Salut les punks,
Une ancienne chronique d'un pote à moi (Reda Allali). Cette histoire résous le problème de la caméra dans le Foot.
"Cher Monsieur Blatter, président de la FIFA et maître du monde tous les quatre ans pendant un mois, que Dieu vous assiste. Je m’appelle Zakaria Boualem, originaire de Guercif dans le royaume du Maroc, vous savez, ceux à qui vous aimez bien refuser la Coupe du monde. Si je vous écris aujourd’hui, c’est pour vous aider, on est comme ça nous les Marocains, on aime bien aider les gens qui ne nous ont rien demandé, et c’est d’ailleurs parfois un peu pénible, je vous l’accorde. Je sais que vous êtes en pleine réflexion autour de l’utilisation de la vidéo pour assister les arbitres des matchs de foot. C’est un sujet important, qui pourrait éviter quelques crises économiques et deux ou trois guerres tribales par an. Il y a des gens qui sont pour, qui disent que le jeu va trop vite pour un seul type avec un sifflet, ils ajoutent que le foot est le seul sport qui refuse la technologie, et qu’il y a trop d’erreurs d’arbitrage pour se permettre le luxe de snober la vidéo. Il y a des gens qui sont contre, pour ne pas créer un football à deux vitesses. Ils expliquent aussi que la vidéo ne va rien changer, et que la main de Maradona fait partie de l’histoire du foot, et même de l’homme. Tout le monde a un peu raison et un peu tort, et tout le monde parle, mais moi je veux vous aider, je l’ai déjà dit mais je le répète, on est comme ça nous les Marocains, on aime bien répéter les choses. Au Maroc, nous avons trouvé la solution à votre délicat dilemme. Oui, oui, oui, ne rigolez pas, je suis très sérieux.
La semaine dernière, le Raja a battu Safi aux penalties. Il est fort probable que vous vous en foutiez un peu, contrairement à moi qui étais très heureux ce soir-là. Safi a tiré un péno sur la transversale et le ballon a rebondi derrière la ligne de but. L’arbitre n’a rien vu et le but n’a pas été accordé, tant mieux pour nous. Sauf que le soir même, à la télé – oui, nous avons aussi une télé -, tout le monde a vu que le but aurait dû être accordé. Du coup, l’arbitre avait un peu l’air d’un crétin, mais nous avons l’habitude ici, on est comme ça nous les Marocains, on s’habitue à tout, même avoir l’air de crétins. Ce dimanche, la Fédération marocaine, pour éviter que pareille mésaventure ne se reproduise, a ordonné à la télévision nationale de supprimer la caméra près des buts. Du coup, il n’y a eu aucune erreur d’arbitrage, puisqu’il n’y avait pas de caméra pour les montrer. Et là, je vous sens sans voix devant le génie marocain.
Je me doute bien que vous n’avez jamais pensé à pareille solution pour résoudre le problème de l’utilisation de la vidéo. C’est nous, Marocains, qui l’avons fait, il faut que l’histoire s’en souvienne : “Supprimer les caméras pour supprimer les erreurs d’arbitrage”.
Je vous suggère d’appliquer cette brillante décision de notre Fédération au niveau mondial, elle règlera une fois pour toutes le problème de l’utilisation de la vidéo. L’avantage de cette solution, c’est qu’elle peut être appliquée dans des domaines très différents, avec une efficacité toujours aussi redoutable. Par exemple : nous avons trop de bidonvilles ? On monte des murs pour les cacher. Trop d’échecs au baccalauréat ? Qu’on supprime ce baccalauréat. Trop de malades dans les hôpitaux ? Il faut les supprimer ! Qui, les hôpitaux ou les malades ? Les deux, monsieur, les deux… Nous avons déjà poursuivi un caméraman amateur de Targuist, qui avait eu l’étrange idée de filmer des gendarmes en plein racket sur la voie publique. Le problème de la corruption de la gendarmerie a ainsi été brillamment réglé d’un seul coup.
On peut continuer à imaginer à l’infini les applications de cette politique saugrenue. Ainsi, on pourrait supprimer le Smig pour qu’il ne soit plus trop bas, on peut également supprimer les routes pour qu’elles soient moins dangereuses, etc.
J’espère que je vous ai convaincu que des matchs sans caméra, sans ralenti, et même sans public (il ne faut prendre aucun risque !), étaient une bonne solution à vos problèmes. Inutile de me remercier, mon acte est purement gratuit, motivé par le besoin impérieux de partager la gloire de nos dirigeants nationaux au niveau mondial et de faire profiter le reste de la planète de nos découvertes locales. Et merci."