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Girondins de Bordeaux, le point com

Par Nélio Da Silva et Mathias Edwards
Girondins de Bordeaux, le point com

Cette saison, les Girondins de Bordeaux ratent quasiment tout sur le terrain, au point d'être en queue du peloton de la Ligue 1, mais leur direction - Gérard Lopez en tête - est pour l'instant épargnée par les critiques. Mieux, leur public continue à faire bloc derrière son équipe, même si une mini-bronca a résonné dans le Matmut-Atlantique dimanche dernier lors de la défaite face à Troyes. Mais comment font-ils ?

À 11 journées de la fin du championnat, les Girondins ferment le classement de Ligue 1. Avec seulement 4 victoires et 22 points dans la besace, ils effectuent une saison catastrophique. Pourtant, les supporters bordelais font en grande majorité bloc derrière leur équipe, et surtout ses dirigeants. De l’extérieur, la situation étonne, surtout après les deux années de lutte acharnée des Ultramarines, principal groupe de supporters du club, contre les directions précédentes. Mais à y regarder de plus près, cette « union sacrée » autour du club s’explique facilement, tant Gérard Lopez et ses équipes ont peaufiné leur communication au cordeau.

Retour du logo, maillot collector et bus de ramassage de supporters

Le 23 juillet dernier, lors de sa première conférence de presse en tant que président-propriétaire des Girondins, Gérard Lopez tape fort. Après avoir affirmé qu’il nourrissait des « attentes élevées » et martelé son désir de « faire revivre les Girondins à un niveau qui devrait être le leur », il annonce sa première décision. Exit le logo « Bordeaux Girondins », symbole de la précédente direction honnie de tous. Le tout en dégainant une punchline: « On ne va pas revenir à l’ancien logo, mais au logo des Girondins de Bordeaux. » Le message est clair : sous la précédente direction, le club était mort, dépossédé de son identité, et Gérard Lopez n’est pas venu le sauver que financièrement. Pas mal, comme entrée en piste. Puis, en octobre, le club lance un maillot collector en l’honneur des 140 ans du club. Orné du blason « Girondins de Bordeaux », contrairement aux autres maillots qui arborent encore le « logo américain », il fait un tabac auprès des supporters et n’est aujourd’hui plus disponible sur la boutique en ligne du club. Viennent ensuite les liens renoués avec les clubs amateurs, dont les licenciés bénéficient de places à 5 euros, un entraînement hebdomadaire ouvert au public depuis l’arrivée de David Guion, et depuis la réception de Troyes le week-end dernier, la mise en place de bus sillonnant le département pour amener gratuitement au stade les supporters venant de contrées plus ou moins lointaines, telles qu’Arcachon, Libourne, Langon ou Lesparre. Autant d’opérations louables, qui ont contribué à renouer le lien, mis à mal ces dernières saisons, entre les Bordelais et leur équipe. Mais pour parvenir à créer cette fameuse « union sacrée » derrière le club, la communication des Girondins a également ciblé ses relais.

Le totem d’immunité de Gérard Lopez

Ils sont au moins deux, en dehors du club, à entretenir des rapports plus que privilégiés avec Gérard Lopez et ses équipes. Directement ciblés par la nouvelle direction, il s’agit d’abord des Ultramarines et Florian Brunet, leur porte-parole, qui explique que « les deux années de lutte contre les précédentes directions ont marqué les esprits. Nous sommes capables de mobiliser des milliers de personnes, et ça, Gérard Lopez l’a vite analysé. C’est lui qui m’a appelé en premier. La discussion a duré des heures. Ça a matché tout de suite parce que Gérard a tout simplement compris que les supporters étaient prépondérants dans la vie d’un club. Un club, c’est le sportif, l’administratif, les partenaires et les supporters. La place des Ultramarines au sein du club a toujours été importante, il n’y a qu’à voir Adieu Lescure. » Pour cibler les supporters plus « lambda » ainsi que les simples suiveurs, le club s’est également rapproché de Franck, plus connu par les twittos bordelais sous le pseudo Diabaté33, qui compte près de 20 000 abonnés sur l’oiseau bleu, ce qui en fait le principal influenceur – bien qu’il réfute l’appellation – de la twittosphère girondine. S’il affirme n’être « pas proche de la direction » et n’entretenir « aucun contact » avec cette dernière, « mais plutôt avec des gens qui travaillent avec elle » et que ses sources « sont encore chassées au sein du club », la version de Florian Brunet diffère.

 Lopez n’était pas le seul à pouvoir sauver le club. C’est de la propagande orchestrée par lui-même. Il a réussi à faire croire que si le club allait en redressement judiciaire, il disparaissait. Ce qui est absolument faux.

Selon l’ultra, Diabaté33 « est le premier supporter bordelais que Gérard a connu. C’est même lui qui a donné mon numéro à Gérard. Et c’est vrai qu’il y a eu un feeling entre nous trois. Son discours nous a touchés, on a eu envie de se battre pour lui. Lui seul pouvait nous sortir de l’ornière. On a lutté contre le redressement judiciaire jusqu’à l’empêcher, et Gérard nous a sauvés d’une relégation assurée. » Sur ce dernier point, Franck enfonce le clou : « Gérard Lopez était le seul qui pouvait potentiellement nous sauver d’une descente. » Ce costume de sauveur, le self-made man hispano-luxembourgeois n’hésite pas à l’enfiler, conscient que ce sera son totem d’immunité pendant un certain temps. Dès sa reprise du club actée, il confie d’ailleurs à L’Équipe : « J’avais dit que c’était une opération sauvetage, et ce n’était pas pour me montrer dramatique. » Pourtant, l’article 103 bis du règlement administratif de la LFP, mis en place à titre exceptionnel pour aider les clubs à traverser la période délicate liée à la crise sanitaire, garantissait qu’un « club de Ligue 1 ou de Ligue 2 qui ferait l’objet d’une procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire ouverte avant la reprise effective du championnat 2021-2022 ne sera pas rétrogradé dans la division immédiatement inférieure ». De fait, rien n’indiquait clairement que la relégation à titre conservatoire du FCGB, actée par la DNCG quelques jours auparavant, aurait été effective pour la saison 2021-2022. Un observateur du club va même plus loin : « Lopez n’était pas le seul à pouvoir sauver le club. C’est de la propagande orchestrée par lui-même. Il a réussi à faire croire que si le club allait en redressement judiciaire, il disparaissait. Ce qui est absolument faux, justement grâce à ce fameux article 103 bis. Les ultras ont tué le projet de Didier Quillot. Pascal Rigo avait les sous, mais il n’était pas prêt à accepter les conditions de King Street et Fortress, contrairement à Lopez. Le club a sans doute raté une occasion unique de repartir sur une base saine, avec des dettes apurées. »

Il nous a tous hypnotisés. Parce qu’il sait fédérer. Aujourd’hui, les salariés du LOSC regrettent Gérard Lopez. Les joueurs aiment Gérard Lopez. Tout l’environnement du club l’aime. Parce que Gérard sait se faire aimer, et il en a besoin. Il fait partie de ces gens qui n’ont pas que besoin d’être riches. Il a aussi besoin d’être aimé.

En « bonne intelligence »

S’il est difficile aujourd’hui de savoir ce qu’il serait advenu du club en cas de redressement judiciaire, une chose est sûre : très vite, Gérard Lopez et les Ultramarines décident de « travailler en bonne intelligence » – une expression que Brunet utilise à l’envi lorsqu’il évoque Lopez. Que ce soit en tribune ou sur les réseaux, la direction des Girondins ne sera jamais égratignée par le groupe, ce qui interroge les observateurs jusqu’en dehors du club. Et c’est peu dire que cette méfiance énerve le porte-parole. Attention, monologue : « On sent une grosse déception chez les journalistes, qui voudraient qu’il y ait de la tension, de la contestation, voire même de la casse. On n’arrive pas à concevoir que des gens puissent travailler ensemble, en se respectant, en bonne intelligence, et en faisant du mieux. On sort de deux ans de conflits, aujourd’hui on a une direction qui nous respecte, on bosse avec elle. Mais ce qui est terrible dans les commentaires, c’est le sous-entendu comme quoi nous serions achetés. Il faut qu’on fasse quoi ? Que les leaders des Ultramarines affichent leurs relevés bancaires pour prouver qu’on ne reçoit pas de virements de la part de M. Lopez ? On n’est pas Marseille en 1994, Lopez ne nous a pas donné l’exclusivité des abonnements avec une énorme réduction. On n’a pas, comme les Marseillais depuis 25 ans, une manne financière de plusieurs millions d’euros qui tombe à chaque campagne d’abonnements. Les gens sont dans la suspicion permanente, on n’imagine pas une seule seconde que des personnes puissent être intègres et travailler en bonne intelligence. Je trouve ça révoltant. Tout comme la cabale contre Gérard Lopez. Je suis éberlué qu’on accepte qu’un pays terroriste, qui tue des gens sciemment, arrose le football français depuis dix ans. Les Qataris, aucun souci ! En revanche, Lopez, « à Boavista il aurait pu faire mieux, à Mouscron il aurait pu faire mieux, en Formule 1 il aurait pu faire mieux… »Tous les mecs qui vont en Formule 1 perdent des millions d’euros ! Qu’est-ce qu’il y a ? Les Qataris on leur pardonne tout, et Gérard Lopez c’est le diable. Faut arrêter. »

Il n’y a que ceux qui ne font rien qui ne font pas de bêtises. Gérard est formidable, mais il a le droit de se tromper.

Ce « travail en bonne intelligence » entre les deux parties qui sont « quotidiennement en lien » se matérialise par « des réunions de travail » qui ont parfois lieu dans le local des Ultramarines, où Lopez s’est rendu à plusieurs reprises, dont une fois à l’improviste, comme le raconte Brunet. « Il y avait plein de supporters, il les a tous salués, il est resté une heure, il a bu un coup en discutant avec tout le monde. Gérard n’est pas un bourgeois, c’est quelqu’un du peuple. Une autre fois, il est resté deux heures. Il y avait tous les leaders de la tribune. Il a répondu à toutes nos questions : Mouscron, Boavista, Lotus, la Ligue 2, tout. Il nous a tous hypnotisés. Parce qu’il sait fédérer. Aujourd’hui, les salariés du LOSC regrettent Gérard Lopez. Les joueurs aiment Gérard Lopez. Tout l’environnement du club l’aime. Parce que Gérard sait se faire aimer, et il en a besoin. Il fait partie de ces gens qui n’ont pas que besoin d’être riches. Il a aussi besoin d’être aimé. Je pense qu’il aime de plus en plus Bordeaux parce que Bordeaux lui rend bien. Ce qui n’était pas forcément le cas des supporters lillois et il en avait souffert. Ici, il est halluciné par nos spectacles, l’ambiance, nos déplacements. Il a compris qu’on pesait sur les résultats. Il nous consulte sur tout. » Entre Lopez et le groupe ultra, la complicité est telle qu’elle pèserait sur les choix du club, comme en atteste un épisode récent, toujours narré par Brunet : « Nous ne sommes pas montés au créneau contre Petković parce que Gérard s’est peut-être un peu entêté, mais il y a d’autres explications. Il fallait assainir ce groupe pourri de l’intérieur. C’est ce que nous avons dit à Lopez au lendemain de la défaite contre Marseille. Le leadership n’était pas assuré par les bonnes personnes, et cela ne servait à rien de virer le coach avant d’avoir réglé ce problème. Gérard était d’accord avec ce constat. Dans la semaine, il a sorti Koscielny et Baysse, et derrière il y a eu la blessure psychologique de Costil qui ne tombait pas si mal. Au mercato, de nouveaux leaders arrivent, et Petković prend encore 5-0 à Reims. Là, frère, tu dégages ! Tout a été fait de façon cohérente, même si prendre Petković en août était une connerie. Mais il n’y a que ceux qui ne font rien qui ne font pas de bêtises. Gérard est formidable, mais il a le droit de se tromper. »

Diabaté33, scoop toujours

Du côté de Diabaté33, le degré de collaboration avec le club est plus difficile à établir. Le principal intéressé s’en défend – « J’ai d’excellentes sources au sein du club, mais qui ne sont pas forcément membres de la nouvelle direction » -, mais sa défense systématique d’une direction à la tête de lanterne rouge interroge. Tout comme ses annonces faites via Girondinfos, son compte « dédié aux informations exclusives et vérifiées sur les Girondins ». C’est par exemple lui qui a annoncé en premier certains transferts, avant les médias du club. Ce qui n’étonne pas Brunet. « Il est dans son rôle d’insider, et visiblement, c’est un canal que Gérard aime bien, vu que c’est Franck qui a annoncé l’arrivée de David Guion en premier. Et je savais que c’était vrai, parce que Gérard m’avait appelé trois heures avant pour me dire que c’était fait. Donc quand Franck a sorti l’info, j’ai validé et j’ai souhaité la bienvenue à Guion. Franck et moi, on n’est pas à la recherche de buzz. On ne sort pas des infos qui pourraient nuire au club, et c’est pour cela que j’aime beaucoup Franck. Au contraire des autres insiders, il ne pense qu’au club. Le reste, il s’en branle. C’est juste un passionné. » Lorsqu’on l’interroge sur le fait qu’il roulerait pour le direction du club, Diabaté33 répond simplement qu’il ne défend « qu’un seul intérêt, celui des Girondins de Bordeaux. À partir de là, je défendrai toujours quelqu’un qui essaie de remettre mon club tout en haut. » Et pour ce qui est des annonces de transferts, il précise qu’il en était de même sous d’anciennes directions, lorsqu’il avait annoncé les arrivées de Ben Arfa, Seri ou Ménez.

Quoi qu’il en soit, cette stratégie de communication savamment orchestrée par le club, autant digitale que concrète, est sans aucun doute ce qui fonctionne le mieux chez les Girondins, aux abois dans tous les autres domaines. Mais pour qu’elle continue à être efficace, c’est-à-dire à fédérer autour du club, il va vite falloir gagner quelques matchs. Une tâche plus compliquée que de mettre en place des navettes, changer un logo ou collaborer « en bonne intelligence » avec les supporters. Après la défaite du week-end dernier à domicile face à Troyes, Diabaté33 a passé son compte Twitter en privé.

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Par Nélio Da Silva et Mathias Edwards

Tous propos recueillis par NDS et ME

Florian Fieschi, directeur de la communication sportive des Girondins, n'a pas souhaité répondre à nos questions.

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