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  • 7 mai 1986 – Le jour où…

Helmuth Duckadam, le héros de Séville

Par Régis Delanoë
Helmuth Duckadam, le héros de Séville

Une finale de Ligue des champions entre Barcelone et le Steaua Bucarest à Séville, 120 minutes d'ennui jusqu'à la loterie des tirs au but qui va révéler un héros dans les rangs roumains : le gardien Helmuth Duckadam, qui repousse toutes les tentatives catalanes pour permettre aux siens de conquérir un titre historique. Quelques minutes de gloire pour des années de malheur. C'était il y a 29 ans jour pour jour.

La Ligue des champions, à l’époque, n’avait rien à voir avec la formule d’aujourd’hui. Il faut la prendre au sens littéral du terme, avec une opposition entre champions nationaux et basta, sans phase de poules. La France, par exemple, n’était représentée lors de cette saison 1985/86 que par son champion en titre Bordeaux, éliminé dès le premier tour en deux manches par les Turcs de Fenerbahçe. Les Anglais, eux, étaient carrément bannis de la compétition suite au drame du Heysel qui venait de se produire. Quant aux Espagnols, il n’y avait pas d’armada de Liga comme aujourd’hui au début du tournoi, mais le seul FC Barcelone. Un Barça pas flamboyant qui plus est, emmené par Terry Venables sur le banc et Bernd Schuster sur la pelouse. Pas une machine de guerre comme actuellement, néanmoins un niveau de jeu suffisant pour se hisser jusqu’en finale, après un parcours difficile et des qualifications obtenues à chaque fois à l’arraché face au Sparta Prague, à Porto, à la Juve et à l’IFK Göteborg (qui menait 3-0 à l’issue de la demi-finale aller pour finalement se faire sortir aux tirs au but). Voilà le FCB en finale, organisée en plus en Espagne, au stade Sánchez-Pizjuán de Séville, avec a priori une opposition abordable face au Steaua Bucarest.

Un parcours facile, une finale fermée

Là encore, il faut bien se remettre dans le contexte de l’époque. Dans l’ambiance de guerre froide et de suspicion qui règne alors, plus de trois ans avant que le Mur ne tombe, les formations du bloc de l’Est sont une énigme et suscitent bien des fantasmes, entre fascination et suspicion. Difficile, à l’orée de cette finale, de mesurer le vrai niveau de cette équipe roumaine qui a eu jusqu’à présent un parcours facile – et qui prête à sourire aujourd’hui : élimination des Danois de Vejle au premier tour, puis les Hongrois du Honvéd Budapest, puis les Finlandais de Kuusysi en quarts (!) pour finalement sortir Anderlecht en demies, la seule vraie perf de sa campagne avant cette opposition face au Barça, abordée forcément en qualité d’outsider à grosse cote. Bernd Schuster et ses coéquipiers évoluent devant un public acquis à leur cause, face à une équipe roumaine dont ressortent tout de même quelques fameux noms : le maître à jouer Marius Lacatus, le buteur Victor Pițurcă, le milieu László Bölöni ou encore le jeune défenseur central Miodrag Belodedici. Le gardien ? Personne ne le connaît alors. Un inconnu nommé Helmuth Duckadam, qui n’est pas encore entré dans l’histoire… En attendant, la partie se joue et l’ennui gagne les tribunes avec aucun but marqué et très peu d’occasions. Barcelone domine, mais ne parvient pas à déstabiliser ces Roumains parfaitement organisés et collectivement solidaires, façon bloc de l’Est, si on veut céder à la caricature facile. Après 90 minutes de jeu, 0-0. Idem après 120 minutes, la coupe aux grandes oreilles va se jouer en cette saison 1985/86 à la loterie des tirs au but.

Deux tirs marqués pour huit tentatives

C’est là que l’inconnu Duckadam devient un héros. Pour toujours, « le héros de Séville » . Pas même un quart d’heure de gloire, une petite dizaine de minutes comme dans un rêve, façon joueur de loto qui voit les bons numéros s’afficher à la télé le soir du tirage. Voici comment il le racontait il y a quelques années lors d’une interview accordée au site de l’UEFA : « Alexanko était le premier tireur. J’ai choisi de partir à droite, il a tiré de ce côté, j’arrête cette première tentative » . Heureux hasard. « La seconde tentative, j’ai essayé d’imaginer ce que pensait le tireur, Pedraza. Il devait s’imaginer que comme j’avais arrêté un ballon à droite, j’allais plonger à gauche, alors je suis encore parti du même côté droit et j’ai encore réussi l’arrêt. » Belle intuition. « Le troisième tir était pour Pichi Alonso. Là, ce fut simple de choisir : tout gardien qui fait deux arrêts à sa droite finit par choisir de plonger à gauche, alors j’ai décidé d’aller à l’encontre de la logique et de partir encore à droite, à raison. » Un calcul payant. « Avec le quatrième tir, j’avais un problème. Je me demandais ce que Marcos allait faire. Allait-il copier les tentatives toutes échouées de ses coéquipiers ? Je me suis dit que non et je suis cette fois parti à gauche. » Quatrième tir et quatrième arrêt pour Duckadam, qui offre le titre aux siens sur le score famélique de 2-0 aux tirs au but, les deux premières tentatives roumaines ayant également échoué ! Le Steaua est champion d’Europe à la surprise générale, pour la première fois de son histoire, grâce à un portier de 27 ans promis, c’est évident, à la gloire. Ce match de Séville est pourtant le dernier de haut niveau auquel il prend part.

Son éloignement : thrombose ou torture ?

Car si Helmuth Duckadam est aujourd’hui dans la légende, ce n’est pas seulement pour cette miraculeuse séance de tirs au but, mais pour ce qui s’ensuit le concernant. Une histoire mystérieuse, typique de l’époque, avec des questions sans réponse et pas mal de fantasmes pour essayer de combler les vides. La version officielle, approuvée par Duckadam en personne, est la suivante. En rentrant en Roumanie après cette finale victorieuse, le portier s’accorde des vacances au bord de la mer Noire, qu’il doit écourter à cause de fortes douleurs au bras droit. Les examens médicaux détectent une thrombose qu’il faut opérer en urgence. « J’ai eu de la chance de jouer la finale, alors que, déjà à l’époque, je ressentais une gêne sans savoir ce que c’était. Diagnostiqué plus tôt, je n’aurais sûrement pas été autorisé à jouer à Séville » , analysait-il, toujours lors de l’interview pour l’UEFA. Diagnostiqué plus tard, ça aurait pu lui valoir carrément une amputation, toujours d’après la version officielle. Duckadam aurait ensuite subi d’autres opérations, ce qui l’aurait empêché de poursuivre sa carrière sportive, qui ne reprend que trois ans plus tard en 1989, pour deux dernières saisons anonymes en D2 roumaine. L’autre version évoquée ci et là, la voici : le gardien se serait vu remettre une belle Mercedes après la finale par le président du Real, tout heureux de la non-victoire du rival Barcelone. Berline de luxe qui aurait été réclamée par Nicu Ceaușescu, le fils cadet alcoolique et violent du président Nicolae. Face au refus de Duckadam de la lui céder, il aurait reçu la visite de la Securitate, qui aurait fait en sorte que le gardien ne puisse plus mettre les gants, lui brisant mains et poignets… Dans la Roumanie de l’époque, une telle histoire ne serait pas étonnante, mais rien n’a jamais pu prouver qu’il soit arrivé telle aventure à Duckadam, lequel s’en est toujours tenu à la version officielle, alors même qu’il y a aujourd’hui largement prescription.

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Par Régis Delanoë

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