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Dario Cvitanich : « Je galérais pour trouver de la viande argentine à Nice »

Propos recueillis par Léo Ruiz
7 minutes
Dario Cvitanich : «<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>Je galérais pour trouver de la viande argentine à Nice<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>»

Après un rapide passage par Miami, Super Dario est rentré au bercail. À Banfield, précisément, dans le sud de Buenos Aires, où il a retrouvé son pote Civelli, l'autre ancien Niçois formé au Taladro. Après l'entraînement du jour, il raconte son retour et compare ses deux ex, l'Ajax et l'OGC Nice, qui se rencontrent ce mercredi soir.

La qualification pour la Copa Libertadores cinq mois après ton arrivée. Pas mal, ce retour à la maison, non ?Très bien, même. On a fait une excellente saison, et là on se prépare pour tout ce qui arrive. Banfield est une équipe jeune, mais on avait quand même cette ambition de se qualifier pour une coupe internationale. Pas forcément la Libertadores, mais vu qu’au fur et à mesure des journées, on s’est retrouvés à disputer le titre, on se l’était mis progressivement dans la tête.

C’est Renato Civelli qui t’a convaincu de revenir ?On s’est réunis en janvier, lui avait déjà donné son accord. On a mangé ensemble, il a insisté, « reviens, reviens, reviens ! » J’avais un contrat aux États-Unis, mais j’ai fait tout mon possible pour régler ça avec eux. Que Renato ait été là a été pour moi un facteur supplémentaire. Aujourd’hui, on est capitaine et vice-capitaine du club qui nous a formés. Il râle toujours autant, mais bon, on apporte notre expérience.

Le club a beaucoup changé en dix ans ?Il s’est amélioré niveau infrastructures. Mais comme tous les clubs argentins, il traverse une grosse crise économique. C’est aussi ce qui a précipité mon retour, pour donner un petit coup de main.

Pas trop dur de passer de Miami à Banfield ?C’est un changement (rires). Sur le plan sportif, c’est beaucoup mieux. En ce qui concerne la vie au jour le jour, bon, ici c’est un autre type de folie. Là-bas, c’était beaucoup plus tranquille. C’était sympa, hein. Je n’avais aucune pression, je n’avais aucun problème. Mais bon, on est des joueurs de foot, et cette passion démesurée qui se vit ici autour de ce sport, elle nous plaît quand même un peu. On s’en plaint quand on est là, mais elle nous manque quand on est à l’étranger.

Tu as été servi : tu as joué trois Clásicos du Sud en un mois et demi. Cela représente quoi, Banfield-Lanus, en Argentine ?C’est un Clásico, donc ça représente tout. Les supporters commencent le match deux semaines avant. C’est très, très important. Mais bon, avec l’expérience, on essaye de faire descendre un peu la pression, surtout à Banfield où on a un effectif très jeune. On leur dit que gagner c’est très beau, mais que ça peut aussi mal tourner et qu’il faut y être préparé.

À Boca, tu avais raté ça, puisque tu y as joué la seule année où River n’était pas là.Ils étaient descendus, ouais. J’ai raté ce dont tout le monde parle. Et je ne l’ai jamais non plus vécu depuis les tribunes, figure-toi. C’est sur ma liste des trucs à faire. Boca, c’était bien. J’ai découvert un club énorme, qui te fait perdre ta discrétion dans toute l’Argentine, mais bon, ça vaut le coup d’être vécu.

Quand tu as quitté Banfield pour l’Ajax, en 2008, tu étais en Primera depuis cinq saisons déjà. Aujourd’hui, cela semble impossible. Comment faire pour retenir encore un peu les jeunes talents du foot argentin ?C’est très compliqué. Aujourd’hui, tu n’as plus besoin de passer par un grand club pour t’en aller. La télé, les téléphones ont rapproché les clubs européens de nos jeunes joueurs. Certains sont partis sans même avoir joué en première division. Pour les joueurs, c’est un avantage, mais pour les clubs, c’est devenu impossible de rivaliser avec les offres de l’extérieur. Du coup, c’est très rare de voir un bon joueur rester plus d’un an ou deux. Mais bon, c’est l’époque dans laquelle on vit.

Tu ressens les conséquences sur le niveau du championnat ?Il y a une génération de jeunes entraîneurs qui a redonné de l’identité aux clubs argentins, en essayant de jouer du début à la fin. Gallardo, Almeyda, Almiron, etc. Ils sont passés par l’Europe et ont rapporté avec eux des bonnes idées. Ça donne des bons matchs, mais si les trois meilleurs joueurs de l’équipe s’en vont à la fin, ça ne dure que le temps d’un championnat. Donc se projeter à long terme est compliqué.

En parlant d’Europe, ce soir, c’est le match de tes ex entre Nice et l’Ajax. Tu vas le regarder ?Bien sûr, on sera devant la télé. Ça va être un beau match entre deux clubs que j’apprécie beaucoup.

Tu as quand même laissé de meilleurs souvenirs à Nice qu’à l’Ajax, non ?Oui, complètement. Après Banfield, Nice a été le premier club à me faire sentir comme chez moi. Il y a vraiment eu des grands moments, pas seulement sur le terrain, mais aussi en dehors. Ce n’est pas un club comme un autre pour moi et ma famille.

Qu’est-ce qui a attiré ton attention en arrivant en Ligue 1 ?À quel point c’était dur physiquement !

Et vous leur racontez quoi sur la France, à vos jeunes coéquipiers, avec Renato ?Que des bonnes choses. Ils nous posent souvent des questions, parce qu’il y a un match à la télé ou qu’ils voient un résumé des matchs du week-end. J’espère que plusieurs d’entre eux auront la chance d’y jouer. C’est un pays spectaculaire pour vivre, au-delà de la barrière de la langue.

Tu as suivi la belle saison de Nice ?Je regardais les matchs quand ils les passaient à la télé ici, et sinon je les cherchais sur internet. Si je pouvais remonter le temps, je prendrais peut-être une autre décision, comme ça je jouerais dans cette belle équipe, avec Balotelli. J’espère qu’après 56 ans, ils vont ramener la Ligue des champions à la ville et aux supporters.

Tu as raté Balotelli à Nice, mais tu as eu Luis Suárez à l’Ajax.Oui, je l’ai croisé dans un avion il n’y a pas longtemps. Je suis très heureux de le voir à ce niveau. Il s’est amélioré partout, mais ça reste le même joueur, intenable sur le terrain.

Il ne t’a jamais mordu ?Non, mais on le branchait toujours à cause de ses dents. À l’époque, il y avait aussi Klas Huntelaar, qui est revenu au club. On avait une sacrée équipe, avec Vertonghen, Eriksen, Gabri, Oleguer, Luque… Mais j’étais jeune et inexpérimenté. Je n’avais sans doute pas le bon état d’esprit. J’ai eu du mal à m’adapter, j’ai décidé de partir en prêt.

Tu as fait des asados à Mathieu Bodmer ?Non, non ! Déjà, je galérais pour trouver de la viande argentine. Je devais la faire venir sous vide depuis Paris.

Passons à l’avant-match. Van Basten ou Claude Puel ?J’ai appris beaucoup des deux. Claude m’a bien aidé, mais je choisis Van Basten. Avec son expérience et son talent, pour un attaquant comme moi, c’était très utile d’avoir ses conseils.

Après ton départ, Puel a dit qu’avec plus de travail, tu aurais pu faire une meilleure carrière. Tu es d’accord avec lui ?Oui. Je n’étais pas très bien avec moi-même à la fin de l’expérience niçoise. J’avais besoin de changer d’air, mais pour des raisons personnelles. Mais si j’étais resté et j’avais changé la carte sim, j’aurais peut-être pu avoir une meilleure trajectoire. Ce sont des décisions que l’on prend à un moment donné de nos vies. Je ne regrette rien, mais j’avais sans doute encore beaucoup à faire et à apprendre à Nice.

Après ta première saison, c’est la Roma qui te voulait. Ça t’avait perturbé ?Ça a été un peu dur. Tu ne reçois pas tous les jours des offres de ce type de club. Nice avait refusé, mais ça ne m’avait sans doute pas fait de bien mentalement. J’aurais dû continuer de la même façon, sans me prendre la tête. Mais bon, c’est du passé.

Amsterdam ArenA ou Allianz Riviera ?Je dois choisir avec le cœur, au-delà du fait que l’Amsterdam ArenA soit magnifique. J’ai davantage senti la chaleur de l’Allianz, et j’y ai marqué le premier but de son histoire.


Promenade des Anglais ou quartier rouge ?Non, non, la Prom’ ! Tu as la mer et tout. J’étais très triste le 14 juillet dernier, on a appelé tout de suite tous nos amis sur Nice. Un sale moment pour tout le monde.

Rien à voir, mais c’est vrai que tu voulais jouer avec la sélection croate ?Quand je suis arrivé à l’Ajax, je me suis réuni avec le sélectionneur et les dirigeants de la Fédération. On a fait les papiers, le passeport, tout ça. C’était pour l’Euro 2008, mais la FIFA ne m’a pas donné l’autorisation. La Croatie avait déjà beaucoup de joueurs non natifs, et ils m’ont dit que ça remontait à trop loin.

Et maintenant, c’est quoi le futur ? Remporter la Libertadores l’année prochaine ?Je crois que c’est aussi difficile pour Banfield de gagner la Libertadores que pour Nice de gagner la Ligue des champions. À cause de mauvaises expériences, j’ai appris à ne pas trop parler du futur, ni à me projeter. Je profite du présent.

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Propos recueillis par Léo Ruiz

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