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Farias, le Mourinho vénézuélien

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Farias, le Mourinho vénézuélien

Pour tout un pays, il est le Mourinho vénézuélien. César Farias est surtout l'homme qui a porté la Vinotinto en demi-finale de la Copa America, un exploit de plus dans sa jeune carrière.

L’époque est aux entraîneurs précoces. Après Mourinho et Villas-Boas, voici César Farias. A 38 ans, le sélectionneur du Vénézuela peut déjà revendiquer dix-huit saisons sur les bancs. Le calcul est simple : à vingt ans, Farias dirigeait déjà des séances. Il venait alors de mettre un terme prématuré à sa carrière de médiocre défenseur central. « Il a rapidement identifié ce pour quoi il était fait » éclaire son frère cadet, Daniel, entraîneur du club de première division vénézuélienne, Deportivo Anzoategui, à … 29 ans.

Avant de qualifier le Vénézuela pour sa première demi-finale de Copa America, le mandat de César Farias avait déjà été marqué par deux performances inédites pour le pays d’Hugo Chavez : une victoire sur le Brésil, en amical (2-0, en juin 2008), et 22 points récoltés lors des éliminatoires de la Coupe du Monde 2010, un total jamais atteint, à seulement deux petites unités des barrages. Le sélectionneur de caractère a fait ses classes au Nuevo Cadiz, un modeste club dont il prit en charge les catégories juvéniles, avant de le faire accéder à la première division (1998). César Farias venait alors tout juste de fêter son quart de siècle.

Adepte du stakhanovisme

Le jeune surdoué se révèle à tout un pays en 2004, quand il atteint les quarts de finale de la Copa Libertadores avec le Deportivo Tachira, l’un des ténors du football vénézuelien. « Il s’agissait seulement du troisième club vénézuélien à atteindre ce stade » précise Juan Estevan Rojas, journaliste à El Universal. La méthode Farias ? « Il met vraiment l’accent sur le travail, sur la préparation, précise son frère et ex-adjoint,par exemple quand il dirigeait le Deportivo Anzoategui, il a organisé une tournée contre des clubs argentins pour que les joueurs acquièrent le rythme de la compétition, et au final on a terminé à la deuxième place alors qu’on était promu » . Depuis son arrivée à la tête de la Vinotinto, Farias reste adepte du stakhanovisme : jamais le Vénézuela n’a disputé autant d’amicaux, et la concentration pré-Copa America fut la plus longue de tous les participants (un bon mois). « Il a vraiment insisté sur la préparation physique » appuie Juan Estevan Rojas

Mais, à l’instar d’un Mourinho, à qui il est souvent comparé, Farias réalise surtout un immense travail mental pour que ses joueurs soient prêts à lui obéir au doigt et à l’oeil sur le terrain. « Il se comporte en véritable gérant des ressources humaines, assène son frère. Il s’assure que le joueur se trouve dans les meilleures conditions possibles, qu’il est bien logé, qu’il se trouve bien dans sa vie privée, il peut aussi avoir recours à un psychologue, mais seulement si cela convient au joueur, il s’adapte vraiment à chacun » . Un suivi personnalisé pour rendre redevable le joueur, qui n’économise alors pas ses efforts. Quant à ceux qui osent lever le pied : « Ce qui le rend fou, c’est quand les joueurs manquent d’attitude, de volonté » précise l’attaquant Alexander Rondon, passé sous les ordres de Farias dans divers clubs et en sélection.

« Tire sur les femmes »

Pour créer l’union dans son groupe, Farias recourt à un autre procédé mourinhiesque : il s’invente des ennemis. Roi de la polémique, il s’est notamment signalé lors de cette Copa en s’en prenant directement à Neymar à la mi-temps de Brésil-Vénézuela. Selon lui, le jeune auriverde avait eu le tort de poursuivre une action alors qu’un de ses joueurs se trouvait à terre. Il provoqua ainsi, sans doute pas mécontent, un début d’échauffourée. Quelques jours plus tard, indisposé par la présence de journalistes qui espionnaient un entraînement à huis-clos, Farias demande à un joueur de « tirer sur les femmes » . Quand il était son adjoint de la sélection moins de 20 ans, son frère Daniel avait, lui, franchement frappé un cameraman. « On vient de l’Oriente du Vénézuela, une partie du pays où les gens ont fort caractère » assure le frère de, et fils d’un commerçant et d’une institutrice. A son arrivée à la tête de la sélection, le Mourinho vénézuelien a largement rénové l’effectif, tout en misant sur les indispensables Arango et Maldonado. Pour la Copa America, il a notamment amené dans ses bagages des membres de la sélection de moins de 20 ans qu’il avait qualifié pour la Coupe du Monde 2009, une première là aussi. « Pour expliquer la performance du Vénézuela, il faut mettre en avant sa science de la préparation, mais aussi le talent des joueurs qui jouent pour la plupart à l’étranger » estime le journaliste Juan Estevan Rojas.

Avec Farias, le Vénézuela a changé de standing, mais aussi de style. Au grand regret de son prédécesseur, Richard Paez. Grand artisan du décollage d’un pays qui avait la sale habitude de terminer les éliminatoires pour la Coupe du Monde en bon dernier, Paez a d’ailleurs estimé quelques semaines avant la Copa, que la Vinotinto « n’était pas bien ordonnée (…) et avait perdu son identité » . Avec Farias, le Vénézuela modère, en effet, son toque pour chercher davantage de verticalité. « César s’adapte au rival qu’il étudie minutieusement, détaille le frangin. Il insiste sur la préparation physique car il veut des équipes qui pressent haut, avec des latéraux qui montent, et parvenir le plus vite possible dans la surface adverse » . Reste que malgré tous ses faits d’arme, César Farias n’a toujours pas remporté un titre significatif -il ne peut revendiquer qu’un championnat de deuxième division. Pas de quoi modérer son ambition : « Nous voulons atteindre la finale du tournoi » avait-il prévenu après avoir tenu en échec le Brésil (0-0) lors du premier match de poule. Au fait, la famille Farias compte un troisième frère. Il travaille avec son père, comme commerçant. Presque rassurant.

Par Thomas Goubin

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