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Edu, dur et dingue
Du Brésil en Corée du Sud, de Sao Paulo à Suwon, du fin fond de la défense à la pointe de l'attaque, Edu a tout connu. Bourreau de l'Inter Milan en demi-finale de la Champion's League, l'attaquant Brésilien a une histoire aussi folle que l'épopée de son Schalke.
Pour renaître, encore faut-il être né. En partant de ce postulat assez simple, même plutôt simpliste, il parait envisageable d’affirmer qu’Eduardo Gonçalves de Oliveira, mieux connu sous le nom d’Edu, officiellement sorti du ventre de sa mère le 30 novembre 1981, à Sao Paulo, est en fait né le 5 avril 2011, à Giuseppe Meazza, Milan, Italie. Mis au monde par des sage-femmes répondant aux noms d’Andrea Ranocchia et Christian Chivu, Edu, 29 printemps, double-buteur face à l’Inter et principal responsable de la débâcle italienne, existe enfin aux yeux du monde. Le Brésilien fête son premier anniversaire en tant qu’entité vivant dans l’impitoyable planète foot. Un pari qui n’était pas gagné d’avance.
La deuxième division, puis l’exil
Car la vie d’Edu n’a jamais été un long fleuve tranquille. Lui, le buffle physique aux pieds carrés, né au pays de Jairzinho, Pelé, Romario et Brandao. Toujours en marge, jamais dans le moule, la carrière du natif de Sao Paulo est plus Tour du Monde en 80 jours et Jacques le Fataliste que Le Meilleur des mondes. Une sacrée histoire donc, dont Edu est le héros. Une quête interminable, à la recherche d’un club où il pourrait enfin exploser. Téméraire et patient, le jeune Edu ne brûle pas les étapes. Un parcours pénible, de Santos au Guarani FC, en passant par le CRA Catalano, soit un périple en deuxième division brésilienne, histoire de se forger le caractère. Un chemin de croix qui dure jusqu’en 2003, l’année du jackpot et de la reconnaissance. La diseuse de bonnes aventures s’appelle Peter Neururer et est entraîneur au VfL Bochum. L’histoire est belle, la première saison réussie. Une cinquième place de Bundesliga, juste devant l’actuel Meister, le Borussia Dortmund, qui offre à Edu sa première qualification en Coupe de l’UEFA, théâtre de la future légende du Brésilien.
Trop dangereux pour son équipe
Le 30 septembre 2004, Bochum, après un bon match nul 0 à 0 à Liège, mène 1-0 à domicile face au Standard. Jusqu’à la 92ème minute et une bourde d’Edu, alors défenseur, qui offre aux Belges le but de l’égalisation et la qualification. Le début du calvaire allemand pour le Brésilien. Recruté par Peter Neururer en tant que défenseur, Edu, jugé trop dangereux pour sa propre équipe lorsqu’il évolue derrière, va se voir repositionné aux avant-postes, peu de temps après le drame de Liège. Un repositionnement logique si l’on en croit son entraîneur, persuadé que le buffle peut apporter plus devant : « Nous savions qu’il avait des capacités incroyables et nous ne voulions pas les gâcher. Derrière, je ne pouvais plus rien faire pour lui, alors je l’ai mis devant, afin de le protéger, lui, ainsi que l’équipe, mais aussi parce que j’étais sûr qu’il était capable de faire quelque chose » . Bingo, à la fin de cette saison 2004-2005, Bochum est relégué, Neururer viré, Edu déprimé et haï. Mais le Brésilien en a vu d’autres. A son aise dans son nouveau rôle, il claque douze buts la saison suivante et contribue grandement à la remontée de son club. Pas convaincu, son nouveau coach, Marcel Joller, lui préfère Theofanie Gekas. Edu, marqué au fer rouge depuis le 30 septembre 2004, s’en va, tête basse, du côté de Mayence. Le passeport pour le Styx est validé. Début d’une longue descente aux enfers.
Happy-end
A Mayence, Edu reste une moitié de saison (14 matches, 1 but), avant de prendre ses cliques et ses claques, direction la Corée du Sud et les Suwon Blue Wings, entraînés par la légende sud-coréenne Cha Bum Kun. Trois années d’exotisme, le temps pour Edu de se faire un petit palmarès (Championnat en 2008, Coupe en 2009). Trois petites saisons donc, et puis s’en va. L’appel de la terre d’accueil est trop fort, et quand le déjà contesté Felix Magath décide de le faire venir, gratuitement, Edu grimpe dans l’avion. La concurrence, il s’en moque. Kuranyi, Asamoah, Huntelaar ou Raul, ne l’empêcheront pas d’écrire les plus belles pages de son histoire. Une histoire qui s’est peut-être achevée le soir où elle a commencé, à Milan, ou qui continuera ce soir, à Manchester.
Swann Borsellino et Ali Farhat
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