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Edgar Davids croque League of Legends

Par Adrien Hémard
4 minutes
Edgar Davids croque League of Legends

Après deux ans de procès, Edgar Davids a obtenu réparation auprès du jeu League of Legends pour violation de droits à l'image. Teigneux, le Hollandais a ainsi implanté dans le foot une nouvelle pratique : celle d'attaquer un jeu vidéo. Au-delà de la réparation financière, l'attitude du Pitbull témoigne aussi de la visibilité nouvelle du e-sport, et offre au passage un gros coup de pub au jeu. Retour sur une affaire où personne ne finit en Game Over.

Le 11 août dernier, le tribunal d’Amsterdam rendait enfin son verdict dans l’affaire League of Legends (LoL) vs Edgar Davids. Après deux ans de procès, la justice hollandaise donnait donc raison à l’ex-footballeur hollandais face au poids lourd des jeux de rôles. Plus de vingt-quatre mois d’enquêtes pour affirmer que via un personnage, Striker Lucian, LoL violait bel et bien les droits à l’image du Pitbull passé par l’Ajax ou l’Inter. En contrepartie, Riot, la société qui développe le jeu, devra reverser un pourcentage, pas encore déterminé, des gains réalisés en Hollande grâce au personnage inspiré d’Edgar Davids. Bref, le plus culte des joueurs à lunettes risque de recevoir un petit chèque, et a offert à LoL un gros coup de pub.

Un procès soudain, plus d’un an après les faits

L’affaire remonte à 2014. Quelques jours après le début de la Coupe du monde brésilienne, League of Legends dévoile une nouvelle skin : Striker Lucian. « Dans un jeu vidéo, une skin est simplement un costume alternatif qu’un joueur peut gagner ou – c’est souvent le cas dans les jeux en ligne – acheter avec la CB de maman. En règle générale, une skin n’apporte en soi aucun bonus en jeu, cela permet juste de personnaliser son expérience et éventuellement de frimer en ligne » , explique Thomas Cusseau de Gamekult. Sauf que cette nouvelle skin concerne un personnage réputé agressif – comme Edgar Davids – et ressemble comme deux gouttes d’eau au Pitbull : dreadlocks, peau mate, lunettes et tenue de footballeur.

D’ailleurs, Baconhawk, un employé de Riot, lâche le morceau sur Twitter : « Pour tous ceux qui se posent la question, Stricker Lucian a été inspiré par le professionnel du football Edgar Davids. » Un aveu supprimé depuis. Au même moment, Davids poste lui une photo sur Instagram dont la légende souligne clairement le manque d’égard d’Edgar pour l’affaire à ce moment : « Mon fils pense que ce champion de LoL est basé sur son père hahahaha. » À ce moment, le Pitbull ne bouge pas d’un poil.

My son thinks this #LeagueOfLegends #character is based on his dad wahahaha

Une publication partagée par mrdavidsone (@edgardavidsofficial) le 5 Juin 2014 à 10h42 PDT

Long à la détente, c’est donc un an plus tard qu’Edgar Davids a le déclic (via ses avocats ?). Conscient de la fortune sur laquelle est installé League of Legends, le clan Davids attaque le jeu quand bien même la skin Striker Lucian n’a que peu marché. Aussi vicieux et tenace que sur le terrain, le Hollandais s’en prend subitement en justice à Riot, société mère de LoL. « Certains auraient pu être flattés d’inspirer un personnage, mais on peut aussi comprendre qu’une personne publique défende le droit à disposer de son image… surtout quand elle est utilisée dans un but commercial » temporise Bertrand Amar, producteur d’émissions d’e-sport. Il poursuit : « Le droit à l’image et la propriété intellectuelle doivent être respectés dans la création de jeu vidéo comme dans toute autre entreprise d’édition. Il reste toujours la possibilité de « s’inspirer » sans pour autant copier… et c’est souvent à l’appréciation de la justice quand elle est saisie de ce type de dossier. » C’est donc précisément ce que fait Davids, en saisissant le tribunal d’Amsterdam pour violation de droit à l’image, espérant sans doute toucher le pactole.

Guns’N Roses, Lindsay Lohann et Overwatch

Après deux ans de procédure – ou de procès dur pour Riot –, Edgar Davids obtient donc un verdict favorable. Si la décision de la justice semble légitime, elle marque aussi un tournant sportif dans ce genre d’affaires, de plus en plus répandues : « Généralement, les personnes réelles qui se retrouvent dans un jeu vidéo sont le résultat d’un accord entre la célébrité et l’éditeur, mais il y a déjà eu des précédents hors sport. Notamment avec les Guns’N Roses et le groupe No Doubt qui avaient attaqué respectivement les éditeurs des jeux Guitar Hero et Rock Band pour avoir utilisé leur image sans leur accord » , raconte Bertrand Amar. « Le cas de Lindsay Lohann est assez connu. Elle s’était reconnue dans un visuel promo de Grand Theft Auto V et avait réclamé réparation, mais elle a depuis été déboutée » , détaille Thomas. Edgar Davids n’aurait donc fait qu’introduire dans le foot une nouvelle mode : attaquer un puissant éditeur de jeux vidéo pour renflouer ses caisses. D’ailleurs, le Hollandais pourrait embrayer en s’en prenant au jeu Overwatch, dont le personnage de Lúcio a lui aussi une skin « football » plutôt ressemblant…

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