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Donadoni en quête de rachat
Décrédibilisé en tant qu'entraîneur après ses flops sur le banc de l'Italie et du Napoli, Roberto Donadoni est en train de redorer son blason à Cagliari. De la grisaille du Nord aux plages de Sardaigne, le chemin de la rédemption suit celui du soleil.
En tant que joueur, c’était une idole. En tant qu’entraîneur, il était devenu, en l’espace de deux expériences, la risée de l’Italie. Roberto Donadoni, ancien milieu de terrain du grand Milan de Sacchi et de Capello, est en train de se refaire une réputation en Sardaigne. Le flop de l’Euro 2008 à la tête de la Squadra Azzurra, suivi d’une expérience déprimante à Naples, sont en train de se transformer en souvenirs. Le genre de souvenirs que l’on préfère oublier, et ressortir en fin de carrière après avoir glané trois Scudetti et deux Ligues des Champions. Mais Donadoni n’en est pas encore là. Du moins, pas en tant qu’entraîneur. Car si en tant que joueur, l’actuel coach de Cagliari a réussi à tout gagner (sauf une Coupe du Monde, qui s’est envolée en même temps que le pénalty de Baggio), en tant qu’entraîneur, sa vitrine est encore vide. Ce ne sera pas non plus pour cette saison, mais au moins, il est en train de prouver à tous qu’il n’est pas une bille. Et ça, c’est déjà une belle victoire.
Le 15 novembre 2010, Pieropaolo Bisoli se fait virer de Cagliari. A son actif, une seizième place héritée d’une série pas folichonne de 2 victoires, 5 nuls et 5 défaites. Out l’ancien de Cesena, et place à Donadoni, inscrit au Pôle Emploi depuis plus d’un an. Pour le barbu aux cheveux poivre et sels, c’est l’heure du rachat. Une nouvelle chance offerte par le président Cellino, après que De Laurentiis l’a torpillé un soir d’automne 2009. Le voilà qui revient sur la pointe des pieds. Sans prétention. Sans déclaration vertigineuse. Sans fracas. Et c’est en toute modestie qu’il obtient deux victoires dans ses deux premiers matches, contre Brescia et Lecce. Suffisant pour que le public sarde l’adopte déjà. Lui l’homme du Nord, qui a passé sa vie entre Milan, Bergame et Livourne, trouve finalement sa place sur l’île voisine de la Corse. Un comble.
De la Serie C aux rêves d’Europe
De semaine en semaine, Donadoni donne un nouveau visage à Cagliari. A partir de janvier, il est obligé de redessiner complètement l’équipe, privée de son buteur Matri, parti à la Juve. L’entraîneur lombard ne se démonte pas, replace Acquafresca en pointe, et mise sur le jeune Belge Nainggolan. Ses choix lui donnent immédiatement raison : au mois de janvier, les Sardes obtiennent quatre victoires en six rencontres, se détachant de la zone rouge et assurant quasiment leur maintien. Si Cagliari perd systématiquement les matches face aux gros (Milan, Inter, Juventus, Napoli…), l’équipe ne manque aucun rendez-vous lorsqu’il s’agit d’affronter une formation moins bien classée qu’elle. Du quitte ou double. Soit tu gagnes, soit tu perds. Pas de juste milieu. Pas de match nul (trois en vingt-et-un matches). Mais cette mentalité zemanienne, instituée par le Dona, marche. Au terme de la 33ème journée, Cagliari est neuvième, à trois points de Palerme, et à huit longueurs de la Juventus, dernier qualifié pour l’Europa League.
L’Europe. Une utopie depuis 1994, lorsque le club atteignait une historique demi-finale de Coupe UEFA contre l’Inter. Depuis, du ventre mou, de la Serie B, de l’espoir avec Allegri, et le renouveau signé Donadoni. Oui, Donadoni a redonné envie à tout un public de rêver de matches en milieu de semaine, et pas pour aller disputer le troisième tour de la Coupe d’Italie contre le dernier de Serie B. Ssurtout, il a réussi à unir le vestiaire, base fondamentale en vue de la saison prochaine. « Bien sûr que je vais rester à Cagliari. Je suis heureux de travailler dans un club qui sait programmer et penser à l’avenir. L’équipe a de grandes qualités et des joueurs importants pour lutter pour autre chose que le maintien » affirme-t-il. Promesse est faite.
Boucler la boucle à Milan ?
Quoiqu’il advienne lors des cinq derniers matches, Donadoni pourra se targuer d’un succès. Peut-être le premier vrai succès de sa carrière d’entraîneur. Une carrière qui a débuté en 2001 à Lecco, en Serie C1. Il termine 9ème. Bof. L’année suivante, il tape une moyenne 10ème place en Serie B avec Livourne. Il gagne néanmoins les faveurs d’Enrico Preziosi, tout juste débarqué au Genoa. Objectif : la remontée en Serie A. Mais après trois journées et autant de défaites, Preziosi le lourde. La loose totale. En janvier 2005, il retourne à Livourne, promu en Serie A, et y vit sa seule expérience plutôt concluante. Sa première demi-saison se termine par une 8ème place, et l’année suivante, il démissionne en février 2006 malgré une 5ème position. Des bruits de couloirs disent qu’il savait déjà que Marcello Lippi lui cèderait sa place après le Mondial 2006. Ce qu’il ne savait pas, c’est que l’Italie allait glaner sa quatrième étoile en Allemagne, et que lui allait récupérer une équipe en fin de cycle. Sans cesse comparé (négativement) à Lippi, il échoue lors des quarts de finale l’Euro 2008, après avoir passé miraculeusement les phases de poule. Il prend l’air, revient à Naples et se prend encore un mur. Après avoir obtenu 7 points lors des 7 premières journées, De Laurentiis lui dit « ciao » . A ce moment-là, qu’il le nie ou non, Donadoni se demande très clairement s’il est fait pour ce métier. La suite de l’histoire, c’est une année sabbatique, la nouvelle chance à Cagliari, et la revanche. Enfin.
Mais malgré cette réconciliation avec lui-même en terre sarde, Donadoni conserve, en cachette, un dernier objectif avant de partir en vacances. En prenant 9 points dans les 5 dernières rencontres, il égalerait le record de points du club depuis sa remontée en Serie A, détenu par un certain Massimiliano Allegri. Ainsi, il prouverait à tous qu’il vaut au moins aussi bien que celui qui campe le poste dont il rêve secrètement, sur le banc de « son » Milan AC. Plus qu’une revanche, ce serait alors, implicitement, une candidature.
Eric Maggiori
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