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Gareth sur l’océan

Par Maxime Brigand
Gareth sur l’océan

Il y a quelques semaines encore, il ne se sentait pas prêt. Puis, soixante-sept jours après sa nomination à la tête de l’Angleterre, Sam Allardyce a été éjecté suite à l’enquête Football for sale qui bouscule le calme du foot anglais depuis plusieurs semaines. Alors, Gareth Southgate s’est retrouvé là, promu de son poste de sélectionneur des Espoirs, pour au minimum quatre matchs. Entre une image réputée trop lisse et une volonté de prouver qu’il a la gueule de l’emploi.

Dès la première prise de parole, il a souhaité déchirer la page précédente. La méthode est simple : des mots mesurés, une chemise fine, un costume serré, pas de pin’s sur le revers de la veste et quelques tacles appuyés. L’Oliver Hardy des années 2000 a laissé sa place à un quadragénaire aux idées neuves et qui a un autre avantage : « J’évolue dans un sport que j’adore, mais dans une industrie que je déteste. » Dans la période actuelle, ça peut aider, tant l’Angleterre du foot a la gueule en vrac depuis la déflagration de l’enquête Football for sale du Telegraph qui a coûté son poste à Sam Allardyce, nommé soixante-sept jours plus tôt au poste de sélectionneur national, reparti avec un bilan de 100% de victoires et un bout de fatalité : « J’ai été piégé et je ne peux que l’accepter. » Alors, pendant qu’elle tente de faire le ménage, la FA a décidé d’installer provisoirement – pendant quatre matchs (Malte, Slovénie, Écosse, Espagne) – Gareth Southgate sur le trône, histoire de tenir la baraque avec un fils de la maison, sélectionneur des Espoirs depuis août 2013. Un homme dont le nom avait été avancé en juillet dernier pour nettoyer les dégâts de l’Euro 2016 et qui avait repoussé les avances, un homme dont le CV est « trop léger » pour beaucoup, mais surtout un homme qui a désormais la volonté de s’accrocher à son fauteuil alors que la FA a déjà expliqué qu’elle ne commencerait ses démarches de recrutement qu’après le match amical contre l’Espagne, soit le 15 novembre prochain. De la naïveté au minimum et des courbes d’arrogance tout au plus. Mais peu importe, Southgate est là, son nez pointu aussi, avec un objectif clair : prouver que le Mr Nice Guy ne l’est pas tant que ça et que St George’s Park peut être calme, aussi, parfois.

Le Croydon Advertiser, McClaren et brassard

Comprendre le personnage de Gareth Southgate est complexe tant l’homme cultive les paradoxes, entre quelques sorties appuyées et une enfance qui l’a vu débarquer avec son cardigan à quatorze ans au centre d’entraînement de Crystal Palace. Au départ, l’ado rêvait de journalisme, un job qu’il a exercé quelques semaines au Croydon Advertiser. Sauf que Southgate bossait plus que les autres, il n’était pas forcément le meilleur, mais Alan Smith, alors coach dans les catégories de jeunes à Palace, explique que « rien ne lui a été offert » dans un club où la mentalité, à cette époque, se rapproche plus de Wimbledon que de la douce notion du collectif. Celui qui cavale en tant que milieu récupérateur s’amuse à parfois aligner deux matchs dans la journée, avec sa catégorie et avec la réserve, « histoire de le rendre plus fort » . Puis comme partout lors de la suite de sa carrière, à Aston Villa ou à Middlesbrough, où il sera replacé dans l’axe central, Gareth Southgate enfilera le brassard. « Les gens voient l’homme qui parle bien, le gentil mec avec ses manières. Mais il y a une autre facette de lui et je l’ai déjà vu. Lorsqu’il était capitaine à Palace et que j’étais son entraîneur, il n’avait pas peur de débattre avec moi. Il était génial dans un vestiaire. Une fois, alors qu’on venait de faire une première mi-temps désastreuse à Southampton, je lui ai demandé de bouger un autre joueur parce que je trouvais qu’il ne se donnait pas à 100%. Il n’a jamais eu peur de faire ça » , complète Smith.

Vidéo

Un caractère dont se rappelle également Franck Queudrue, son ancien partenaire à Boro et avec qui Southgate a notamment remporté une League Cup en 2004 contre le Bolton d’Allardyce (2-1) et disputé une finale de Coupe de l’UEFA en mai 2006 contre Séville (0-4) : « Sur le terrain, déjà, c’était la sécurité. Gareth, c’était toujours la bonne relance, jamais un mauvais match, bien placé, et il te donnait de la confiance. En Angleterre, le capitaine est un vrai relais de l’entraîneur et fait presque partie du staff. Là, le coach était Steve McClaren, qui avait notamment été assistant de Sven-Göran Eriksson avec la sélection, donc il le connaissait particulièrement. C’est quelqu’un de posé, bon vivant, qui aime rire, mais avec qui tout est dans la mesure. Mais coach, c’était déjà une vocation. » Au point de parfois remettre publiquement en cause son entraîneur, comme lors de son passage à Villa avec Brian Little malgré leur victoire en finale de la League Cup 96 contre le Leeds United de Howard Wilkinson, à qui Southgate est souvent comparé dans l’approche. Voilà la balayette publique : « Quand j’ai signé mon nouveau contrat, j’ai dit que je ne voulais le faire que si l’équipe se renforçait. Pour le moment, rien n’a été fait. Sauf si le club s’aligne sur les ambitions de ses meilleurs joueurs, vous perdez vos joueurs les plus importants. » Plus encore, l’international anglais (57 sélections) est connu pour sa déclaration sur Eriksson après le quart de finale perdue par l’Angleterre contre un Brésil réduit à dix lors de la Coupe du monde 2002 : « On voulait avoir Winston Churchill et on avait Iain Duncan Smith [l’ancien chef du Parti conservateur, réputé pour son manque de charisme, ndlr]. »

De Bali au Pizza Hut

1996, Gareth Southgate est en vacances avec sa femme, Alison, à Bali, histoire d’oublier. Quelques jours plus tôt, le défenseur de Villa a craqué au pire moment, sur le penalty décisif d’une séance de tirs au but étouffante contre l’Allemagne au cœur d’un Wembley qui suffoque. L’Euro 96 de l’Angleterre vient de s’arrêter au bout des gants d’Andreas Köpke et la bande à Berti Vogts sera championne d’Europe. Comme en 90, les Three Lions se sont fait museler en demi-finale lors d’une séance de tirs au but. À l’époque, Stuart Pearce et Chris Waddle s’étaient plantés, ce qui donnera après le championnat d’Europe perdu à la maison six ans plus tard une pub délirante pour Pizza Hut où Southgate se cache la tête dans une poche devant Waddle et Pearce. Ou encore un tube du groupe The Business où le message est clair : « Southgate’s going home, he’s going home. » Le défenseur a le moral brisé et se retrouve alors à Bali devant un temple bouddhiste. Un moine s’avance, le reconnaît : « You Gareth Southgate, you England penalty drama ! » Il préfère aujourd’hui sourire d’une époque lors de laquelle il commence aussi à écrire avec son ami d’enfance Andy Woodman un bouquin sur leurs destins croisés à Crystal Palace, qui sera élu en 2003 Sports Book of the Year. De quoi aussi lui filer l’idée d’écrire des poèmes pour les enfants. Avant de les dresser.

Trop beau, trop tôt

Car en 2006, quelques jours après la finale européenne perdue par Middlesbrough contre Séville, Steve McClaren prend en main la sélection nationale. Le boss de Boro, Steve Gibson, décide alors de filer les manettes à son capitaine, Gareth Southgate. Une plongée précoce sur un banc. « J’étais là, j’avais 35 ans, sans expérience, à diriger des mecs comme Mark Viduka, Mark Schwarzer ou Jonathan Woodgate. J’étais loin du niveau où je suis aujourd’hui » , expliquait récemment à la presse Southgate. L’homme a été critiqué entre des résultats moyens, des idées difficile à mettre en place et une relégation en Championship en 2009. Trop tôt, pas assez costaud. « Je suis un peu comme Roosevelt : « Ce n’est pas les critiques qui comptent. » Pour moi, c’est plutôt de quoi elles parlent. » Alors il a filé bosser à la FA, dans le développement avec Sir Trevor Brooking, s’est retiré, s’est réconcilié avec Roy Keane sur des plateaux, puis a finalement repris les Espoirs avec qui il a échoué lors de l’Euro 2015 avant de remporter le festival de Toulon en mai dernier contre la France (2-1) avec Pickford, Redmond, Targett, Watmore, Ward-Prowse et Loftus-Cheek. Le voilà à un poste qu’il se sent finalement prêt à prendre, histoire de redonner de la confiance à son pays et un peu d’espoir à un peuple. Mais jusqu’à quand ?

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Par Maxime Brigand

Propos de Queudrue recueillis par MB, ceux de Smith et Southgate tirés de la presse britannique.

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