élever une famille au quotidien alors ?
Je suis obligée de travailler à côté en parallèle. Personnellement, j’ai beaucoup travaillé à la poste, en remplaçant des facteurs. C’est le lot de beaucoup de travailleurs agricoles.
Il y a aussi le problème des loups…
Absolument, c’est devenu un gros problème en plus. On est obligés de rentrer nos bêtes le soir, on ne peut pas les laisser. Et quand je ne rentre pas les miennes, je dors avec, je ne peux pas les laisser. Les gens ne se rendent pas compte, certes le loup est un animal noble, mais on aime nos bêtes. C’est comme ma famille ou mes enfants. Imaginez qu’un artisan se retrouve chaque semaine avec son commerce vandalisé, c’est la même chose! Il y a une souffrance morale énorme pour l’éleveur, sans parler de celle physique pour les animaux.
Avant tout, je suis riche de cette belle journée passée avec les Winners, qui sont des passionnés, comme moi. C’était un échange humain chaleureux et je les remercie énormément.
Ça ne vous fait pas peur, à vous ou à vos enfants, de dormir avec vos animaux en sachant qu’ils peuvent être attaqués ?
Tant que je suis en bonne santé, je sais que les loups s’en prendront d’abord aux chèvres ou aux enfants, à quelqu’un de plus faible. Mais le souci, c’est que tant qu’il n’y aura pas eu une attaque sur l’homme, les personnes qui se disent « écolos » ne feront rien. Ces gens-là dirigent un parti politique dans des bureaux à Paris. Ils connaissent la nature par procuration, et je les invite à partager la vie d’un berger pour se rendre compte et toucher la vérité ! Il n’y a pas besoin d’avoir une étiquette politique pour se dire écolo et respecter la nature et la planète sur laquelle on vit !
On vous sent très passionnée. D’ailleurs, c’est un métier où il faut l’être. D’où vous vient cette passion ?
Mes grands-parents étaient paysans. Je gardais les brebis avec ma grand-mère quand j’étais petite et ça m’a beaucoup marqué. L’exploitation de ma belle-famille était vouée à l’abandon, et pour moi, c’était hors de question. C’est viscéral, je veux être le maillon manquant dans la chaîne et transmettre le virus de l’agriculture de proximité aux générations futures.
C’est un point commun avec les supporters de foot, cette passion qui vous animent ?
Écoutez, la passion, c’est un moteur. Personne n’en mesure la force, mais c’est ce qui anime le sport comme l’agriculture et beaucoup d’autres métiers. C’est ce qui permet le rassemblement et le partage, et c’est ce que j’aime personnellement. Avant tout, je suis riche de cette belle journée passée avec les Winners, qui sont des passionnés, comme moi. C’était un échange humain chaleureux et je les remercie énormément.
C’est vrai que vos chevreaux ont été baptisés comme les joueurs de l’OM ?
Oui, c’est l’idée de Noé, mon petit. Mais attention hein, c’est par affection, pas pour se moquer ! Il a des chevreaux et des joueurs préférés donc voilà. Il y a aussi les numéros des chevreaux qui sont à l’origine de certains noms, par rapport au maillot des joueurs. (Rires)
Quels sont ses chevreaux-joueurs préférés ?
Il faudrait lui demander, mais je sais qu’il y a Mandanda, Alessandrini et Thauvin, mais je ne les connais pas, moi ! (Rires)
Concrètement, il va vous servir à quoi cet argent ?
J’ai les terres et les chèvres, mais je n’ai pas la fromagerie. Je suis bénévole et m’installer par mes propres moyens, c’est très long. Il était vraiment temps que je demande un coup de pouce pour m’acheter le gros œuvre et les matériaux pour construire cette fromagerie.
Ce chèque représente quelle partie de votre budget total ?
Je dirais un gros quart ou un petit tiers. C’est quand même un beau coup de main, c’est comme si j’avais gagné au Loto sans y jouer !
Vous leur souhaitez quoi, aux supporters de l’OM pour la suite ?
Je les invite à venir passer un séjour à la montagne ! (Rires) Non, je leur souhaite que leurs joueurs soient plus à la hauteur de leur passion. Que les joueurs prennent conscience que les gens les soutiennent vraiment, parce que je peux vous dire que les Winners, ils sont à fond et ils sont très investis.
Pour en savoir plus sur le projet d’Annabelle.
Les regrets de Pablo Longoria avec l’OM