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De la sueur, des larmes, mais pas de sang

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De la sueur, des larmes, mais pas de sang

Ce week-end, on pouvait assister à deux évènements à Londres. Samedi, une large victoire de Millwall, qui s'approche de la remontée en Championship. Vendredi soir, le retour de Cock Sparrer à Londres, un groupe qui a lancé la "Oi" (style proche du punk) dans les années 70 et qui supporte West Ham. Les clichés sur ceux qui assistent à ce type de fêtes sont de belles conneries.

Le football et la musique, les hooligans et les skinheads. Tout ce qui peut assimiler les classes populaires britanniques au racisme et à la violence se retrouve là-dedans. Tout ce qui « terrorise l’Angleterre depuis 35 ans » , pour reprendre le slogan des Bushwackers, la firm de Millwall. Pourtant, il suffisait d’un court passage à Londres, le week-end dernier, pour constater que ces lieux communs n’ont pas lieu d’être. Un match de League One et un concert. Un show de Cock Sparrer, groupe précurseur de la Oi!, qui ne s’était plus produit dans la capitale du punk depuis dix-huit ans, et un Millwall-Stockport County.

Oi, oi, oi !

Ce vendredi soir, comme tous les vendredis soir en Angleterre, les pubs sont blindés. Du côté de Kentish Town, le Bull and Gate est toutefois fréquenté par une drôle de faune, ne ressemblant pas vraiment aux adeptes des afterworks de la City. Punks, Skins, les crânes rasés semblent sortis de “This is England” et les crêtes rivalisent de tailles et d’inventivité. Une atmosphère éminemment sympathique émane du lieu, entre les chants et les claquements de verres de bière. Tout le monde est là pour la même chose, mais est prêt à louper les groupes qui assurent en ce moment la première partie, pour finir sa pinte avec ses potes.

Une fois à l’intérieur du Forum HMV, une salle d’environ 3000 places décorée comme un opéra, la population n’a pas changé et le bar n’est pas plus cher. Au stand des tee-shirts, on peut trouver des maillots de foot floqués “Cock Sparrer 72” pour 35 livres. Lorsqu’on le porte, on croise même des fans de l’Ajax tellement déchirés qu’ils vous félicitent en pensant que ce sont les couleurs de leur club. « We’re coming back » . Dix-huit ans après, les notes de ce morceau retournent une fois de plus le public londonien. Dès le premier riff, une bonne dizaine de verres en plastique encore remplis de bière sont lancés le plus haut possible et déversent leur contenu sur le pogo. Un pogo magnifique, comme on aimerait en voir plus souvent. On se pousse, on partage sa sueur au milieu des effluves de Guinness, mais le premier qui tombe sera relevé par trois personnes sur le champ et, pour peu que vous ayez perdu quelque chose, on fera illico un cercle autour de vous pour vous permettre de le ramasser. La classe. Sans la lutte.

« England belongs to me »

Pour comprendre ce que ce genre d’évènement a d’émouvant, il faut voir une crête et une tête lisse se balancer, bras dessus, bras dessous, reprenant en cœur avec la voix toujours nasillarde (presque 40 ans après les débuts du groupe) de Colin McFaull, le tube de ceux qui ont refusé un contrat avec le manager des Sex Pistols parce qu’il avait refusé de leur payer une tournée : « England belongs to me / A nation’s pride the dirty water on the rivers / No one can take away our memory / England belongs to me » . Oui, ce “patriotisme” peut paraître louche, mais non, rien ne ressemblait moins à un concert de fachos que celui-ci. Les Cock Sparrer sont apolitiques et nombreux sont les membres du public à afficher ostensiblement des logos antifascistes et antiracistes.

Il n’y avait certainement pas de fans de Millwall, dans cette foule. Le groupe est pour West Ham et, entre les deux clubs, les relations ne sont pas vraiment cordiales. Le 25 août dernier, un match de League Cup entre les deux clubs a fait craindre à l’Angleterre d’assister à un retour du hooliganisme, dont elle croyait être débarrassé. Un envahissement du terrain par les fans des Hammers, des bastons avec la police à l’extérieur d’Upton Park et un homme poignardé. Pas très joli, tout ça. Pourtant, Millwall en a marre d’être stigmatisé. « Ce sont les supporters de West Ham qui ont envahi le terrain, précise Nadjim Abdou, le seul Français évoluant au New Den. […] Ce ne sont plus les gros incidents qu’il y a eus il y a une dizaine d’années, quand il y avait des bastons à tous les matches. Maintenant, ça se passe relativement bien. Les déplacements à risques, comme à Leeds, se passent bien. Ils ont réduit le nombre de supporters en déplacement, donc il n’y a plus de problème » .

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« Une image de voyous »

Le 18 juin 2005, le journaliste et supporter de Millwall Rod Liddle publiait, dans The Spectator, une tribune dans laquelle il condamnait le traitement réservé à son club. Prenant pour exemple un match contre Liverpool, il expliquait que, malgré le fait que les fans des Reds aient balancé de nombreux objets (dont 86 sièges arrachés) sur le public adverse pendant le match, seuls trois d’entre eux avaient été conduits en prison, tandis que Millwall était condamné à payer 25 000 livres d’amende pour des insultes racistes à l’encontre de Djimi Traoré que personne, pas même le joueur, n’avait entendues. « Millwall est directement assimilé à tous les problèmes qu’il y a eus dans le passé, confirme Abdou. Dans certains matches à l’extérieur, on peut être désavantagé à cause de cette image de voyous » . En arrivant au stade, situé près de la station South Bermondsey, au sud de Londres, on se rend bien compte que le club tente ce qu’il peut pour gommer cette image.

Aux murs, des affiches ont pour but de prévenir les jets d’objets sur la pelouse, les envahissements de terrain et le racisme. A chaque but inscrit, la sono balance une sorte de musique de cirque surannée annonçant que « Millwall are back to the Den » , certainement pour faire oublier le « Nobody likes us and we don’t care » qui descend toujours des tribunes. Pour ce match contre le dernier de League One (troisième division), 11 116 spectateurs ont répondu présent. Même les morts sont, en fait, toujours là, puisque leurs proches peuvent leur offrir une plaque à accrocher dans les travées. Il faut dire que l’équipe est en forme. Réussissant un retour en fanfare, Millwall est revenu à trois points du deuxième (les deux premiers montent automatiquement en Championship, les quatre suivants devant jouer des play-offs), Leeds, qu’il vient de battre à l’extérieur. Profitant d’une nouvelle défaite du premier United de Cantona, les Lions reviennent à hauteur de ce dernier grâce à une belle correction administrée à Stockport County (5-0), un adversaire extrêmement faible.

Des tribunes comme une garderie

Le plus frappant, en observant les gradins, est la présence d’un nombre impressionnant de gamins. Pour un club censé faire peur, ça la fout mal. Pendant toute la première mi-temps, un petit assis au premier rang n’arrête pas de balancer sa peluche de lion sur tout le monde, et parfois sur le terrain. À chaque fois qu’un joueur est remplacé, il a droit à sa standing ovation, y compris Nadjim “Jimmy” Abdou, qui pourrait pourtant s’attendre à être malmené par un public de hooligans racistes assoiffés de sang. Difficile de savoir si les joueurs adverses sont sifflés à leur sortie, puisque l’entraineur de Stockport ne fait qu’un seul changement, à la mi-temps. En revanche, un de ses joueurs prend assez cher. David Perkins arbore un léger embonpoint, une dégaine improbable et une longue chevelure blonde platine qui le fait ressembler à une caricature de grosse Norvégienne. Dès qu’il touche le ballon, il est sifflé et hué comme on le ferait avec une strip-teaseuse. Gratuit, mais pas plus méchant que dans un autre stade.

Tout comme le public de Cock Sparrer, qui correspond bien à ce que l’ont verrait dans un documentaire animalier sur les tribus keuponnes et neuskis, le public de Millwall ressemble au cliché de l’Angleterre prolétaire, le visage marqué et le langage incompréhensible pour le non-initié. Mais comme les adeptes de Oi! à l’ancienne, les fans de foot de Londres-Sud n’ont rien du cliché violent qu’on peut nous vendre ici et là. Oui, vous pouvez aller au New Den et au concert sans en ressortir avec un hématome, une balafre ou une envie de gerber due à l’abus de racisme. Certes, les Bushwackers sont sans doute encore là, et on entendra certainement encore parler d’eux pour une fight avec l’Inter City (la firm de West Ham), mais ils ne terrorisent pas l’Angleterre, ni leurs compagnons de tribune, qui continueront toujours à se pointer tous les samedis après-midi avec leurs enfants.

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