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Ils ont joué à la Lazio et à la Roma

Par Éric Maggiori
10 minutes
Ils ont joué à la Lazio et à la Roma

Nouveau joueur de l'AS Roma, Aleksandar Kolarov rejoint le cercle fermé de ceux qui ont porté le maillot des deux clubs de la capitale italienne. Or, qu'il soit prévenu : à Rome, l'accueil a rarement été chaleureux pour un joueur coupable de haute trahison.

Fulvio Bernardini

Lazio 1923-1926 AS Roma 1928-1939

Le pionnier. Né à Rome, mort à Rome, Fulvio a dédié pratiquement toute sa vie à sa ville bien-aimée. À tel point qu’il n’a jamais su choisir. Lazio ? AS Roma ? Non, lui aimait juste Rome, peu importe la couleur. Ainsi, après avoir été formé à la Lazio, il a porté le maillot de l’équipe première de 1923 à 1926. Il faut dire qu’à cette époque, la Roma n’existe pas encore, puisqu’elle est née en 1927 de la fusion entre plusieurs clubs de Rome. Après un bref passage à l’Inter, Bernardini signe donc à la Roma en 1928. Il y restera onze ans, jusqu’en 1939, avant de finir sa carrière dans un petit club romain de quartier, la MATER (Motori Alimentatori Trasformatori Elettrici Roma). Une fois les crampons raccrochés, il devient entraîneur. Et quelles équipe va-t-il entraîner ? La Roma, en 1949-1950, puis la Lazio, pour ne pas faire de jaloux, de 1958 à 1960. L’homme d’une ville, plus que d’une rivalité.


Luigi Ziroli

AS Roma 1927-1928 Lazio 1929-1931

Lorsqu’il débute sa carrière en 1924, Luigi Ziroli a l’embarras du choix : dans quel club romain va-t-il jouer ? À la Lazio ? À l’Alba Roma ? À la Fortitudo ? À la Roman ? À la MATER ? Ce sera l’Alba Roma, club au maillot vert et blanc, dont il portera les couleurs de 1924 à 1926. Lors de l’été 1926, l’Alba Roma devient l’Alba Audace. Ce sont les prémices de la grande fusion entre tous les clubs de la ville, souhaitée par le régime fasciste. Une fusion que tous les clubs acceptent, sauf la Lazio. En 1927, Luigi Ziroli devient donc un joueur de la toute nouvelle AS Roma. Mais il n’y restera qu’une seule saison, avant de plier bagages, direction Venise. Loin des yeux, près du cœur : il revient à Rome douze mois plus tard, et s’engage cette fois-ci avec la Lazio avec laquelle il disputera les deux premières éditions de la Serie A.


Attilio Ferraris

AS Roma 1927-1934 Lazio 1934-1936

Attilio Ferraris a fait ce que personne d’autre, dans l’histoire, n’a osé faire. Il a joué à la Roma, est parti à la Lazio, puis est revenu à la Roma. Originaire du quartier du Borgo, à Rome, il débute sa carrière à la Fortitudo. Mais en 1927, la Fortitudo fusionne avec d’autres équipes et devient l’AS Roma. Déjà joueur de la Nazionale, Attilio Ferraris devient alors le premier capitaine de la squadra giallorossa, dont il est aussi l’un des symboles. Pourtant, en 1934, après avoir été mis hors de l’effectif de la Roma pour de trop nombreuses embrouilles avec ses entraîneurs (Attilio était connu pour avoir le vice du jeu et de la cigarette, ce qui donnait souvent lieu à des « incompréhensions » avec ses coachs), il quitte le club dont il est l’idole pour rejoindre l’ennemi juré, la Lazio. Il y dispute deux saisons, puis partira à Bari. Et en 1938, sans aucun scrupule, il décide de revenir à la Roma, pour une dernière saison dans l’élite, à 35 ans. Sans que personne n’ose vraiment lui en vouloir.


Arne Selmosson

Lazio 1955-1958 AS Roma 1958-1961

Il est le premier joueur dont le passage d’une rive du Tibre à l’autre a fait les gros titres. Nous sommes en 1958. Arne Selmosson, grand attaquant suédois révélé à Jönköpings Södra, fait les beaux jours de la Lazio depuis 1955. À Rome, il est très apprécié par les tifosi laziali, qui n’ont pas retrouvé de véritable bomber depuis le départ de l’inégalable Silvio Piola. Le 16 mars 1958, il entre encore plus dans les cœurs en inscrivant un but décisif lors du derby contre la Roma, remporté 2-1 par la Lazio. Tout était parfait jusqu’à ce que, à l’été 1958, le Suédois ne décide de quitter la Lazio pour aller poser ses valises… à la Roma. Un transfert vécu comme une véritable trahison. Et comme Selmosson n’en a que faire des états d’âme, le 30 novembre 1958, il plante lors du derby, ce coup-ci contre la Lazio. Il récidivera dès le derby retour, en avril 1959. Il est, encore à ce jour, le seul joueur à avoir marqué un but lors du derby romain avec la Lazio et avec la Roma.


Lionello Manfredonia

Lazio 1975-1985 AS Roma 1987-1990

Voilà ce que Kolarov pourrait bien connaître en signant à la Roma : ne jamais être accepté par ses nouveaux supporters. C’est en tout cas ce qu’a connu Lionnello Manfredonia dans les années 1970-1980. Formé à la Lazio, il fait ses débuts en équipe première en 1975, juste après le Scudetto remporté par la bande à Chinaglia. Il va devenir l’un des joueurs les plus importants de l’équipe jusqu’en 1980, date à laquelle il est suspendu pendant deux ans à la suite de l’affaire du Totonero. Amnistié après la victoire de l’Italie au Mundial 82, il revient à la Lazio et aide le club à remonter en Serie A. Il y parvient dès la première saison, et tire finalement sa révérence en 1985, après dix années passées au club. Il part pour la Juve, où il reste deux ans. En 1987, à 31 ans, il souhaite un dernier challenge de haut niveau et s’engage alors avec la Roma. Problème : il est, aux yeux de tous, estampillé Lazio. La Curva Sud de la Roma va même créer un groupe intitulé Gruppo Anti-Manfredonia. Il mettra un terme à sa carrière en 1990, après avoir frôlé la mort sur le terrain en décembre 1989. Victime d’un malaise cardiaque, il est secouru très vite et s’en sort miraculeusement indemne.


Franco Cordova

AS Roma 1967-1976 Lazio 1976-1979

Probablement la plus haute trahison de cette liste. Discret joueur de Brescia, Franco Cordova signe à la Roma en 1967. Il en deviendra rapidement l’un des joueurs les plus importants. Avec le club giallorosso, il dispute 212 matchs, inscrit neuf buts, et est promu capitaine à partir de 1972. Encore plus fort : au début des années 1970, il épouse Simona Marchini, qui n’est autre que la fille d’Alvaro Marchini, le président de l’AS Roma. Cela semble écrit : Cordova va passer toute sa carrière à la Roma. Sauf qu’en 1976, après neuf saisons à Rome, il demande à être transféré. La Roma s’accorde avec le Hellas Vérone, mais Cordova refuse le transfert. Motif ? Il veut aller à la Lazio. Un choix incompréhensible pour les tifosi de la Roma. Pourtant, à l’été 1976, il s’engage bel et bien avec l’autre club de la Ville Éternelle. Il disputera trois saisons sous le maillot biancoceleste, pour un total de 85 matchs. 85 matchs avec l’un, 212 avec l’autre : aucun autre joueur n’a fait autant.


Angelo Peruzzi

AS Roma 1987-1989, 1990-1991 Lazio 2000-2007

Né à Blera, dans la région du Latium, Angelo Peruzzi a rejoint très tôt le centre de formation de l’AS Roma. Il est rapidement désigné comme le successeur naturel de Franco Tancredi dans les buts, et fait ses débuts en Serie A à 17 ans. Mais un cas de dopage va venir briser sa courbe de progression. Contrôlé positif à la phentermine, il est suspendu un an. De retour de suspension, la Roma le cède à la Juventus, où il écrira la plus grande partie de sa légende, en devenant le gardien de la Nazionale et en remportant la Ligue des champions. La troisième grande partie de sa carrière va néanmoins s’écrire à nouveau à Rome, mais de l’autre côté du Tibre. De fait, en 2000, et après un passage d’un an à l’Inter, il signe à la Lazio, fraîchement sacrée championne d’Italie. Il y restera sept ans, jusqu’à sa retraite en 2007. Avec un joli bilan de 192 matchs disputés, et une Coupe d’Italie remportée en 2004 contre… la Juventus.


Luigi Di Biagio

Lazio 1988-1989 AS Roma 1995-1999

Gigi Di Biagio évoque forcément de bons souvenirs aux Français. C’est lui, lors du Mondial 98, qui avait envoyé son tir au but sur la barre de Barthez, permettant aux Bleus d’accéder à la demi-finale. À cette époque-là, Di Biagio joue à la Roma et ses compagnons de route s’appellent Totti, Delvecchio et Di Francesco. Une idylle qui va durer quatre années, de 1995 à 1999, avec, malheureusement, aucun trophée à la clef, puisque la Roma remportera le Scudetto deux ans après son départ. Né à Rome, Di Biagio aurait pu être, comme Totti, De Rossi ou Florenzi, un fameux « Romain, né à Rome et Romanista » . Sauf que Gigi est formé… à la Lazio. Il était, à la fin des années 1980, l’un des joueurs les plus prometteurs du vivier biancoceleste, à tel point que le coach, Giuseppe Materazzi (père de Marco), lui a offert son baptême en Serie A le 11 juin 1989, à tout juste 18 ans, contre la Juventus. Mais cette apparition sera la seule avec le maillot laziale. Dès l’été 1989, il est vendu à Monza, en Serie B. Sans s’imaginer qu’il reviendrait à Rome six ans plus tard, avec un autre maillot.


Siniša Mihajlović

AS Roma 1992-1993 Lazio 1998-2004

Vainqueur de la Ligue des champions avec l’Étoile rouge de Belgrade en 1991, Siniša Mihajlović est convoité par les grands clubs italiens, et débarque à la Roma en 1992. Formidable tireur de coups francs, il va directement s’imposer comme l’un des meilleurs défenseurs du championnat d’Italie. Lors de sa première saison romaine, il brille notamment en Coupe d’Italie, en inscrivant cinq buts en sept matchs (la Roma s’incline en finale face au Torino). Mais c’est à la Sampdoria, sous les ordres de Sven-Göran Eriksson, que Mihajlović va entrer dans une nouvelle dimension. Et encore plus à la Lazio, à partir de 1998, toujours avec Eriksson. D’abord chahuté par les tifosi pour son passé giallorosso, il va rapidement mettre tout le monde d’accord, en inscrivant notamment 22 buts toutes compétitions confondues lors de ses deux premières saisons avec le maillot bleu ciel (dont un triplé sur coup franc en décembre 1998). Il restera six années à la Lazio, et n’a jamais caché, depuis, son grand amour pour le club laziale.


Diego Fuser

Lazio 1991-1998 AS Roma 2001-2003

Formé au Torino, puis passé par Milan et la Fiorentina, Diego Fuser débarque à la Lazio en 1992. Il est l’une des premières recrues du nouveau président laziale Sergio Cragnotti. Il sera, pendant six saisons, l’un des joueurs majeurs de l’équipe biancoceleste, aux côtés de Beppe Signori, Gigi Casiraghi, Paolo Negro ou Paul Gascoigne. Après le départ de Signori, en 1997, il récupère même pour une saison le brassard de capitaine. Et en avril 1998, c’est lui qui monte au ciel la Coupe d’Italie, premier trophée remporté par la Lazio depuis 1974. C’est d’ailleurs sur ce triomphe qu’il part à Parme, où il remportera la saison suivante la Coupe UEFA contre l’OM. Et en 2001, à la surprise générale, il décide de signer à l’AS Roma, au plus grand désarroi des tifosi laziali qui ne comprennent pas ce choix. à la Roma, il ne jouera toutefois pratiquement jamais, collectionnant seulement 15 apparitions en deux saisons. Prévoyant, le coach giallorosso, Fabio Capello, ne l’a jamais convoqué pour les derbys romains.


Aleksandar Kolarov

Lazio 2007-2010 AS Roma 2017-

Nouveau joueur de l’AS Roma, Aleksandar Kolarov va devoir assumer son statut d’ancien joueur de la Lazio. Les tifosi laziali lui ont déjà fait passer un petit message ce samedi ( « Kolarov, vermine » ) :

Tandis que ceux de la Roma n’ont pas vraiment été plus tendres il y a quelques jours au Circo Massimo ( « Kolarov, chien bâtard » ) :

En cause, de part et d’autre : les trois années passées à la Lazio entre 2007 et 2010, et ce but lors du derby de la saison 2008-2009, remporté 4-2 par la Lazio. Bon courage.


Auraient pu également être cités

Carlo Galli. Cinq saisons à la Roma entre 1951 et 1956, une consécration à l’AC Milan par la suite, et une fin de carrière à la Lazio, entre 1962 et 1966. Roberto Muzzi. Issu du centre de formation de la Roma, il dispute six saisons avec le maillot giallorosso. Neuf ans après son départ, il rentre à Rome, cette fois-ci à la Lazio. Où il ne laissera pas un grand souvenir. Alessio Romagnoli. Formé à la Roma, avec laquelle il a également fait ses débuts en Serie A, Alessio Romagnoli joue aujourd’hui à l’AC Milan. En août 2015, il réalise le troll ultime. Alors que la Roma officialise son transfert pour Milan, lui décide de fêter ce transfert en postant un selfie avec un maillot de la Lazio. Il admet alors être tifoso laziale depuis l’enfance.
Dans cet article :
L'annonce de transfert insolite d'un club tchèque
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Par Éric Maggiori

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